Face aux prescriptions croissantes de traitements contre le diabète, l’Agence nationale de sécurité du médicament (ANSM) va renforcer sa « vigilance » sur d'éventuels effets indésirables graves, a-t-elle annoncé ce 5 juillet.
Cette famille de traitements, à laquelle appartient notamment le sémaglutide (Ozempic), mime une hormone sécrétée par les intestins (GLP-1) qui agit sur le pancréas pour favoriser la sécrétion d'insuline et envoie au cerveau un signal de satiété après l'ingestion de nourriture.
Dans ses récentes recommandations sur le diabète de type 2, la Haute Autorité de santé (HAS) intègre tôt la prescription de ces médicaments en cas de réponse insuffisante aux traitements de première intention. Indiqués également pour le contrôle du poids en cas d’obésité (encore non remboursés en France dans cette indication), ces médicaments administrés en stylo injectable sont parfois détournés pour perdre du poids à des fins esthétiques et non de santé.
« Environ 700 000 personnes en France prennent ce type de traitements, on va arriver très rapidement au million, et l'utilisation de ces molécules va encore augmenter dans les années à venir, a déclaré à l'AFP la Dr Isabelle Yoldjian, directrice médicale à l'ANSM. Cette forte utilisation peut faire apparaître plus largement des risques jusqu'alors très rares ou montrer que des risques connus sont plus graves qu'envisagé ».
Jusqu'alors, l'ANSM a « recensé peu de cas d’effets indésirables graves (...), sans doute en raison des tensions importantes d'approvisionnement qui nous ont contraints à restreindre l'utilisation », est-il indiqué dans un communiqué. Mais, « lorsque ces tensions prendront fin, un plus grand nombre de patients pourront avoir accès aux traitements, ce qui pourrait entraîner une nette augmentation des cas d'effets indésirables graves », est-il ajouté.
Évènements gastro-intestinaux, risques liés à l’anesthésie, cancers rares
Pour en savoir plus, le groupement Epi-Phare - qui rassemble l'ANSM et l'Assurance-maladie sur la base du système national des données de santé (SNDS) -, en collaboration avec un centre de Bordeaux (centre Drugs-SafeR), a lancé des études pharmaco-épidémiologiques.
« Le travail va se développer durant trois ans et, s'il débouche dans l'intervalle sur des découvertes de risques, il permettra d'agir rapidement », a expliqué la Dr Yoldjian.
L’objectif d’Epi-Phare est d’examiner « les évènements gastro-intestinaux rares mais graves », dont la pancréatite, l’occlusion intestinale, la gastroparésie, mais aussi d’estimer la fréquence des risques liés à l'anesthésie, notamment de pneumopathies d'inhalation. Même si le lien avec le traitement n’a pas été établi à ce jour, l’équipe étudiera aussi la possibilité d’un risque accru d’idées suicidaires. Enfin, « des études porteront sur la surveillance d’effets indésirables à long terme, actuellement non-connus ou très rares, comme le risque de cancer de la thyroïde ou de cancers gastro-intestinaux », précise le communiqué.
Mésusage à des fins esthétiques et circuit non légal
L'ANSM a aussi réitéré ses avertissements sur des stylos injecteurs « obtenus en dehors du circuit légal et sécurisé », dans le sillage d'alertes de l’Agence européenne du médicament et de l'Organisation mondiale de la santé sur des stylos faussement étiquetés Ozempic.
Le sémaglutide rencontre un fort succès sur les réseaux sociaux pour ses propriétés amaigrissantes, ce qui a conduit à des ruptures de stocks dans certains pays, comme l'Australie. En France, selon les estimations de l’Assurance maladie, 1,5 % des patients traités sont considérés en situation de mésusage. Une proportion probablement sous-estimée car elle ne prend en compte que les médicaments dispensés en pharmacie et remboursés.
Analogues du GLP-1 commercialisés en France
Ozempic (sémaglutide)
Byetta (exénatide)
Trulicity (dulaglutide)
Victoza (liraglutide)
Saxenda (liraglutide)
Xultophy (liraglutide/insuline dégludec)
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