Alors que les traitements du diabète se sont nettement améliorés et que l'intérêt de la prévention de cette maladie, notamment par le biais de l'alimentation et de l'activité physique régulière n'est plus à démontrer, nous assistons à une augmentation du diabète de type 2, notamment chez les jeunes.
Comment expliquez-vous cela ?
Il s'agit là d'un problème de société qui dépasse largement la médecine. Le diabète est la conséquence de deux facteurs majeurs, touchant pratiquement tous les pays : la sédentarité et la modification de l’alimentation. Outre le fait de manger trop gras et trop sucré, le grignotage et les compulsions font partie du quotidien d'un grand nombre de nos concitoyens. Le modèle français symbolisé par les 3 repas par jour pris à table, ensemble, à heure fixe selon une composition traditionnelle laisse, désormais, place à une alimentation déstructurée à n’importe quelle heure, seul, devant un écran… Les « progrès » de la société font que l'homme moderne se retrouve confronté à de multiples sollicitations et il est bien souvent seul face à ses problèmes émotionnels qu'il essaye de gérer, parfois par des comportements addictifs concernant notamment l'alimentation. Tout se passe comme si l'espèce humaine était devenue capable de modifier son environnement au point de se mettre elle-même en péril. Aujourd'hui, on sait soigner le diabète mais on a le plus grand mal à le prévenir !
Que préconisez-vous pour améliorer la prise en charge des patients atteints de maladies chroniques et notamment, du diabète ?
Le traitement des maladies chroniques nécessite un changement de comportement des patients. Ce changement n'est possible que si le médecin prend le temps de discuter avec le patient de ses possibilités d’adaptation (selon son histoire personnelle, son niveau éducatif, son mode de vie, l’aide de son entourage…) en fixant des objectifs précis, réalistes. On ne peut proposer à un patient atteint d'une arthrose de la hanche de faire du jogging ou à une personne ayant un petit logement, de faire du vélo d'appartement.
La rémunération des médecins doit-elle être adaptée aux actions de prévention et d’éducation ?
Certainement. Le médecin qui intègre, dans sa consultation, des actions de prévention, d’éducation, de coordination et qui pratique la décision partagée avec le patient doit recevoir une rémunération adaptée. Car cela nécessite du temps. Mais ce temps passé c’est autant d’amélioration de l’observance des patients, autant de complications en moins et autant d’économies pour la société. La rémunération à l'acte et la T2A ne sont pas adaptées. La dotation globale modulée (par exemple, en fonction de la précarité de la patientèle) ou la capitation conviennent davantage. Aujourd'hui, 20 millions de patients souffrent, en France, d'une maladie chronique et 10 millions sont en ALD (dont 3 millions de diabétiques). Il faut réorganiser notre système de soin autour des maladies chroniques.
Comment réorganiser pour mieux prendre en charge le diabète ?
Il faut favoriser le travail d'équipe. Le médecin ne peut plus exercer seul, dans son cabinet. Or, notre système de santé souffre de l'éclatement entre les différents professionnels de santé et entre la ville et l’hôpital. Tous les professionnels de santé devraient apprendre à travailler ensemble sur des objectifs fixés communs. Seul le travail collectif peut permettre une prise en charge globale des patients atteints de maladies chroniques. C'est ce que nous avons souhaité démontrer dans l'ouvrage Les Maladies Chroniques, Vers la 3e Médecine (ed Odile Jacob) pour lequel médecins, paramédicaux, sociologues, philosophes, économistes, gestionnaires, et patients ont contribué d'une même voix.
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