77 %, c’est taux de rémission complète du diabète à 1 ou 2 ans obtenu avec la chirurgie métabolique chez les patients diabétiques (1). Mais qu’entend-on par rémission complète ? La définition en a été rappelée par la Pr Martine Laville (ville hop ?) : GAJ < 100 mg/dl, arrêt des antidiabétiques oraux (ADO) depuis au moins 1 an et HbA1c < 6 % (2).
Si le taux de 77 % de rémission du diabète à court moyen terme est effectivement spectaculaire, il diffère toutefois suivant le type de chirurgie : 48 % (anneau gastrique), 84 % (by-pass), 68 % (sleeve), 98 % (dérivation bilio-pancréatique, DVB).
Des guérisons… au moins à moyen terme
Les principaux essais cliniques randomisés comparant chirurgie métabolique et traitement médical ont bien montré que, dans une population des patients diabétiques et obèses, la réduction de l’HbA1c et du poids étaient nettement plus importantes avec la chirurgie qu’avec le traitement médical, et que ces réductions allaient aussi de pair avec un allégement des traitements du diabète (3).
Dans le travail de Mingrone (4), si la différence d’HbA1c était plus importante avec la chirurgie (baisse d’au moins 1 % par rapport au traitement médical), la différence sur le taux de rémission du diabète était-elle, sans appel : nul avec le traitement médical, ce taux était de 75 % pour le by-pass et de 95 % pour la DBP à 2 ans. Ce taux avait toutefois tendance à diminuer au fil du temps, avec un taux à 5 ans de 37 % pour le by-pass et 50 % pour la DBP.
Les résultats de l’étude SOS confirment cette évolution, montrant un taux de rémission de 72 % à 2 ans mais de 36 % à 10 ans. Si le taux à 10 ans paraît relativement faible, il reste néanmoins important eu égard aux contraintes évitées à ces patients pendant cette longue période.
Vers un score de rémission
Reste à savoir comment identifier les candidats susceptibles de bénéficier particulièrement de ce type de chirurgie. Certains s’y sont essayés, en proposant un score de prédiction de la rémission. Ainsi chez des patients déjà opérés (anneau ajustable ou by-pass), 5 critères de bon pronostic ont été identifiés : BMI < 50, durée du diabète < 4 ans, HbA1c < 7,1 %, GAJ < 1,14 g/l et traitement par antidiabétiques oraux sans insuline ; un score de 3/5 (ou supérieur) laissant envisager une rémission possible du diabète (5). Bien que la période d’évaluation soit très courte (1 an), la démarche est néanmoins intéressante. Pourrait être ajouté à cette liste un taux de c-peptide > 1 nmol/l à 1 an après bypass (6).
La rémission dépendrait donc de l’ancienneté du diabète, de sa sévérité et du degré d’insulinosensibilité. Parmi les facteurs de mauvais pronostic, figurent à l’inverse une longue durée d’évolution, un mauvais contrôle glycémique pré-opératoire (> 6,5%) et le recours à l’insuline (7).
Effet BRAVE
Quels sont les mécanismes impliqués dans la rémission du diabète ? Les interventions entraînent des modifications physiologiques et physiopathologiques importantes dans le cycle des aliments, rassemblées sous la dénomination d’« effet BRAVE » (8) : modification de la sécrétion biliaire, réduction du volume gastrique, altération du transit des nutriments dans le tube digestif, modification vagale, et modification de la sécrétion hormonale digestive impliquant au moins ghréline et GLP1 (lire aussi ci-dessous). Pour rappel, la ghréline, secrétée au moment de la faim, inhibe l’insulinosécrétion au niveau de l’îlot de Langherans et agit aussi au niveau de l’axe entero-cérébral en augmentant la prise alimentaire et la libération d’hormones hyperglycémiantes ; sa sécrétion serait ici inhibée en cas de sleeve.
Quant au GLP1, si son taux est abaissé dans le diabète, il est en revanche augmenté après by-pass. La comparaison de sécrétion de GIP et de GLP1 d’une population de patients ayant subi un by-pass un mois auparavant à celles d’une population de sujets obèses ayant suivi un régime VLDC, à perte de poids égale (–10 kg), montre une augmentation du taux de GLP1, soulignant donc l’effet spécifique du by-pass. Cette libération de GLP1 ferait intervenir en particulier des récepteurs au goût sucré, situés au niveau du tube digestif.
D’autres éléments seraient également impliqués, dont la liste n’a pas fini de s’allonger : SGLT1, acides biliaires, microbiote intestinal, etc.
Médecin endocrinologie et métabolismes, centre hospitalier sud francilien (CHSF)
D’après la communication de Martine Laville
(1)Buchwald H. JAMA 2004;292(14):1724-37
(2) Buse JB. Diabetes Care 2009;32(11):2133-5
(3) Schauer PR. NEJM 2012;366:1567-76
(4) Mingrone G. Lancet 2015, http://dx.doi.org/10.1016/S0140-6736(15)00075-6
(5) Robert M. Obes Surg 2013;23(6):770-5
(6) Aarts EO. Obes Surg 2013;23:867-73
(7) Arteburn et al. Obes Surg 2013;23:93-102
(8) Obesity Reviews 2010;12(5): e257-272.
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