« Nous sommes très enthousiastes d'avoir découvert que le diabète de type 1 (DT1) recouvre deux affections distinctes, a déclaré dans un communiqué le Pr Noel Morgan, auteur principal d'une étude publiée dans « Diabetologia », le journal de l'Association européenne pour l'étude du diabète (EASD). Cette découverte pourrait avoir une importance capitale pour ouvrir des voies de prévention du DT1 pour les futures générations d'enfants ».
Des études cliniques antérieures ont suggéré que le diabète de type 1 n'est pas une maladie unique, même si les symptômes cliniques sont essentiellement les mêmes chez tous les patients. Cependant, cette idée a été très difficile à prouver jusque-là car le pancréas, l'organe principalement impliqué dans la cause du diabète de type 1, n'est pas d'accès facile chez les personnes nouvellement diagnostiquées avec la maladie.
Le Pr Morgan, par ailleurs directeur de l’Institut de science biochimique et clinique à l'université d'Exeter au Royaume-Uni, explique l'originalité des résultats obtenus au « Quotidien ». « Nous disposons à Exeter d’une grande et unique banque d'échantillons de pancréas prélevés sur des enfants et jeunes adultes décédés peu de temps après le diagnostic du DT1, rapporte-t-il. Nous avions déjà utilisé ces échantillons pour étudier les cellules immunitaires présentes dans les îlots des patients d'âges différents ». De ces premiers travaux, il en est ressorti que les lymphocytes diffèrent chez les plus jeunes enfants (< 7 ans) par rapport à ceux plus âgés (> 13 ans) au début du diabète.
Un métabolisme différent de la proinsuline
Cependant, il était important de confirmer ces premières observations. « Dans cette étude, nous avons étudié la proinsuline dans les îlots des jeunes patients selon ces groupes d'âge, poursuit le chercheur britannique. Il est apparu que la transformation de la proinsuline (en insuline) est anormale dans la plupart des cellules bêta productrices d'insuline chez les très jeunes enfants avec DT1, mais beaucoup moins chez ceux qui sont plus âgés au moment du diagnostic du diabète. Ces différences de métabolisme de la proinsuline sont corrélées à l'inflammation des îlots. Ces résultats confortent l'existence de deux endotypes (E1 et E2) du diabète de type 1, le DT1E1 et DT1E2 ».
Les implications cliniques sont multiples. « Premièrement, puisque les enfants plus âgés (diagnostic après 13 ans) conservent plus de cellules bêta que prévu au moment du diagnostic (et au-delà), ceci suggère la possibilité que ces cellules puissent être revigorées afin d’augmenter leur libération d'insuline naturelle et obtenir un meilleur contrôle de la glycémie », explique le Pr Morgan.
Deuxièmement, la meilleure compréhension des différents profils des cellules immunitaires dans les îlots des enfants avec DT1E1 et DT1E2 ouvre la voie à de nouvelles immunothérapies personnalisées. « Les thérapies efficaces dans le DT1E1 pourraient l’être beaucoup moins dans le DT1E2 et vice versa », indique le chercheur d'Exeter. Troisièmement, la confirmation que les très jeunes enfants perdent rapidement leurs cellules bêta et ne produisent pas beaucoup (ou pas du tout) d'insuline endogène implique « un suivi plus intensif afin de minimiser le risque de développer des complications rénales, cardiovasculaires et ophtalmologiques », souligne-t-il.
Et la tranche d'âge intermédiaire des 7-12 ans
Quel objectif de recherche désormais ? « Les enfants situés entre les deux tranches d'âge, c'est-à-dire âgés de 7 à 12 ans lors du diagnostic, peuvent avoir l'un ou l'autre endotype, rapporte le Pr Morgan. Il est maintenant important de développer un test sanguin simple qui permette de distinguer les enfants selon leur endotype, afin de pouvoir administrer la bonne immunothérapie. Puisqu'il existe des différences dans le ratio proinsuline/C-peptide dans chaque groupe, c'est une piste possible ».
Pour la Pr Elizabeth Robertson, directrice de recherche au sein de l’association Diabetes UK qui a contribué au financement de l'étude : « L’ère où nous pourrons stopper l’attaque immunitaire responsable du DT1 est en vue, mais si nous voulons développer des traitements efficaces il nous faut saisir toute la complexité de la maladie. L’annonce faite aujourd’hui nous rapproche un peu plus de cet objectif ». Ce travail n'a été possible que grâce à la collecte d'échantillons de pancréas. « Chacun d’eux représente une tragédie pour une famille car ils proviennent d'enfants décédés peu de temps après l'apparition du DT1, rappelle-t-il. Il est de notre responsabilité de les utiliser à bon escient pour en faire bénéficier les patients ».
P. Leete et al., Diabetologia, 10.1007/s00125-020-05115-6, 2020
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