Les inhibiteurs de point de contrôle immunitaire (checkpoint inhibitor) peuvent être à l’origine de diabètes auto-immun (Ciadm). Ces nouveaux traitements ont entraîné un changement de paradigme dans le traitement de nombreux cancers, avec une efficacité impressionnante sur certaines tumeurs malignes, d’abord les mélanomes et les cancers du poumon (sauf à petites cellules), et leurs indications continuent à se développer. Ces agents inhibent des régulations spécifiques de voies immunitaires, telles que la protéine présente à la surface des lymphocytes T (programmed cell death protein 1 ou PD1) et cytotoxiques. Le lymphocyte T peut interagir via PD1 avec une cellule tumorale présentant PD-L1 à sa surface. Quant au facteur 4 d’activation des lymphocytes T (CTLA4), il vise à accroître l’activité immunitaire antitumorale.
Une étude de la littérature 2014 à avril 2022 porte sur les cas de Ciadm associés à un inhibiteur de point de contrôle (1). Les données les concernant sont limitées, mais permettent d’identifier les caractéristiques de présentation et les facteurs de risque pour les présentations précoces ou sévères des patients adultes présentant de tels diabètes. Les patients répondant aux critères diagnostiques du Ciadm et présentant des signes d’hyperglycémie (glycémie > 11 mmol/L ou HbA1c ≥ 6,5 %) et déficit en insuline (peptide C < 0,4 nmol/L et/ou acidocétose diabétique [ACD]) ont été inclus pour l’analyse.
Sur 1 206 articles, seuls 192 patients répondant aux critères diagnostiques ont été inclus. Leur âge moyen était de 63,4 ± 12,4 ans. Tous sauf un (99,5 %) avaient déjà été exposés à un traitement anti-PD1 ou anti-PD-L1. Sur les 91 patients testés (47,3 %), 59,3 % avaient des haplotypes de susceptibilité au diabète de type 1 (DT1). Le temps médian pour le début diabète était de 12 [6–24] semaines. Une ACD est survenue dans 69,7 % des cas, le peptide C initial était faible dans 91,6 %. Des auto-anticorps contre le DT1 étaient présents dans 40,4 % (73 sur 179) cas, et étaient significativement associés à l’ACD (p = 0,0009) et au début plus précoce du Ciadm (p = 0,02).
Le Ciadm se présente donc couramment comme une acidocétose inaugurale. Alors que les auto-anticorps du diabète de type 1 ne sont positifs que dans 40,4 %, ils s’associent à des présentations plus précoces et plus sévères.
Un risque à considérer
Il existe un risque élevé de développer de tels diabètes insulinopéniques (C peptide < 0,4 nmol/L) chez tous les patients recevant ces thérapeutiques, encore plus dans les familles à risque de DT1. De plus, le risque d’acidocétose est important (70 %), surtout parmi ceux (40 %) qui ont des anticorps.
Il faut donc anticiper ces situations et mieux définir toutes ces formes de diabètes secondaires, et les distinguer des DT1 en général en affinant le périmètre des DT1 de l’adulte (Lada).
Cela participera à mieux décrire les nombreuses formes de diabètes autres que DT1 et DT2, au-delà d’une classification aujourd’hui considérée comme sommaire et réductrice.
Professeur Emérite, Université Grenoble-Alpes
(1) Wu L, et al. Risk factors and characteristics of checkpoint inhibitor-associated autoimmune diabetes mellitus (Ciadm): a systematic review and delineation from type 1 diabetes. Diabetes Care. 2023 Jun 1 ;46(6):1292-9
doi: 10.2337/dc22-2202
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