LE QUOTIDIEN - Comment l’AFD juge-t-elle le parcours de soins des patients diabétiques ?
GERARD RAYMOND - Ce parcours de soins est pipé depuis le départ. Il n’est constitué que de recommandations des autorités de santé, comme l’hémoglobine glyquée ou le fond d’œil. Encore faut-il avoir un ophtalmo sous la main ! De plus, on prescrit des soins podologiques ou des consultations de diététique, mais il y a un reste à charge. C’est également aux patients qu’il revient d’organiser la coordination des soins. Résultat, ils ne s’y retrouvent pas car ce parcours ne répond pas aux besoins actuels. Il doit devenir un vrai parcours de santé, intégrant la qualité de vie des patients, leurs croyances, et prenant en compte le projet de vie de la personne.
Quelles évolutions suggérez-vous ?
Le médecin traitant bénéficie de la ROSP [rémunération sur objectifs de santé publique]. Pour le pharmacien se dessine l’entretien pharmaceutique avec une rémunération à la clé. Nous pensons que le patient aussi devrait avoir une gratification quand il s’engage dans un tel parcours. Le discours actuel qui consiste à dire "améliore ton hygiène de vie, sinon dans 15 ans tu seras aveugle" ne parle pas aux patients. Il ne faut plus être dans l’injonction, mais dans la promotion et l’encouragement. Nous pensons par exemple que des consultations podologiques ou de diététique pourraient être prises en charge par les payeurs.
Le programme SOPHIA de la CNAM est souvent décrié par les médecins. Vous satisfait-il ?
On peut faire beaucoup de reproches à SOPHIA. Il n’empêche qu’il inclut aujourd’hui 450 000 personnes qui en sont satisfaites. Ce programme rompt l’isolement et propose aux patients de parler et d’échanger sur leur maladie. Il permet aussi à l’assurance-maladie de faire passer des messages de prévention secondaire. Beaucoup de médecins en sont satisfaits aussi, jugeant que leurs patients sont mieux informés et se prennent davantage en charge. De plus, lorsque SOPHIA recommande aux patients une hémoglobine glyquée, un fond d’œil, ou un examen cardiovasculaire, le compteur "tourne" pour les praticiens dans le cadre de la rémunération sur objectifs. Donc les médecins y trouvent leur compte aussi. C’est un programme intéressant qu’il faut faire évoluer. Les changements de comportement induits par SOPHIA ne peuvent pas s’évaluer en un an, il faut attendre un peu.
L’AFD souhaite faire du diabète la « grande cause 2014 ». Qu’est-ce que ça changerait ?
Cette maladie touche sans doute près de 4 millions de personnes [environ 3 millions selon la CNAM] et 400 nouveaux cas sont diagnostiqués tous les jours. C’est 30 000 décès par an, 8 000 amputations, et 29 000 cas de cécité. Tout ça coûte 18 milliards d’euros par an à l’assurance-maladie.
Cette pathologie mérite donc d’être grande cause nationale pour 2014. La stratégie nationale de santé met l’accent sur la prévention, le diabète est de toute évidence emblématique de cette démarche. Être grande cause nationale ne débloque aucun moyen financier mais donne accès gratuitement à la publicité dans les médias. Ensuite, il faudra mobiliser les acteurs pour mener des actions de prévention sur le terrain. Si on prend bien en charge le prédiabète, on peut réduire de 20 à 30 % la déclaration de la maladie.
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