Le vaccin BCG, vieux de plus de 100 ans, a toujours la cote auprès des chercheurs. Proposé au début de la pandémie de Covid-19, le vaccin avait alors suscité un engouement médiatique et dans le grand public, avant que l’enthousiasme ne retombe avec la publication de résultats négatifs et l’arrivée du vaccin à ARNm. La piste trouve un regain d’intérêt avec des chercheurs américains qui ont utilisé un protocole modifié chez des sujets à risque diabétiques de type 1.
Dans un essai de phase 3 ayant inclus 141 patients randomisés en 2:1 contre placebo, une équipe du Massachusetts General Hospital (MGH) montre que des injections intradermiques multiples (cinq à six) de la souche Tokyo du BCG protègent significativement de l’infection par le Covid-19 (p = 0,023), mais aussi d’autres infections (virales, bactériennes, fongiques) [p < 0,0001]. Ces nouveaux résultats obtenus lors de la seconde phase de la pandémie (variants Bêta, Gamma, Delta et Omicron), au terme de près de deux ans de suivi (avril 2021 à novembre 2022), sans aucun perdu de vue, vont dans le sens de ceux de leur précédent essai de phase 2 de quinze mois mené lors de la première vague de Covid.
Dans le même temps, l’équipe a mis en évidence une protection peu élevée contre le Sars-CoV-2 conférée par les vaccins ARNm dans cette population particulière, ce que d’autres avaient également observé selon les auteurs. Les résultats de cet essai sont publiés dans iScience, une revue du groupe Cell.
Des résultats d’essais internationaux controversés en population générale
Pendant la pandémie, des essais nationaux et internationaux ont testé si une seule injection de BCG, ou un rappel chez des sujets déjà vaccinés, pouvait protéger du Covid. Les résultats chez les adultes vaccinés sont controversés avec cinq essais internationaux positifs et sept négatifs.
Pour leurs deux essais, les chercheurs se sont servis de la cohorte BCG Trial mise en place avant la pandémie. Pendant la période de 26 mois pré-Covid, les participants ont reçu trois injections, avant d’en recevoir deux autres lors de la première vague et une dernière lors de la circulation du variant Delta. Dans ce contexte américain, les patients n’avaient pas été vaccinés par le BCG dans l’enfance. Ici, sur les 141 participants, 93 ont été randomisés dans le groupe BCG avec cinq (30 %) ou six doses (70 %) et 48 dans le groupe placebo (injections factices).
Moins d’infections en général
L’essai de phase 2 avait retrouvé une efficacité contre le Covid-19 de 92 % ; ici dans la phase 3 avec des variants circulants différents, l’efficacité est plus faible, s’élevant à 43,2 % (p = 0,023), avec 22 patients infectés sur les 93 du groupe BCG (23,7 %) et 20 des 48 du groupe placebo (41,7 %). Sur l’ensemble des 34 mois étudiés, l’efficacité s’établit à 54,3 %. Des chiffres à mettre en perspective avec l’efficacité décevante constatée en parallèle avec le vaccin ARNm dans la population de l’étude (pas de protection significative). La vaccination BCG ne semble pas avoir interféré avec l’efficacité des vaccins Covid, écrivent les auteurs. Par ailleurs, les participants du groupe BCG ont eu significativement moins d’infections de tout type (44 événements versus 66).
Quels bénéfices aux doses multiples ? « Chez les patients naïfs de vaccination BCG, les effets hors cible prennent au moins deux ans à se mettre en place, explique la Dr Denise Faustman, immunobiologiste au MGH et professeure de médecine à la faculté de Harvard, l’autrice senior. L’administration de doses multiples permettrait d’accélérer ce processus ». Les auteurs insistent ainsi sur l’intérêt pour la démonstration de n’avoir pas inclus des patients précédemment vaccinés ou ayant eu une tuberculose, ce type d’antécédents étant susceptible de rendre moins visible l’intérêt d’une vaccination récente par le BCG.
La vaccination peut offrir une protection sur des décennies, un avantage par rapport à de nombreux autres vaccins. « Le vaccin BCG ouvre la perspective d’une forme de protection presque à vie contre tout variant de Covid-19, la grippe, le VRS et d’autres maladies infectieuses », fait valoir la Dr Faustman. L’étude ne dit cependant pas si le vaccin BCG protège davantage des formes sévères. Pour l’heure, alors que la pandémie se poursuit, la chercheuse envisage de « travailler avec la Food and Drug Administration (FDA) pour autoriser le BCG chez les patients diabétiques de type 1, qui sont particulièrement à risque pour toutes les maladies infectieuses ».
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