1/Diététique postopératoire
Les grands principes de la diététique postopératoire sont quasiment les mêmes pour tous les types de chirurgie :
- manger lentement en mastiquant bien, dans le calme ;
- faire des collations de manière à obtenir un apport calorique correct car les repas vont être très légers, au moins au début ;
- éviter de boire en mangeant car cela peut empêcher la bonne prise alimentaire, au moins au début ;
- maintenir un apport en protéines suffisant et respecter un bon équilibre alimentaire pour prévenir les carences (viandes, poissons, laitages, fruits et légumes) ;
- éviter les aliments très caloriques qui compromettent la perte de poids ;
- éviter les aliments trop sucrés, trop gras ou trop salés qui peuvent entraîner des dumping syndromes. À l’inverse, certains aliments « classiques » sont mal tolérés au début, il faut alors les exclure pendant un certain temps et essayer de les réintroduire en petites quantités après quelques semaines.
On conseille également la pratique d’une activité physique modérée mais régulière après l’intervention afin notamment d’éviter une perte de masse maigre trop importante. En effet, la masse musculaire, principal constituant de la masse maigre, est un des éléments importants dans le maintien de la perte de poids à long terme.
2/Prise en charge postopératoire
La prise en charge postopératoire est indispensable. Elle doit être effectuée périodiquement par l’équipe multidisciplinaire initiale en coordination avec le médecin traitant, de façon rapprochée la première année (idéalement tous les trois mois) puis au moins annuellement les années suivantes. Ce suivi permet de dépister et de prendre en charge rapidement les 10 aspects essentiels suivants.
Carences nutritionnelles
Une enquête alimentaire et des bilans biologiques sanguins postopératoires réguliers sont réalisés une fois tous les 6 mois la première année puis tous les ans (NFS, ionogramme sanguin, calcémie, calciurie, PTH1-84, albuminémie, bilan martial, folates sériques, vitamines D, B1 et B12 au minimum). Les patients opérés d’un GBP prennent dès leur sortie de chirurgie une supplémentation systématique en multivitamines ; on choisit les préparations les plus complètes contenant des oligoéléments (ex : Azinc Optimal : 2 cp/j ou Elevit B9 : 1 cp/j). D’autres vitamines ou minéraux sont ensuite ajoutés en fonction des bilans biologiques postopératoires fer, calcium, vitamine B1, vitamine B12, apports protéiques, etc..
Signes de dénutrition
Un amaigrissement trop rapide, une fatigue, une dépression, une fonte musculaire, voire des œdèmes des membres inférieurs sont des signes évocateurs de dénutrition, mais ils sont extrêmement rares.
Vomissements inexpliqués associés à une dysphagie
Survenant généralement dans les 3 premiers mois postopératoires, ces vomissements doivent faire rechercher une sténose et/ou un ulcère de l’anastomose gastrojéjunale dont le diagnostic est fait par la fibroscopie œsogastrique. En cas de sténose, un traitement par dilatations endoscopiques répétées (2 à 3 séances sous anesthésie générale) permettra de retrouver une anastomose fonctionnelle. En cas d’ulcère anastomotique, un traitement par IPP à dose importante et généralement prolongé (si besoin associé à une éradication d’Helicobacter pylori) permet d’obtenir une guérison complète.
Douleurs post-prandiales fugaces associées à des borborygmes ou des « gargouillements » gênants.
Ces symptômes sont classiques après ce type de chirurgie mais ils sont difficiles à traiter. Un traitement par des médicaments à base de charbon ou des antispasmodiques en cas de douleurs peut être essayé. Parfois, certains aliments identifiables déclenchent des crises, il faut alors les exclure de l’alimentation. Le plus souvent, ces troubles surviennent sans cause identifiable et ne régressent pas toujours avec le temps, le patient doit apprendre à vivre avec. Néanmoins, certaines douleurs répétitives doivent faire évoquer une occlusion intermittente sur bride ou par hernie interne, et constituent une urgence chirurgicale.
Douleurs post-prandiales à distance de la chirurgie s’aggravant avec le temps.
En cas de douleurs post-prandiales qui s’aggravent avec le temps, il est impératif d’effectuer une opacification digestive (tomodensitométrie ou TOGD) afin de rechercher un obstacle sur une anse intestinale responsable d’une occlusion, qui peut être une hernie interne ; ce diagnostic impose bien sûr une intervention chirurgicale rapide.
Douleurs de l’hypocondre droit
Il peut s’agir de coliques hépatiques en rapport avec la présence de calculs vésiculaires dont la formation est favorisée par l’amaigrissement rapide et important. En cas de calculs vésiculaires présents avant la chirurgie, la cholécystectomie simultanée est de règle systématique, en raison de l’impossibilité d’extraction endoscopique des calculs du cholédoque après GBP. La cholécystectomie préventive (sur vésicule alithiasique) n’est généralement pas effectuée. Certaines équipes préconisent d’effectuer un traitement préventif par Ursolvan si la vésicule biliaire a été laissée en place. Il est préférable de détecter la présence d’une lithiase vésiculaire dans l’année qui suit le GBP par échographie de principe.
Malaises
Les malaises sont des équivalents de « dumping syndrome », lié à l’arrivée rapide des aliments dans le jéjunum : il s’agit là, en revanche, d’aliments généralement clairement identifiables, soit trop gras, soit trop sucrés, soit trop salés et il faut les exclure pour éviter un nouveau malaise.
Hypoglycémies « fonctionnelles »
Il s’agit d’hypoglycémies survenant en période postprandiale tardive, liées à une réponse hyperinsulinique après augmentation trop rapide de la glycémie en postprandial. La suppression des sucres rapides de l’alimentation et le fractionnement des repas permettent généralement de résoudre le problème, des médicaments (par exemple l’acarbose [Glucor]) peuvent parfois être efficaces.
Chute des cheveux
Une chute des cheveux, fréquente chez les femmes, témoigne soit d’une perte de poids rapide et importante sans carence clairement identifiée, soit d’une carence en un ou plusieurs éléments précis : fer, vitamine B6, vitamine B12, zinc, etc. Il suffit alors d’apporter per os ces éléments déficitaires. En l’absence de carence identifiée, la chute des cheveux est toujours réversible en quelques mois mais on peut augmenter la dose de multivitamines (ex : Azinc Optimal : 3 cp/j par exemple) pour passer un cap difficile.
Anémie
L’anémie est typiquement microcytaire par carence martiale prédominante, parfois macrocytaire par carence en vitamine B12, souvent normocytaire en cas de carence mixte (fer, B12, folates). L’expérience prouve qu’il vaut mieux traiter les carences au début de leur installation et ne pas attendre une anémie franche car de fortes doses substitutives par voie parentérale sont alors nécessaires pour restaurer un statut vitaminique correct. La carence profonde en vitamine B12 entraîne une pancytopénie. Les carences en fer sont facilement corrigées par un traitement per os à condition que l’anémie soit modérée et que la tolérance digestive du fer pris par voie orale soit bonne. Les carences en vitamine B12 sont très classiques après by-pass gastrique en raison de la section gastrique mais ne surviennent généralement qu’après le 6e mois postopératoire car les réserves hépatiques en vitamine B12 sont importantes. La substitution se fait donc classiquement par voie intramusculaire, une ampoule de 1 000 mcg/ml une fois par mois en moyenne, elle est généralement débutée entre le 6e et le 12e mois postopératoire et doit être poursuivie à vie, avec une fréquence d’administration qui dépend des résultats biologiques
3/Les précautions en cas de grossesse :
La grossesse ne doit être envisagée que lorsque la perte pondérale est arrivée à son terme en pratique entre la 1re et la 2e année postopératoire ; les stocks de fer et de vitamines doivent être évalués auparavant et les carences corrigées de manière préventive. L’information avant la réalisation du GBP est essentielle, en particulier en ce qui concerne les décisions de grossesse.
Conclusion
En France, le nombre de patients obèses ayant eu une chirurgie bariatrique augmente d’environ 10 000 par an. Il est clair que le nombre de médecins et de chirurgiens spécialistes pouvant les suivre n’augmente pas proportionnellement. Le rôle du médecin traitant devient actuellement majeur pour coordonner le suivi de ces patients, en collaboration avec l’équipe médicochirurgicale responsable de l’intervention. Un effort de communication et de collaboration entre ces différents acteurs semble donc indispensable afin d’optimiser la prise en charge de ces patients.
Dr Patrick Gasser (Avenir Spé) : « Mon but n’est pas de m’opposer à mes collègues médecins généralistes »
Congrès de la SNFMI 2024 : la médecine interne à la loupe
La nouvelle convention médicale publiée au Journal officiel, le G à 30 euros le 22 décembre 2024
La myologie, vers une nouvelle spécialité transversale ?