LE « DOSSIER » n’a été ouvert que très récemment : c’est en 1997 que des scientifiques se sont interrogés sur l’association entre obésité et mortalité accrue. Depuis, de nombreuses études épidémiologiques ont porté sur l’association complexe entre l’obésité, quelques maladies chroniques et la survie. Dans ce contexte, la dernière édition du « Lancet » publie les résultats de la Prospective Studies Collaboration (PSC), qui collige les données concernant 894 576 adultes participant à 57 études prospectives conduites sur quatre continents. Ce travail avait pour objectif d’évaluer l’association entre l’indice de masse corporelle (IMC) et la mortalité globale et spécifique.
Parmi tous ces participants qui avaient eu une mesure de l’IMC à l’inclusion, 15 996 sont morts pendant les cinq premières années du suivi et 852 824 étaient toujours en vie à l’entrée dans l’année 5. Pendant les 6,5 millions de personnes années qui ont suivi (en moyenne 8 années par personne), ont été enregistrés 72 749 décès, dont 66 552 de cause identifiée : 30 416 de cause vasculaire, 2 070 de cause diabétique, rénale ou hépatique ; 22 592 de cause néoplasique ; 3 770 de cause respiratoire ; enfin, 7 704 d’autres causes.
Globalement, les résultats concernant la mortalité en fonction de l’IMC sont les suivants :
- IMC entre 22,5 et 25 kg/m 2 : dans les deux sexes, la mortalité de toutes causes était la plus faible dans la tranche 22,5-25 kg/m 2 d’IMC ;
- au desssus de 25 kg/m 2 : la mortalité était en moyenne plus élevée de 30 % à chaque augmentation de 5 kg/m 2 de l’IMC, cela même dans la tranche d’âge 70-79 ans. Le HR (hazard ratio) était de 1,41 pour la mortalité d’origine vasculaire, 2,16 pour l’origine diabétique, 1,59 pour l’origine rénale et 1,82 pour l’origine hépatique, 1,10 pour les causes néoplasiques, 1,20 pour les causes respiratoires et 1,20 également pour les autres origines ;
- en dessous de 22,5 kg/m 2 : on a noté une association inverse entre l’IMC et la mortalité globale, principalement du fait de maladies respiratoires liées au tabac et de cancers du poumon. La mortalité par maladies respiratoires est multipliée par 4 chez les hommes et 3 chez les femmes.
Maladies liées au tabac.
« Bien que d’autres mesures anthropométriques (tour de taille, rapport taille/hanche) puissent ajouter des informations, l’IMC est en lui-même un solide élément prédictif de la mortalité que ce soit pour des valeurs supérieures ou inférieures à 22,5-25 kg/m 2, expliquent les auteurs. L’excès progressif de mortalité au-dessus de ces valeurs est dû principalement aux maladies vasculaires et est probablement largement causal. À 30-35 kg/m 2, la médiane de survie est diminuée de deux à quatre ans ; à 40-45 kg/m 2, elle est réduite de huit à dix ans (ce qui est comparable à la perte de vie liée aux effets du tabagisme). L’excès de mortalité en-dessous de 22,5 kg/m 2 est due principalement aux maladies liées au tabac et n’est pas complètement expliqué. »
Deux hypothèses.
Dans un éditorial associé, Francisco Lopez-Jimenez (Etats-Unis) souligne le risque de mortalité accrue chez les personnes qui ont un IMC normal-bas, entre 18,5 et 22,5 kg/m 2, par rapport à ceux dont l’IMC est entre 27,5 et 30. « Presque toutes les études épidémiologiques qui ont évalué la relation entre IMC et mortalité ont montré des résultats similaires, même si la présente étude est la première à prouver que l’augmentation de la mortalité chez les gens qui ont un IMC limite bas est due principalement à des maladies respiratoires. » Les études qui ont évalué la relation entre IMC et la mortalité chez les sujets présentant une maladie coronarienne ou une insuffisance cardiaque ont montré des phénomènes similaires, poursuit l’éditorialiste. Idem pour la mortalité hospitalière des sujets en soins intensifs.
Comment expliquer cette mortalité accrue pour un IMC normal-bas ? Première hypothèse : le stockage des graisses peut être protecteur chez quelques individus exposés à des agressions aiguës. Deuxième hypothèse : les individus concernés ont peut-être une faible masse maigre. Or celle-ci est utile au métabolisme glucidique et à la consommation d’oxygène.
Lancet du 28 mars 2009, pp. 1083-1096 et 1055-1056 (éditorial).
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