La task force américaine confirme la tendance observée outre-atlantique dans la prise en charge du risque cardiovasculaire par les statines : l'abandon des cibles thérapeutiques de LDL-cholestérol.
Dans ses nouvelles recommandations, la task force américaine des services de prévention proposent les statines en prévention chez les adultes de 40 à 75 ans sans antécédents cardiovasculaires à condition qu'ils présentent deux caractéristiques. La première et la présence d'au moins un facteur de risque cardiovasculaire : dyslipidémie caractérisée par un taux de LDL-cholestérol supérieur à 130 mg/dL ou un taux de HDL-choelstérol inférieur à 40 mg/dL, hypertension, diabètes, tabagisme.
La seconde est un risque d'événement cardiovasculaire supérieur à 10 % à 10 ans. Ce risque est calculé à l'aide de l'équation de risque cardiovasculaire approuvée par le collège américain de cardiologie (ACC) et l'association américaine de cardiologie (AHA). Cette équation prend en compte l'âge, le sexe, l'ethnie, la tension artérielle, la présence ou non de diabète etc.
Pas de recommandation au-delà de 75 ans
Pour les patients ayant au moins un facteur de risque cardiovasculaire, sans antécédent, mais dont le risque d'événement cardiovasculaire est situé entre 7,5 et 10 % à 10 ans, les auteurs des recommandations ne ferment la porte aux statines, et estiment que la décision doit être évaluée au cas par cas par le médecin. Notons que cette dernière recommandation est de niveau plus faible (niveau C) que celle concernant les patients dont le risque d'accident cardiovasculaire est de plus de 10 % (niveau B). En revanche, les auteurs n'ont pas trouvé dans la littérature d'élément leur permettant de recommander l'initiation d'un traitement par les statines chez les patients de plus de 75 ans.
L'approche américaine tranche avec la vision européenne. Les dernières recommandations de la société européennes de cardiologie attribuent des cibles thérapeutiques de cholestérol précises en fonction des facteurs de risque et du taux de cholestérol de départ.
Des études hétérogènes
Les recommandations américaines ont été écrites en s'appuyant sur une revue de 19 études randomisées (plus de 71 000 patients), également publiée dans le « JAMA ». Ces données permettaient d'observer une diminution significative de 14 % de la mortalité toutes causes chez les patients sous statines, et une diminution de 31 % de la mortalité cardiovasculaire. Le risque d'AVC est quant à lui diminué de 29 % et celui d'infarctus du myocarde de 36 %.
Il existe toutefois une grande hétérogénéité dans les résultats d'une étude à l'autre. Certaines ne montraient pas de bénéfice en termes de mortalité, et l'une d'entre elle, associe la prise d'une haute dose de statine avec un risque accru de cataracte nécessitant une opération chirurgicale. Quatre autres études notent une augmentation du risque de diagnostic de diabète dans les années qui suivent la mise sous statine. Une fois les résultats poolés, les statines ne sont pas associées à une augmentation significative du risque d'événements secondaires, qu'il s'agisse de myalgies ou d'atteintes hépatiques.
Des études, comme l'étude WOSCOPS ou l'étude AFCAPS, ont confirmé le bénéfice des statines chez des patients ayant des taux modérés de LDL-cholestérol. L'étude JUPITER, quant à elle a montré l'existence d'un bénéfice pour les patients ayant un taux normal de cholestérol mais un taux élevé de protéine C réactive.
Absence de cible
Les recommandations n'imposent aucune cible de cholestérol, préférant baser la décision uniquement sur la présence de facteurs de risque cardiovasculaires, ce qui constitue « un message difficile à faire passer à la communauté médicale », selon les Dr Ann Marie Navar et Eric Peterson, de l'institut de recherche Duke, en Caroline du Nord. Dans un édito associé aux recommandations, ils rappellent que « près d'une génération de médecins a considéré le niveau de cholestérol comme unique cible de traitement par les statines plutôt que le risque cardiovasculaire dans son ensemble. Seule une minorité de praticiens utilisent les méthodes complexes de calcul de probabilité du risque pour choisir la thérapie la plus adaptée ».
Statine Use for the Primary Prevention of Cardiovascular Disease in Adults : US Preventive Services Task Force Recommendation Statement, JAMA du 13 novembre 2016
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