« Taxer les boissons sucrées est l'une des stratégies les plus efficaces pour réduire leur consommation. C'est une évidence de santé publique et une politique gagnant-gagnant, qui permet d'améliorer à long terme la santé des habitants, tout en générant des revenus réinvestis dans les programmes éducatifs de la ville de Philadelphie », assure le Pr Christina A. Roberto, professeur assistant d'éthique médicale et de politique de santé, au sein de l'École de médecine Perelman de l'Université de Pennsylvanie, à la lumière d'une étude qu'elle vient de publier dans le JAMA*.
Le 1er janvier 2017, Philadelphie, où plus de 68 % des adultes et 41 % des enfants sont en surpoids ou obèses, devient la seconde ville américaine à expérimenter une taxe d'accise sur les sodas, d'1,5 cent par once (28 ml). Ses recettes sont réinvesties dans les écoles maternelles et primaires et les parcs. L'étude du Pr Roberto compare les ventes des boissons avec sucre et sucre artificiel un an avant la mise en place de cette mesure et un an après, dans 291 magasins (54 supermarchés, 20 commerces de gros, et 271 pharmacies). Sont aussi inclus des points de vente en proche banlieue et à Baltimore, ville contrôle, qui ne connaît pas une telle taxe. Mais restaurants ou magasins plus informels ne sont pas pris en compte.
Diminution des ventes de 38 %
La taxe a eu pour effet d'augmenter le prix des sodas de 0,65 cent par once dans les supermarchés, 0,87, dans les commerces de gros et 1,56 cent dans les pharmacies.
Les chercheurs observent une diminution des volumes de ventes de sodas taxés de 51 % entre 2016 et 2017 à Philadelphie contre 2,3 % à Baltimore ; les ventes en banlieue ont, elles, en revanche, augmenté de 43 %, ce qui les amène à conclure à une diminution globale de 38 % des ventes de boissons sucrées. Cela représente près de 83 millions de cannettes de soda en moins. Similaire, bien que moindre diminution (-10 % des ventes de boissons sucrées) avait été observée dans la ville de Berkeley, la première des États-Unis a avoir adopté une taxe soda, d'un cent par once, en 2014.
Dans le détail, les supermarchés accusent la plus forte diminution des ventes de sodas taxés (-59 % par rapport à leurs pairs de Baltimore), comparé aux commerces de gros, (-40 %), et aux pharmacies (13 %). Parmi les explications avancées par les auteurs : une plus grande signalisation de la taxe dans les grands magasins, un transfert des achats vers le commerce de gros, ou une sensibilité différente des consommateurs aux variations de prix, selon les lieux de vente. Il semblerait par ailleurs que les acheteurs ne se déportent pas vers les boissons non taxées ni les poudres ou sirops.
Les auteurs notent enfin que cette mise en application de la fiscalité comportementale n'a pas eu d'incidence sur le chômage. Seuls les supermarchés ont pâti de la baisse de leurs recettes liées à l'alimentation. Aujourd'hui, de telles taxes, fortement encouragées par l'American Heart Association, existent dans sept villes américaines ; et le Connecticut et le Colorado réfléchissent à leur généralisation au sein de leur État.
En France, une taxe soda existe depuis 2013 et a été révisée en 2018 afin de mieux prendre en compte le taux de sucre contenu dans la boisson.
* C.A.Roberto et al., JAMA, volume 321 n°18, 1800, 14 mai 2019.
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