Glucosamine dans l’arthrose

Peut-être pas efficace, mais pas dangereuse

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Publié le 07/09/2020

La question semble enfin tranchée : la glucosamine, utilisée massivement dans l’arthrose en particulier dans les pays anglo-saxons, n’accroît pas le risque de diabète (1).

Crédit photo : Phanie

La glucosamine est utilisée de manière courante pour le traitement des douleurs articulaires liées à l’arthrose, cette molécule étant l’un des composants du cartilage. Si son efficacité reste non démontrée, tant sur les douleurs que sur l’évolutivité de l’arthrose, son utilisation est très répandue puisqu’environ 20 % des sujets d’âge moyen l’utilisent aux États-Unis, en Grande-Bretagne et en Australie. Mais des doutes planent sur de possibles effets délétères en population générale — risque de favoriser le diabète, un syndrome métabolique — et plus encore chez les diabétiques de type 2 (DT2). En effet, la glucosamine est un glucide de la famille des osamines dont la structure est basée sur celle du glucose. C’est un précurseur utilisé pour la glycosylation des protéines et des lipides. Des travaux menés in vitro ont montré qu’elle détériorait le métabolisme du glucose et majorait l’insulinorésistance. Mais qu’en est-il in vivo ? De vastes études observationnelles, prospectives, ont été entreprises pour répondre à cette question.

Un effet anti-inflammatoire bénéfique ?

C’était l’objectif de ce travail fondé sur la Biobank (1), qui a analysé 404 508 participants (indemnes de DT2, cancers et maladies cardiovasculaires au départ, HbA1c <  6,5 % et glycémie à jeun < 7 mmol/L) afin d’évaluer l’association entre l’usage habituel de glucosamine et le risque de DT2.

Résultat, au cours d’un suivi médian de 8,1 ans, 7 228 cas incidents de DT2 ont été documentés. La consommation de glucosamine était associée à un risque significativement plus faible de DT2 (HR = 0,839 [0,78–0,89]), après ajustement pour l’âge, le sexe, l’IMC, la race, le centre, l’indice de Townsend, des facteurs liés au mode de vie, antécédents de maladies et d’autres supplémentations. Cette réduction de risque de DT2 était plus prononcée chez les participants ayant une CRP de base plus élevée que chez ceux avec un niveau de ce marqueur d’inflammation plus bas. Le score de risque familial de DT2 n’a pas modifié cette association.

Cette vaste étude vient confirmer plusieurs autres travaux qui plaident en faveur d’un effet favorable sur les glycémies et même sur le risque cardiovasculaire sans pour autant que les mécanismes impliqués soient connus pour la glucosamine — tout comme pour la chondroïtine. La médiation par un effet anti-inflammatoire semble une piste intéressante. Certes, de possibles biais peuvent avoir influencé le résultat (meilleur mode de vie de ceux prenant ce supplément par exemple) mais cette étude possède une forte puissance et les données y sont remarquablement nombreuses et bien colligées.

Une réponse rassurante

On retiendra d’abord l’absence d’effet délétère de la consommation régulière de glucosamine. Il s’agit d’une question qui est souvent posée au médecin traitant par des personnes diabétiques ou des sujets à risque cardiométabolique et à laquelle nous avons bien du mal à répondre.

En somme, même si la prise de glucosamine ou de chondroïtine est loin d’avoir démontré des effets favorables chez les « rhumatisants », au moins ces sujets d’âge moyen n’encourent-ils pas de risque accru de diabète. Et d’autres études ne montrent pas un risque d’aggraver l’état diabétique lorsque le DT2 est déjà diagnostiqué.

 

Professeur émérite, Université Grenoble-Alpes

(1) Hao Ma et al. Glucosamine use, inflammation, and genetic susceptibility, and incidence of type 2 diabetes: a prospective study in UK biobank. Diabetes Care 2020;43:719-25 | doi.org/10.2337/dc19-1836

 

Pr Serge Halimi

Source : lequotidiendumedecin.fr