L’arsenal thérapeutique du diabète de type 2 s’enrichit de plus en plus rapidement après plusieurs décennies sans réelles innovations. Ces progrès ont conduit à une mise à jour en janvier 2015 des recommandations élaborées en 2012 par l’association américaine du diabète (ADA) et l’association européenne pour l’étude du diabète (EASD).
« Cette prise de position ADA/EASD centrée sur le patient est devenue la recommandation de référence au niveau mondial », a précisé le Pr Bernard Charbonnel (endocrinologue, hôpital Hôtel Dieu, Nantes).
Les recommandations rappellent la nécessité de réduire l’hyperglycémie afin de diminuer les complications microvasculaires : oculaires, neuropathies, amputations et insuffisance rénale terminale. L’impact du contrôle glycémique sur le risque macrovasculaire est discuté. D’où l’importance des mesures hygiéno-diététiques : arrêt du tabac, alimentation, excercice physique et de la réduction des facteurs de risque : tension artériel, bilan lipidique etc. L’ADA et l’EASD soulignent aussi que le traitement du diabète de type 2 doit être personnalisé en fonction de l’âge du patient et des commorbidités et en tenant compte des risques notamment d’hypoglycémie.
HBA1c en desous de 7 %
La valeur cible d’HBA1c reste donc ‹ 7 %, « en étant plus ou moins strict chez les plus jeunes et les plus âgés, a indiqué le Pr Charbonnel. Au sein des critères d’individualisation, un distinguo est désormais fait entre les facteurs modifiables et les non modifiables. L’individualisation n’est pas synonyme de laxisme ».
Pour la stratégie, la metformine est toujours le médicament de première intention et reste possible pour des clairances de la créatinine › 30 ml/mn. En-deçà de ce seuil, il faut se tourner préférentiellement vers les inhibiteurs de DPP4. Le choix de la bi- et trithérapie doit être individualisé. Les inhibiteurs du SGLT2 ou gliflozines sont désormais dans les algorithmes et constituent une option raisonnable en deuxième ou troisième ligne.
Le principal changement de ces recommandations concerne d’ailleurs les inhibiteurs du SGLT2 dont les avantages et les inconvénients sont précisés. Pour les avantages : baisse de 0,5 à 1 % de l’HbA1c comparé au placebo avec la même efficacité initiale ques les autres classes d’antidiabétiques oraux, pas d’hypoglycémet et une baisse modeste du poids et la pression artérielle. Parmi les effets secondaires, l’ADA et l’EASD signalent les infections mycosiques génitales chez la femme et chez l’homme, les infections urinaires, un effet antidiurétique à prendre en compte chez les personnes âgées, l’augmentation de la créatininémie, réversible, et du LDL cholestérol et un probable risque de fractures. Récemment, la survenue de cas graves d’acidocétose à glycémie modérément élevée (avec un risque de retard au diagnostic) a conduit à une réévaluation européenne, toujours en cours, du rapport bénéfice/risque. Pour l’heure, aucun médicament de cette classe n’est commercialisé en France.
Concernant les inhibiteurs de la dipeptidylpeptidase-4 (DPP-4), les recommandations ne mentionnent plus efficacité modeste mais un risque plus élevé d’hospitalisation pour insuffisance cardiaque. « D’où la précaution chez les patients insuffisants cardiaques, en attendant les résultats d’autres études », a souligné le Pr Charbonnel. L’interrogation sur le risque de pancréatite et qui concernait l’autre catégorie des incrétines, les agonistes du récepteur du GLP1 est lévée. De même, pour les thiazolidinediones, le risque de cancer de la vessie a été écarté.
À noter que dans la stratégie thérapeutique, le choix peut se faire entre un agoniste du GPL1 ou de l’insuline en cas de mauvais contrôle de la glycémie malgré une trithérapie orale. Les modalités de l’insulinothérapie évoluent avec la possibilité, précisée dans les recommandations, de rajouter un inhibiteur du GLP1 à une insuline basale.
L’Académie prend position
En octobre dernier, l’Académie nationale de médecine, la Société francophone du diabète, le Conseil national professionnel d’endocrinologie, diabétologie et maladies métaboliques et l’Association française des diabétiques ont officiellement pris position en faveur d’un contrôle optimisé de la glycémie. Face aux doutes exprimées quant aux bénéfices réels de cette stratégie (Boussageon et coll., revue « Exercer », 2014), interrogations fondées sur des publications de 2008 et 2009 (ACCORD, ADVANCE et VADT), l’académie rappelle que « la large panoplie de médicaments hypoglycémiants permet de personnaliser la conduite thérapeutique en optimisant le rapport bénéfice/risques avec notamment une diminution du risque d’accidents hypoglycémiques et de prise pondérale ». Pour cela l’académie se fonde « sur les plus récentes données de la littérature et sur cinquante années de pratique qui ont considérablement amélioré le pronostic des patients diabétiques ». Elle fait remarquer que si la preuve d’une réduction des complications macrovasculaires est moins évidentes chez des sujets déjà porteurs de lésions chronicisées, « le bénéfice devient sigificatif chez les patients diabétiques, non ou peu compliqués, précocement traités, suivis sur une longue période ». C’est le cas des patients jeunes qui bénéficient le plus de la prévention par le contrôle glycémique.
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