Les nouvelles recommandations de la HAS sur le traitement du diabète de type 2 (DT2) sont attendues en 2024. De son côté, la Société francophone du diabète (SFD) vient de rendre son nouvel avis d’experts (1), qui précise notamment la place des agonistes des récepteurs du GLP1 (arGLP1) et des inhibiteurs de SGLT2 (iSGLT2). « Ces molécules protègent le cœur et les reins de nos patients à haut et très haut risque. Cependant, la mise en place de ces traitements protecteurs ne doit pas occulter l’importance de la recherche d’un équilibre glycémique optimal, qui reste une priorité pour les patients vivant avec un DT2, afin de les protéger aussi du risque de complications microvasculaires (notamment rétiniennes) ou du risque infectieux », rappelle le Pr Patrice Darmon (CHU de Marseille), coordinateur de la rédaction de cette prise de position.
Un arbre décisionnel selon le profil des patients
Les modifications du mode de vie restent le socle de la prise en charge et la metformine, le traitement de première ligne. En cas d’échec de celle-ci, le choix d’une bi, voire d’une trithérapie dépend de différents critères. Pour le patient dit en situation commune, c’est-à-dire âgé de moins de 75 ans, sans maladie athéromateuse avérée, ni insuffisance cardiaque, ni maladie rénale chronique, trois choix sont possibles après la metformine, toujours dans le cadre de la décision médicale partagée : soit un iSGLT2, soit un arGLP1 (ou, dans le futur, un double agoniste GIP/GLP1 comme le tirzépatide, qui pourrait arriver en France dans un ou deux ans) ou, enfin, un inhibiteur de la dipeptidylpeptidase-4 (iDPP4).
Lorsqu’il existe un surpoids ou une obésité, l’orientation se fait plus volontiers vers un médicament actif sur le poids, et donc soit vers un iSGLT2 soit, surtout, vers un arGLP1, plus puissant sur la perte de poids (notamment sémaglutide et dulaglutide à forte dose) ou, avec un niveau d’efficacité encore supérieur, un double agoniste GIP/GLP1. « Si l’on est très loin de l’objectif d’HbA1c individualisé que l’on souhaite atteindre, on optera pour un arGLP1 (notamment sémaglutide et dulaglutide à forte dose) ou, plus efficace encore, pour un double agoniste GIP/GLP1. En cas de risque cardiovasculaire jugé élevé ou très élevé chez un patient en prévention primaire, le choix se portera vers un iSGLT2 ou un arGLP1, avec toutefois un niveau de preuve modéré chez ces patients n’ayant pas encore fait d’évènement », souligne le Pr Darmon.
Chez les patients présentant une maladie rénale chronique ou une insuffisance cardiaque, il faut opter pour une bithérapie metformine et iSGLT2 d’emblée et ce, indépendamment du taux d’HbA1c.
En cas de maladie athéromateuse avérée, là encore, on prescrira une bithérapie d’emblée, indépendamment du taux d’HbA1c, en choisissant soit metformine + iSGLT2, soit metformine + arGLP1. Nuance apportée par rapport à la prise de position de 2021 : le choix se portera plus volontiers vers un arGLP1 en cas d’antécédent d’AVC ischémique.
De plus, la SFD propose désormais de façon plus explicite d’aller vers une trithérapie metformine-arGLP1-iSGLT2 (trithérapie) si l’équilibre glycémique n’est pas atteint par la bithérapie ou si l’on cherche une perte de poids supplémentaire, ou un bénéfice rénal ou cardiovasculaire supplémentaire.
Chez les personnes âgées avec un DT2 mais en bonne santé générale, l’arbre décisionnel est le même que chez les plus jeunes, en faisant néanmoins attention au risque de perte de poids excessive et de sarcopénie avec les arGLP1 et les doubles agonistes GIP/GLP1, et en évitant les sulfamides et glinides qui exposent aux risques d’hypoglycémie.
« Quant aux patients âgés, fragiles, ils relèvent d’abord de la metformine et des iDPP4, qui restent des médicaments faciles d’utilisation et dotés d’un meilleur profil de tolérance que les arGLP1 et les iSGLT2. Par ailleurs, ils ne donnent pas d’hypoglycémie et sont neutres sur le poids. En cas d’insuffisance cardiaque ou de maladie rénale chronique, un iSGLT2 peut être associé chez ces patients fragiles. Chez la personne âgée dépendante, c’est la metformine (sauf contre-indication), éventuellement un iDPP4, rarement un iSGLT2 (seulement en cas d’insuffisance cardiaque et en concertation avec le cardiologue) qui sont retenus, avec le plus souvent, assez vite, le recours à l’insuline », poursuit le Pr Darmon.
Les patients en situation d’obésité : un cas individualisé
Auparavant, seule l’obésité de grade ≥ 2 (avec un IMC > 35 kg/m2) faisait l’objet d’un avis d’experts spécifique. Désormais, cet avis concerne les patients en situation d’obésité dès le grade 1 (IMC ≥ 30 kg/m2). « D’abord parce que le contrôle du poids est essentiel dans la prise en charge des patients vivant avec un DT2 et que nous avons des traitements très efficaces sur le poids, avec les arGLP1 et, prochainement, les doubles agonistes GIP/GLP1. Ensuite, parce que la SFD souhaitait se positionner sur le rapport d’évaluation publié en 2022 par la HAS sur la chirurgie métabolique dans un but de rémission ou d’amélioration franche du diabète chez des patients ayant un DT2 et une obésité de grade 1, préconisant le recours à cette chirurgie en cas de diabète restant déséquilibré malgré une prise en charge médicale nutritionnelle bien conduite pendant au moins un an, dans un centre expert avec une réunion de concertation pluridisciplinaire incluant au moins un diabétologue. La SFD rejoint les conclusions de la HAS mais préconise d’avoir testé au préalable chez ces patients soit un arGLP1 soit, quand ils seront disponibles, un double agoniste GIP/GLP1 avant de les proposer au cas par cas à la chirurgie métabolique », indique le Pr Darmon.
Hors traitements
La prise en charge globale centrée autour du patient ne change pas : modification du mode de vie en première ligne, éducation thérapeutique, individualisation des objectifs glycémiques et stratégies thérapeutiques qui doivent être adaptés au profil du patient et fixés avec lui dans le cadre de la décision médicale partagée, metformine en première ligne (sauf contre-indication ou intolérance) et réévaluation thérapeutique régulière, font toujours partie du socle de prise en charge du patient vivant avec un DT2.
En revanche, les modalités de surveillance du diabète évoluent avec ce nouvel avis d’experts : « Les capteurs permettant une capture continue du glucose sont remboursés depuis longtemps chez les patients traités par au moins trois injections quotidiennes d’insuline, et depuis quelques mois également pour le Freestyle Libre 2, chez les patients traités par une ou deux injections d’insuline par jour si le taux d’HbA1c est supérieur à 8 %. Ainsi, les objectifs de maîtrise du diabète sont désormais également dérivés des renseignements apportés par ces capteurs. Outre l’HbA1c, on regarde chez ces patients les temps passés dans la cible, au-dessus et en dessous de la cible. Cela a été intégré dans l’avis sur l’autosurveillance de la prise de position de la SFD en 2023 », remarque le Pr Darmon.
(1) Darmon P, et al. Prise de position de la Société Francophone du Diabète (SFD) sur les stratégies d’utilisation des traitements antihyperglycémiants dans le diabète de type 2 - 2023. Med Mal Metab (2023),10.1016/j.mmm.2023.10.007
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