Les chiffres rapportés dans plusieurs publications par les experts de la « commission diabète » du Lancet donnent le tournis : en 2050 dans le monde, le nombre de personnes vivant avec un diabète, très majoritairement de type 2, pourrait atteindre le chiffre de 1,31 milliard, contre 529 millions estimés en 2021, soit une prévalence globale standardisée selon l’âge de 6,1 % (1, 2, 3).
Certes, cette augmentation drastique du nombre de diabétiques d’ici 2050 découlerait pour moitié de facteurs démographiques (accroissement et vieillissement de la population), mais elle n’en demeure pas moins un défi de santé publique majeur pour le siècle à venir compte tenu des conséquences du DT2 en termes de complications, de coûts de santé et d’années de vie perdues ou grevées par un handicap (Dalys).
Afrique du Nord, Moyen-Orient et Océanie particulièrement touchés
En 2021 les taux de prévalence standardisée selon l’âge les plus élevés ont été observés dans deux « super régions », l’Afrique du Nord et le Moyen-Orient (9,3 %), et en Océanie (12,3 %). À l’échelle nationale, c’est au Qatar que la prévalence du diabète par âge était la plus élevée, atteignant plus de 75 % chez les sujets âgés de 75 à 79 ans. La majorité des Dalys (96 %) était liée à un DT2, lui-même attribuable au surpoids ou à l’obésité dans plus la moitié des cas, avec de grandes disparités selon les régions du globe. Un IMC élevé était ainsi potentiellement en cause dans 68 % des Dalys en Afrique du Nord et au Moyen-Orient. Ce sont également ces deux « super régions » qui devraient connaître la prévalence du diabète la plus élevée en 2050, avec une valeur estimée à 16,8 %. Selon les projections actuelles, elle pourrait atteindre plus de 11 % en Amérique Latine et aux Caraïbes. Et, plus largement, la prévalence du diabète pourrait dépasser 10 % dans 89 des 204 pays et territoires (soit 43,6 %) évalués dans cette analyse.
Les experts estiment qu’en 2045, les trois quarts des adultes diabétiques vivront dans les pays à revenus faibles ou intermédiaires. Et seulement un sur dix serait pris en charge selon les recommandations de bonne pratique.
Des mesures jusqu’alors insuffisantes
Les mesures prises au cours des dernières décennies n’ont donc pas permis d’infléchir la tendance. Entre 1990 et 2021, la prévalence globale du diabète standardisée sur l’âge a quasi doublé, passant de 3,2 % à 6,1 %. Elle a plus que doublé en Afrique du Nord, au Moyen-Orient et dans les pays à hauts revenus. L’augmentation atteint 284 % en Égypte, 263 % au Groenland, 225 % au Timor-Leste et 211 % aux Seychelles. Seuls deux pays, le Mexique et les Philippines, ont connu au cours de cette période une augmentation de prévalence du diabète de moins de 30 %.
Globalement, le rôle du surpoids et de l’obésité est de plus en plus prégnant, en particulier dans les populations ayant connu une évolution rapide du mode d’alimentation, ce qui suggère un impact de l’épigénétique.
Pour relever le défi, il faut donc prendre en compte tours les facteurs concourant au surpoids et à l’obésité, génétiques, hormonaux, psychosociaux, mais aussi économiques, certaines populations, souvent les plus socialement défavorisées, n’ayant pas accès à une alimentation saine. Le rôle de la sédentarité en général et plus encore dans certaines populations est un autre facteur déterminant et l’activité physique un levier important de prévention. Parallèlement, l’accès au dépistage et aux traitements du diabète doit être facilité, ce qui est loin d’être le cas, pour des raisons variées, dans de nombreuses régions du monde.
Entretien avec le Pr Serge Halimi, Grenoble
(1) Diabetes Collaborators. Global, regional, and national burden of diabetes from 1990 to 2021, with projections of prevalence to 2050: a systematic analysis for the Global Burden of Disease Study 2021. Lancet. 2023 ;402:203-234.
(2) Editorial. Diabetes: a defining disease of the 21st century. Lancet. 2023;401 :2087
(3) Agarwal S et al. The role of structural racism and geographical inequity in diabetes outcomes. Lancet. 2023;402:235-249
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