« C’est le premier traitement personnalisé pour la prévention du diabète de type 1, précise le Dr Aaron Michels, chercheur au Centre Barbara Davis de l’université médicale du Colorado (États-Unis), qui co-signe l’étude publiée dans le « Journal of Clinical Investigation ». Nous pouvons prédire, avec un taux d’exactitude proche de 100 %, quelles personnes sont susceptibles de développer un diabète de type 1. »
Et de poursuivre : « Avec ce médicament, nous pourrions potentiellement prévenir jusqu’à 60 % des diabètes de type 1 chez les personnes à risque pour cette maladie. »
Maladies auto-immunes et système HLA
Apparaissant surtout dans l’enfance ou chez le jeune adulte, le diabète de type 1 (DT1), ou « insulino-dépendant », est causé par une destruction autoimmune progressive des cellules bêta pancréatiques productrices d’insuline. Les apparentés de premier degré (fratrie ou enfants) ont un risque de DT1 bien plus grand (30 fois plus) que dans la population générale. Dans ces familles, il est possible de prédire le DID par le dosage sérique d’anticorps anti-ilôts (stade 1 : au moins 2 auto-anticorps), puis par des anomalies de la glycémie (stade 2), plusieurs mois voire plusieurs années avant les symptômes qui apparaissent lorsque plus de 80 % des cellules bêta ont été détruites.
Bon nombre de maladies auto-immunes sont liées à des molécules HLA de classe II spécifiques. Dans le cas du DT1, 60 % des patients portent l’allèle HLA-DQ8, un facteur génétique majorant grandement le risque de DT1. Les molécules HLA-DQ8, qui sont présentes à la surface des cellules présentatrices de l’antigène (comme les macrophages), se lient à l’antigène pour le présenter aux lymphocytes T CD4+ qui activent la réaction auto-immune dans le DT1. Les Drs Ostrov (Université de Floride à Gainesville) et Michels, avec leurs collègues, ont donc pensé que s’ils pouvaient bloquer la molecule DQ8, il serait peut-être possible de prévenir la maladie.
Leurs travaux ont débuté il y a 10 ans. En considérant la structure tridimensionnelle de la molécule DQ8, ils ont analysé avec l’aide d’un superordinateur des milliers de médicaments approuvés par la FDA (Federal Drug Agency) afin d’identifier ceux qui pourraient inhiber la fixation de l’antigène.
Ils ont ainsi identifié la méthyldopa et constaté qu’elle bloque la présentation de l’antigène par le DQ8, à la fois in vitro et in vivo chez la souris et chez l’homme.
Dans un essai pilote, 20 patients portant l’allèle HLA-DQ8 et récemment diagnostiqués avec un DT1 (moins de 2 ans ; et produisant encore de l’insuline), ont été traités par méthyldopa. Ce traitement a permis de réduire non seulement la présentation de l’Ag-DQ8 (de 40 %), mais aussi les réponses inflammatoires des lymphocytes T, et il semble que la destruction des cellules bêta soit limitée et leur fonction préservée.
Bientôt une étude de phase II
Sur le plan de la sécurité, la méthyldopa est prescrite pour l’hypertension depuis longtemps, y compris chez l’enfant et la femme enceinte ; elle a été administrée à un grand nombre d’individus porteurs du DQ8 puisque 10 % de la population européenne porte l’allèle HLA-DQ8.
Ces résultats, s’ils sont porteurs d’espoirs, doivent néanmoins être confirmés dans des études randomisées contrôlées par placebo. Une telle étude de phase 2, soutenue par le NIH, doit débuter en mars. Elle portera sur 36 patients encore au stade présymptomatique du diabète de type 1 (stade 1 ou 2) et l’étude durera 3 ans. « Les implications de cette étude sont importantes pour le traitement du diabète mais aussi d’autres maladies auto-immunes, souligne le Dr Ostrov. La même approche pourrait être adaptée pour prévenir d’autres maladies auto-immunes, comme la polyarthrite rhumatoïde, la maladie coeliaque, la sclérose en plaques, le lupus érythémateux disséminé, et d’autres… »
Journal of Clinical Investigation, février 2018, Ostrov et coll.
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