L’analyse des essais thérapeutiques contrôlés ayant évalué quelques-uns parmi les hypoglycémiants disponibles illustre le fait qu’il faut maintenant raisonner en termes de molécules, et non de classes thérapeutiques et/ou d’effets hypoglycémiants dans la prise en charge du diabète de type 2.
Ainsi, parmi les sulfamides, le tolbutamide augmente la mortalité CV (étude UGDP) alors que le glicazide n’a aucun effet sur les événements CV majeurs mais augmente significativement le risque d’hospitalisation toutes causes (étude ADVANCE).
L’effet de la métformine n’est pas connu. Elle a été évaluée dans un essai de très mauvaise qualité et chez peu de patients ayant eu peu d’événements CV en 20 ans (n = 342 ; 39 infarctus du myocarde [IDM], 12 AVC), l’étude UKPDS 34, qui indique la possibilité d’un effet CV favorable. Mais, d’une part, dans cette étude, lorsque la métformine est associée à un sulfamide, il y a une augmentation significative de la mortalité totale, et d’autre part, une méta-analyse de l’ensemble des études ayant permis d’évaluer (imparfaitement) cette molécule, a conclu, au regard des intervalles de confiance des résultats, que la métformine pourrait aussi bien diminuer de 25 % qu’augmenter de 31 % la mortalité totale et qu’elle pourrait tout aussi bien diminuer de 33 % qu’augmenter de 64 % la mortalité CV.
Parmi les glitazar (PPAR activateurs), le muraglitazar augmente la mortalité CV (dossier d’évaluation pré-enregistrement) alors que l’aleglitazar (étude ALECARDIO) n’a pas d’effet sur les événements CV mais a de nombreux effets indésirables significatifs (altération de la fonction rénale, hémorragies digestives.
Parmi les glitazones, la pioglitazone n’a pas d’effet bénéfique sur les événements CV majeurs chez les diabétiques de type 2 en prévention secondaire (étude PROActive), mais elle diminue les événements CV majeurs chez les non diabétiques ayant une résistance à l’insuline et un antécédent d’AVC et/ou AIT (étude IRIS). En revanche, la rosiglitazone pourrait augmenter significativement le risque d’infarctus du myocarde (méta-analyse de Nissen).
Parmi les glinides, la natéglinide n’a aucun effet sur le risque d’événements CV majeurs (étude NAVIGATOR) chez des patients ayant une hyperglycémie à jeun sans diabète.
L’insuline n’a aucun effet spécifique sur les événements CV (étude ORIGIN).
Parmi les inhibiteurs de la DDP-4, alors qu’aucune des trois molécules évaluées contre placebo ne diminue le risque d’IDM et/ou d’AVC, la saxagliptine augmente significativement le risque d’insuffisance cardiaque (étude SAVOR) alors que l’alogliptine (étude EXAMINE) et la sitagliptine (étude TECOS) ont un effet neutre sur ce critère.
Parmi les agonistes du GLP-1, le lixisenatide n’a aucun effet sur le risque d’événements CV (étude ELIXA), mais il est annoncé que le liraglutide réduit le risque d’IDM, d’AVC et de décès CV dans l’étude LEADER dont les résultats seront publiés mi-juin 2016.
Parmi les gliflozines, la seule évaluation disponible contre placebo est celle de l’empaglilfozine dans l’étude EMPA-REG : dans cette étude, cette molécule ne diminue pas le risque d’IDM et/ou d’AVC, mais diminue le risque d’insuffisance cardiaque et par là même, le risque de mortalité CV et par là-même, la mortalité totale.
Des effets qui paraissent indépendants de la glycémie
Dans les essais thérapeutiques contrôlés ayant comparé des cibles différentes de glycémie et/ou d’HbA1c, il n’a jamais été mis en évidence de bénéfice CV en atteignant des glycémies plus basses dans les groupes avec traitement intensif par rapport aux glycémies plus élevées des groupes contrôles. Dans l’étude ayant enregistré la plus grande différence d’HbA1c entre les deux groupes comparés, l’étude VADT, atteindre une HbA1c à 6,9 % dans le groupe intensif par rapport à obtenir une HbA1c à 8,4 % dans le groupe contrôle, soit une différence de 1,5 % d’HbA1c en valeur absolue, n’est associé à aucun bénéfice de quelque nature que ce soit, tant cardiovasculaire que microvasculaire (rétinopathie, neuropathie, néphropathie).
Dans les études contre placebo, à diminution d’HbA1c similaire, le plus souvent entre 0,3 et 0,6 % en valeur absolue les effets cliniques observés ont été très différents selon les molécules. Ainsi, par exemple, la saxagliptine augmente le risque d’insuffisance cardiaque, l’alogliptine et la vidagliptine ont un effet neutre sur ce critère et l’empagliflozine diminue le risque d’insuffisance cardiaque.
En synthèse : un nouveau paradigme
En 2016, dans la prise en charge du diabète de type 2, il n’est toujours pas démontré de façon fiable et concordante, qu’atteindre une cible quelconque d’HbA1c améliore le pronostic de cette maladie. Il apparaît de plus en plus que le bénéfice de la prise en charge est spécifique à chaque molécule à utiliser et aux classes thérapeutiques et plus encore, il apparaît que ce bénéfice semble indépendant de l’effet des traitements sur la glycémie.
Dunkerque
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