Voilà plusieurs années que s’amoncellent des masses de résultats des études de sécurité cardiovasculaire (CV) dans le diabète de type 2 (DT2). Bientôt plus de 100 000 patients enrôlés, avec des médianes de suivi de 2 à 3 années. Ces études sont exigées par la FDA depuis l’affaire rosiglitazone (1), sur la base des données CV des essais de phase 2 et 3 (2). À noter, le seul critère de jugement obligatoire est fondé sur le MACE (Major Adverse Cardiovascular Events) : infarctus non létaux, AVC non létaux et les décès d’origine cardiovasculaire.
En se fondant sur ce critère, la sécurité CV des incrétines étudiées (saxagliptine, alogliptine et sitagliptine et lixisenatide) – historiquement les premiers antidiabétiques pour lesquelles ces données sont disponibles, puisque ce n’est pas le cas de la metformine ou des sulfamides (3) – a été validée dans la neutralité, sans bénéfice supplémentaire. Toutefois, une de ces études a été entachée d’un surrisque d’hospitalisation pour insuffisance cardiaque (IC) : SAVOR-TIMI 53 avec la saxaglipine (sans décès). Hasard malheureux ou effet propre (3) ? Toujours est-il que l’on ne retient pas d’effet de classe, si l’on en juge par TECOS avec la sitagliptine, ou ELIXA avec le lixisenatide.
Projecteur braqué sur l’insuffisance cardiaque
Ainsi, le projecteur a été soudain braqué sur cette complication chez les diabétiques, déjà signalée dans les études utilisant les glitazones. L’insuffisance cardiaque (IC) est rapidement devenue la préoccupation majeure concernant les patients DT2 (lire encadré ci-contre), qui sont surtout en occident âgés de plus de 65 ans, et plus encore lorsqu’il s’agit de femmes.
L’évènement de l’année
C’est pourquoi la communication des résultats de l’étude EMPA-REG Outcomes fut sans nul doute l’événement du dernier congrès de l’EASD et de toute l’année diabétologique (4). Pour une fois, enfin, les diabétologues tenaient une bonne nouvelle – aussi bonne qu’inattendue – : l’empaglifozine réduit de 38 % la mortalité, surtout CV, et répond à l’exigence de la FDA par des données de supériorité, un meilleur MACE que le bras contrôle (– 14 %). Ce bénéfice s’installe très rapidement, dès le 3e mois.
L’empaglifozine est historiquement le premier antidiabétique à démontrer un bénéfice CV, mieux qu’une sécurité. Mais de quel bénéfice parle-t-on ? Une baisse des infarctus ? Non. Des AVC ? Non plus !
Sont responsables la baisse de la mortalité de toutes causes (– 32 %), cardiovasculaire (– 38 %), le tout tracté par à la réduction des conséquences de l’IC (– 35 %). Des effets, si spécifiques et si rapides, que tout bénéfice d’origine métabolique, glycémique en particulier semble exclu. Ce sont les effets « diurétiques-like » qui sont pointés, mais cette piste n’expliquerait pas tout.
Au total, l’effet de – 14 % sur le MACE, n’est obtenu que grâce à la baisse de mortalité CV, une neutralité sur les IDM non fatals et un effet défavorable sur les AVC non fatals. En somme : il ne s’agit pas d’un effet sur la maladie athéromateuse, mais bien d’un l’effet essentiellement exercé sur l’insuffisance cardiaque, la volémie etc.
(1) Nissen SE et al. N Engl J Med 2007;356:2457-71. [Erratum N Engl J Med 2007;357:100]
(2) www.fda.gov/downloads/Drugs/ GuidanceComplianceRegulatoryInformation/Guidances/ucm071627.pdf
(3) Halimi S et al. Med Mal Métab. 2015(8) :768-775
(4) Zinman B et al. N Engl J Med. 2015 Nov 26;373(22):2117-28
(5) Shah AD et al. Lancet Diabetes Endocrinol. 2015;3:105-13
(6) HAS-ANSM. Stratégie médicamenteuse du contrôle glycémique du diabète de type 2 (2013)
(7) Taylor SI et al. J Clin Endocrinol Metab 2015;100:2849-52
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