La progestérone, présente dans les contraceptifs oraux, pourrait protéger contre une mauvaise grippe selon une étude chez des souris femelles. L’apport de progestérone à des femelles sévèrement infectées par le virus influenza A diminue l’inflammation, favorise la cicatrisation pulmonaire et accélère la guérison.
« Ces résultats ont des implications en santé publique : si la progestérone naturelle répare les poumons après une infection, alors les progestatifs synthétiques trouvés dans les contraceptifs pourraient également être protecteurs », explique au « Quotidien » le Dr Sabra Klein, chercheuse à l’université médicale de Johns Hopkins (Baltimore) qui a dirigé ce travail. Nous évaluons actuellement un progestatif de synthèse, le levonorgestrel, et nous constatons que cette forme de progestérone trouvée dans les contraceptifs protège également les souris femelles de la grippe sévère. »
Les concentrations de progestérone endogène fluctuent chez la femme, avec des concentrations modérées durant le cycle menstruel, élevées durant la grossesse, et basses après la ménopause. Des progestatifs de synthèse sont aussi pris sous forme de pilule contraceptive (associés ou non à un œstrogène) par plus de 100 millions de femmes dans le monde, ainsi qu’en hormonothérapie substitutive par les femmes ménopausées, et en traitement de diverses affections (cancer, ostéoporose, lésion cérébrale).
Mais si les effets de la pilule, et de la progestérone en particulier, sont bien étudiés dans le contexte des infections génitales, peu d’études ont évalué les effets de la progestérone sur d’autres sites muqueux, comme les voies respiratoires.
Une précédente étude du Dr Klein a montré un effet protecteur anti-grippal des œstrogènes chez les femmes ; ils réduisent en effet la réplication du virus grippal dans les cellules nasales, un effet qui est médié par le récepteur œstrogène bêta, absent sur les cellules nasales des hommes.
Dans l’étude actuelle, les chercheurs ont examiné si un apport de progestérone, équivalant aux taux physiologiques de la phase lutéale après ovulation ainsi qu’à la dose trouvée dans les contraceptifs oraux, influence la réponse de l’hôte à l’infection grippale. Ils ont étudié des souris femelles privées de leurs ovaires, et ont administré à certaines d’entre elles de la progestérone via un implant ; les souris ont ensuite été infectées par des doses quasi létales de virus influenza A.
La charge virale n'est pas modifiée
Ils ont constaté que la progestérone protège les souris sans affecter la charge virale, mais en diminuant l’inflammation, en améliorant la fonction pulmonaire, et de façon surprenante en favorisant la réparation de l’épithélium pulmonaire. Ces effets protecteurs de la progestérone sont médiés par la production accrue dans les poumons d’un facteur de croissance appelé amphiréguline. L’amphiréguline favorise la réparation cellulaire et le rétablissement de la barrière cellulaire épithéliale.
Il reste à confirmer que ces effets de la progestérone sont observés chez les femmes. Jusqu’ici aucune étude n’a encore examiné la relation entre la prise de progestérone et la sévérité de la grippe. « Des chercheurs du Johns Hopkins Center of Excellence qui conduisent une surveillance de la grippe à Baltimore et à Taipei ont ajouté au questionnaire des précisions sur la contraception hormonale et l’hormonothérapie de substitution. Nous pourrons peut-être répondre à ces questions chez les femmes », espère le Dr Klein. Et chez l’homme ? « La progestérone est un précurseur de la testostérone chez les hommes, et les hommes ont des récepteurs cellulaires pour la progestérone. Bien que nous n’ayons pas testé cela, en théorie la progestérone pourrait être aussi protectrice chez les hommes ».
PLOS Pathogens, 15 septembre 2016, Hall et coll.
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