EN2001, une enquête nationale avait permis de dresser un panorama de la pratique face aux pancréatites aiguës (PA) avant que ne soient mises au point les premières recommandations. Reprenant pour l’essentiel les mêmes items, un nouveau questionnaire sur la prise en charge des PA a été adressé à l’ensemble des services de gastro-entérologie français (Centres hospitaliers universitaires, Centres hospitaliers généraux et Centres privés) en mai 2008. L’objectif était d’évaluer les changements de pratiques, concernant notamment la mise en uvre des moyens diagnostiques et le traitement, et de corréler cette évolution avec les différentes séances de formation proposées sur ces recommandations. Au total, 176 questionnaires ont été retournés (CHU : 20 %, CHG : 62 % et Centres privés : 18 %).
Une belle maîtrise de l’évaluation de la gravité.
Le diagnostic positif de PA a été clairement défini par la conférence de consensus et repose sur la présence de douleur abdominale de type pancréatique et d’une lipasémie trois fois supérieure à la normale. Les praticiens dosent maintenant systématiquement la lipasémie. La valeur diagnostique de l’amylasémie est très faible et elle ne doit plus être demandée. Elle n’est plus prescrite que dans 45 % des cas (contre › 85 % en 2001). Pour aider au diagnostic et évaluer la gravité, il est important de réaliser une scanographie du pancréas (recherche de nécrose). Celle-ci doit impérativement être faite après les 48 premières heures d’évolution de la pancréatite, ce que 70 % des praticiens font désormais contre 25 % en 2001. En cas de PA grave, il faut répéter l’imagerie tous les 10 à 15 jours, attitude suivie dans 72 % des cas contre 58 % auparavant. « Le patient atteint d’une PA doit systématiquement être hospitalisé car l’évolution durant les 48 premières heures est imprévisible et nécessite une surveillance accrue, éventuellement en soins continus ou en réanimation selon les signes de gravité, ce qui est systématiquement le cas aujourd’hui. ».
L’appréciation de la gravité repose sur des éléments clinicobiologiques : défaillance d’organe, anomalies biologiques (insuffisance rénale, hyperkaliémie, acidose…) et sur des éléments spécifiques tels que le dosage de la protéine C réactive (CRP) désormais pratiqué dans 60 % des cas contre 39 % en 2001. La CRP est, en effet, un bon outil prédictif de gravité de la maladie et un taux supérieur à 150 mg/l à la 48e heure est de mauvais pronostic. Les index de sévérité spécifiques de la pancréatite, très utiles, sont également désormais davantage utilisés. Il s’agit de l’index de sévérité scanographique selon le score de Balthazar qui apprécie la présence de collections pancréatiques et la nécrose de la glande, et du score de Ranson.
En revanche, le Dr Rebours note que « des changements restent à faire dans le choix des examens à privilégier en cas de suspicion de PA biliaire pour confirmer l’origine biliaire lorsque l’échographie abdominale est normale ». Dans ce cas, le premier examen à privilégier est la cholangio-IRM, qui toutefois n’élimine pas la microlithiase. C’est pourquoi, en deuxième temps, l’écho-endoscopie doit être choisie. Actuellement, le scanner reste encore trop souvent l’examen prescrit en première intention pour la recherche de l’origine biliaire.
L’antibioprophylaxie, enfin en voie d’abandon.
Les formes nécrosantes de PA comportent un risque infectieux évalué entre 20 et 50 % et se grèvent d’une mortalité importante. La contamination de la nécrose se fait par translocation bactérienne à partir du réservoir colique, par continuité ou par voie sanguine. Le risque d’infection augmente progressivement jusqu’à la troisième semaine pour décroître ensuite. « Bien que le sujet soit encore débattu dans la littérature, l’antibiothérapie prophylactique ne diminuerait pas le risque de surinfection de nécrose et elle n’est pas recommandée en France. C’est l’une des notions les plus difficiles à faire admettre ! » Aujourd’hui, en cas de nécrose, l’antibiothérapie n’est plus administrée que dans 20 % des cas contre 57 % en 2001. En revanche, en cas de suspicion de surinfection de nécrose, fondée sur des arguments cliniques, tomodensitométriques et biologiques, il est recommandé de pratiquer une ponction percutanée des collections qui identifie le ou les germes et oriente le choix de l’antibiothérapie. « Ce qui est maintenant fait systématiquement » précise le Dr V. Rebours.
La nutrition entérale des formes sévères majoritairement respectée.
Dans les PA bénignes, l’alimentation normale peut être réintroduite entre le 2e et le 4e jour. En revanche, dans les PA sévères, le pancréas doit être mis au repos. Après avoir prôné de longues années le jeûne et l’alimentation parentérale, aujourd’hui, la réalimentation très précoce (à la 48e heure) par nutrition entérale répartie sur 24 heures est conseillée. Elle renforce la barrière intestinale et diminue le risque de translocation et donc de surinfection de nécrose. Plus de la moitié des gastro-entérologues pratique désormais la nutrition entérale alors qu’ils n’étaient qu’un quart à la préférer à la nutrition parentérale en 2001. En revanche, il reste encore à communiquer sur le site d’implantation de la sonde, gastrique plutôt que jéjunale, car la mise en place de la sonde naso-jéjunale est techniquement beaucoup plus lourde et ne stimule pas moins le pancréas. C’est le débit lent et continu de la nutrition qui permet l’inhibition des sécrétions.
Le Dr Rebours conclue : « globalement cette enquête a révélé l’importance des changements très positifs accomplis durant ces sept dernières années dans la prise en charge de la PA. Les formations menées jusqu’à présent pour diffuser les conclusions de la conférence de consensus doivent être continuées notamment celle qui a lieu lors des JFHOD et à laquelle 61 % des répondants de l’enquête avaient participé. »
D’après un entretien avec le Dr Vinciane Rebours - service de pancréato-gastro-entérologie, hôpital Beaujon, Clichy.
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