Flore intestinale du prématuré

Découverte de bactéries pathogènes muettes

Publié le 18/01/2011
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POUR LA PREMIÈRE fois une équipe de chercheurs a séquencé et reconstruit le génome de la majorité de la flore intestinale d’un prématuré. Ils ont pu en suivre l’évolution au fil des jours. Tout l’intérêt de cette découverte repose sur la place des bactéries intestinales dans certaines affections des prématurés, notamment l’entérocolite nécrosante. L’une des questions que se posait l’équipe de Jill Banfield (Berkeley) était de savoir si cette affection, notamment, est le fait d’une souche bactérienne pathogène ou plutôt d’un déséquilibre entre ces populations.

L’équipe a eu la chance de pouvoir suivre l’évolution d’une fillette prématurée née par césarienne. Ils ont identifié trois communautés distinctes d’agents microbiens présentes au cours du premier mois de vie du nourrisson. Ces populations ont évolué en fonction d’altérations liées aux traitements antibiotiques et à l’alimentation. L’intestin, stérile à la naissance, a été très rapidement colonisé par des bactéries, des virus, des phages et des plasmides. À l’arrêt des antibiotiques et après passage des perfusions à l’allaitement, l’équilibre a été totalement bouleversé. Certaines souches minoritaires devenant soudainement prééminentes, d’autres perdant leur suprématie.

Les analyses ont été menées sur des recueils de selles réalisés quotidiennement jusqu’au 21e jour. Mais les analyses génétiques complètes n’ont été réalisées que sur les échantillons des jours 10, 16, 18 et 21. Pour les autres jours, il s’agissait d’estimations fondées les ARN présents.

Au moins 20 groupes microbiens.

À leur grande surprise les chercheurs ont découvert au moins 20 groupes microbiens, qui incluaient aussi bien des micro-organismes bénins que pathogènes. Parmi ces derniers ils ont recensé des Staphylocoques, des Pseudomonas, des Serratia et des Citrobacter… pourtant l’enfant était en bonne santé. Ils ont aussi relevé une grande dynamique de cette population avec trois phases dans ces variations. La flore Gram négative, théoriquement pathogène, était en surabondance. La prédominance de Pseudomonas pendant plusieurs jours a été également surprenante.

Ces contradictions entre la présence d’agents pathogènes et la bonne santé apparente de l’enfant s’expliquent soit par le fait qu’il s’agissait de souches non-pathogènes, soit par une forme de prévention induite par les autres bactéries. À titre d’exemple Citrobacter, découvert dans 3 entérocolites nécrosantes sur 4, a fluctué au cours des examens des jours 16, 18 et 21, avec deux souches. Leur bénignité suggère que l’expression de leur génome devait être régulée différemment.

PNAS doi/10.1073/pnas.1010992108.

 Dr GUY BENZADON

Source : Le Quotidien du Médecin: 8887