La maladie stéatosique du foie change de nom. La nomenclature est l'une des actualités phares présentées à la neuvième édition du Paris Nash meeting qui a eu lieu les 7 et 8 septembre. Les termes de NAFLD (non alcoholic fatty liver disease) pour stéatopathie non alcoolique et de Nash (non alcoholic steatohepatitis) pour stéatohépatite non alcoolique sont désormais abandonnés depuis la conférence Delphi de 2023. Ce gros travail international, qui s'est déroulé en quatre étapes, a mis à contribution 264 participants de 56 pays, dont des sociétés savantes et un tiers d'associations de patients.
« Le terme de NAFLD utilisé depuis 2002 ne recouvrait pas la dysfonction métabolique et portait une stigmatisation liée à l'alcool, explique la Dr Raluca Pais, hépatologue à l'hôpital de la Pitié-Salpêtrière. La définition de MAFLD (pour metabolic associated fatty liver disease) en 2020 marquait un progrès mais ne recouvrait pas la stéatohépatite et n'était pas très claire sur la consommation d'alcool. Il fallait faire mieux ».
Quatre entités différentes de stéatose regroupées sous le sigle SLD (steatotic liver disease) sont définies. S'il existe une dysfonction métabolique (surpoids/obésité, insulinorésistance, diabète, dyslipidémie ou hypertension artérielle), on parle de MASLD (pour metabolic dysfunction associated steatotic liver disease) ou de MetALD, s'il y a une combinaison avec une consommation d'alcool modérée entre 30 et 60 g par semaine.
En l'absence de facteurs de risque métabolique, il s'agit d'une stéatose d'étiologie spécifique (alcool, médicaments, maladie de surcharge, maladies monogénétiques) ou cryptogénique. Quant à la Nash, elle devient Mash (metabolic associated steatohepatitis), qui peut se traduire par stéatohépatite métabolique.
« Cette nouvelle nomenclature présente l'avantage d'introduire deux nouvelles notions : celle de stéatose combinant facteurs de risque métaboliques et consommation modérée d'alcool, la MetALD, et celle de stéatose cryptogénique », explique le Pr Lawrence Serfaty, hépatologue à l’hôpital Hautepierre de Strasbourg et président du congrès.
Des enfants de moins de cinq ans aux États-Unis
Même si la dysfonction métabolique est une cause prépondérante, des sujets minces peuvent présenter une Mash. Dans cette population, les facteurs de risque sont l'âge jeune, le fait d'être une femme et l'origine asiatique.
« Le taux de fibrose est deux fois plus important, passant de 1,7 % à 3,6 % ; et s'ils développent une Mash, elle est de moins bon pronostic avec davantage d'événements hépatiques et plus de décès, même s'il n'y a pas plus d’événement cardiovasculaire », explique le Pr Serfaty. Les facteurs de risque restent mal connus, à hauteur de 70 %. « Il y a sans doute le microbiote, l'alimentation avec les régimes fast-food ou encore la génétique », avance le professeur.
La maladie peut même toucher les très jeunes, puisque des enfants de moins de 5 ans sont atteints aux États-Unis. « La prévalence était estimée à l'autopsie à moins de 1 % entre 1993 et 2009, rapporte le Pr Serfaty. Mais selon les différentes études, elle est de 8 à 17 % à l'imagerie (scanner, échographie) sur la période 2006-2020, voire de 31 % pour l'échographie seule et de 8 à 35 % avec les transaminases élevées ».
Quelles conséquences à terme ? La stéatose avant l'âge de cinq ans augmente le risque cardiovasculaire à l'âge adulte. Une étude de suivi à 10 ans chez des enfants finnois a montré que la stéatose à l'âge de 3-6 ans double le risque de diabète de type 2. « Les facteurs de risque observés de MASLD chez l'enfant sont l'obésité maternelle, les facteurs génétiques (indice de masse corporelle normal, histoire familiale, consanguinité) et l'exposition aux perturbateurs endocriniens », explique le Pr Serfaty.
Le resmétirom dans les starting-blocks
Où en est-on de la thérapeutique ? Pour l'instant dans la MASLD, la prise en charge repose sur les règles hygiéno-diététiques, à savoir la perte de poids, le rééquilibrage alimentaire et l'activité physique. Mais des gènes de prédisposition ont été découverts, « la majorité étant protecteurs quand ils ne sont pas exprimés », explique le Pr Serfaty. Des thérapies géniques avec des petits ARN interférents sont ainsi en développement.
Mais c'est du côté du resmétirom (Madrigal Pharmaceuticals) que la recherche est la plus avancée avec une autorisation de mise sur le marché (AMM) prévue en 2024. Cet agoniste de la voie bêta des récepteurs des hormones thyroïdiennes (THR-bêta), qui sont spécifiques du foie, n'a que des effets métaboliques (lipolyse, mitophagie, baisse de l'inflammation), sans entraîner de thyrotoxicose. Les preuves d'efficacité et de tolérance du resmétirom ont été apportées par l'étude Maestro-Nash, qui montre un taux de réponse de 25 à 30 % à la biopsie (fibrose).
Défaut de biomarqueurs
« Deux tiers des patients ne sont pas répondeurs au resmétiron, sans qu'il y ait de marqueurs pour savoir à qui donner la molécule, tempère le Pr Serfaty. La question principale à laquelle il va falloir répondre est de savoir si le médicament a un effet sur la survie, la survenue de cirrhose et les maladies cardiovasculaires. L'AMM délivrée ne sera d'ailleurs que temporaire, le temps que le laboratoire fournisse des résultats sur la mortalité ».
D'autres molécules sont à l'étude : des analogues de FGF21 (l'efruxifermin et la pégozafermin aux résultats positifs en phase 2b, la pegbelfermin s'étant révélée décevante) ; ou encore des agonistes des récepteurs GLP1, tels que le sémaglutide indiqué dans le diabète de type 2 et l'obésité. Des agonistes doubles, à la fois du GLP1 et du GIP, voire triples ciblant aussi le glucagon comme le rétatrutide, sont testés.
Les approches passent par un effet indirect métabolique via la perte de poids ou par un effet direct sur le foie via une action anti-fibrosante et anti-inflammatoire. « L'avenir sera sans doute à la combinaison des approches, simultanée ou séquentielle, pour un traitement à la carte, estime le Pr Serfaty. Mais, là encore, il nous faudra des marqueurs, qui pour l'instant nous font défaut ».
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