Moins d’un an s’est écoulé depuis la publication des recommandations de la HAS sur la place des anti viraux à action directe (AAD) dans le traitement de l’hépatite C, issues du rapport Dhumeaux. Ce texte a beau être récent, « 2014 peut déjà être considérée comme la préhistoire, tellement les choses évoluent vite », estime le Pr Victor De Lédinghen, du CHU de Bordeaux, venu présenter les nouvelles recommandations de l’association française pour l’étude du foie (AFEF) sur la prise en charge de l’hépatite C.
Pour les représentants de l’AFEF, il était important de produire des recommandations actualisées, d’intégrer les molécules arrivées sur le marché depuis un an et surtout d’élargir les indications des AAD. « En 2014, 14 000 patients ont été traités, explique le Pr Olivier Chazouillère, de l’hôpital Saint Antoine et président de l’AFEF, nous devrions en traiter à peu près autant en 2015, ce qui signifie que nous aurons rapidement traité les patients aux stades de fibrose et de cirrhose avancés. Il faut maintenant songer à s’attaquer à d’autres groupes de patient. »
Élargir aux populations à risque
Dans le collimateur des experts de l’AFEF : les réservoirs du virus et les patients fragiles ou à haut risque de transmettre le VHC. Ils préconisent donc de traiter, quel que soit leur stade de fibrose, les consommateurs de drogue, les homosexuels masculins avec pratiques sexuelles à risque, les femmes ayant un projet parental, les professionnels de santé, les hémodialysés, et les patients incarcérés.
Les recommandations préconisent également de traiter tous les patients infectés par un VHC de génotype 3, soit 15 à 20 % des patients français. « Les patients atteints par un virus de génotype 3 évoluent plus rapidement vers une cirrhose, et une fois que cette dernière est déclarée, ils sont difficiles à soigner, même avec les nouveaux traitements », précise le Pr Patrick Hillon, du service hépatogastroentérologie du CHU de Dijon. Enfin, les recommandations de l’AFEF rejoignent celles de la HAS concernant le traitement des malades infectés concomitamment par le VIH et le VHC. Un autre point sur lequel insistent les recommandations est la mise en place, et donc le financement, d’une éducation thérapeutique.
Ces nouvelles recommandations vont être soumises à la HAS. Les membres de l’AFEF avait tenté de participer à la rédaction des précédentes recommandations mais la Haute Autorité avait rejeté l’offre évoquant les conflits d’intéret des auteurs des recommandations de l’AFEF.
Adapter les prix au nombre de patients à traiter
Le problème du côut des AAD reste posé. À l’heure actuelle, un traitement complet coûte environ 50 000 euros. « Les sociétés savantes comme l’AFEF n’interviennent pas dans la régulation des prix, rappelle le Pr De Lédinghen, notre message en direction du ministère et des laboratoires est le suivant : nous pouvons traiter 15 000 malades par an, poursuivez les efforts pour diminuer les prix, et faites en sorte qu’ils soient adaptés à ces 15 000 patients. »
Pour diminuer les prix, une solution avancée par certains laboratoires, Gilead en tête, et de réduire les durées de traitement à 8 semaines au lieu de 12 pour les patients pour lesquelles cela est possible. « Nous n’avons que très peu d’essais qui évaluent l’efficacité d’un traitement de 8 semaines, explique le Pr De Lédinghen, on sait également que les inhibiteurs de la NS5A (comme le lédipasvir), font apparaître des virus mutés qui résistent aux traitements. Ces virus résistants disparaissent si le traitement est suffisamment long mais persistent s’il est trop court. »
Selon les calculs de l’AFEF, il faudrait environ 4 ans pour traiter l’intégralité des patients dont l’infection par le VHC est connue. « Cela nous laisse le temps d’organiser de grandes campagnes de dépistage, pour faire du "test and treat", comme pour le VIH », poursuit le Pr De Lédinghen. S’il n’y a pas de chiffre précis en la matière, on estime qu’environ la moitié des patients français infectés par le VHC ignorent leur statut sérologique.
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