Protozoaire
La giardiose (anciennement appelée giardiase) est l’infestation par un protozoaire flagellé, Giardia intestinalis ou Lamblia intestinalis, ou encore Giardia lamblia. Ce parasite a été découvert par Van Loeuwenhock, drapier hollandais inventeur d’un instrument (ancêtre du microscope) pour examiner les tissus en 1861 et qui eut la curiosité d’examiner ses propres selles ; il y découvrit des éléments vivants se déplaçant avec des flagelles. Plus tard ces éléments furent décrits par Lambl en 1859 qui leur donna le nom de Giardia.
Un flagellé intestinal
Ce parasite a une répartition géographique cosmopolite, avec un pic de fréquence plus élevé en zone tropicale déshéritée où l’hygiène est trop souvent défectueuse. Tous les âges peuvent être infestés, depuis les premiers mois de vie jusqu’à plus de 70 ans. L’infestation est plus fréquente en zone rurale qu’en zone urbaine, et particulièrement dans les milieux défavorisés (1). L’homme s’infeste par ingestion de kyste de Giardia duodenalis avec l’eau de boisson ou les aliments. Dans l’estomac, les kystes de parasites sont attaqués par les sucs gastriques et se divisent en 2 formes végétatives, qui vont se coller à la surface des cellules intestinales et se multiplient par scissiparité (2).
Une douleur pseudo-ulcéreuse
L’intensité des troubles dépend du nombre de kystes ingérés par le patient : troubles légers (en cas d’infestation par 10 à 20 kystes) ou symptômes intenses (s’il y a plus de 100 kystes ingérés).
Les symptômes cliniques, d’apparition brutale ou progressive, évoquent surtout un ulcère d’estomac : épigastralgies plus ou moins rythmées par les repas, nausées, flatulences, anorexie, ballonnement abdominal.
En cas d’infestation importante, le patient se plaint de douleurs abdominales intenses avec des diarrhées abondantes, jaunâtres et graisseuses pouvant évoquer une pancréatite. Il n’y a pas de fièvre.
Chez l’enfant, les Giardia peuvent tapisser certaines villosités intestinales et empêcher l’absorption des aliments, responsables d’une malnutrition entraînant un retard de croissance (3). Ces formes sévères seraient plus fréquentes chez les garçons, surtout ceux déficitaires en IgA.
Examen parasitologique des selles
Le diagnostic est facilement établi par l’examen parasitologique des selles, qui met en évidence les parasites :
- formes végétatives de 18 à 20 microns, en forme de cerf-volant (de face) et de cuillère (de profil), contenant deux noyaux et 8 flagellés.
- kystes (12 à 15 microns) ovoïdes, avec une paroi épaisse et contenant 4 noyaux.
Il existe des tests de diagnostic rapide de recherche des antigènes de Giardia dans les selles par bandelette, mais ces tests ne sont pas encore de pratique courante.
En raison de périodes négatives (absence de kystes dans les selles) durant 7 à 10 jours, les examens de selles doivent être répétés au moins trois fois, des jours différents.
Si les examens de selles sont négatifs, les parasites peuvent être retrouvés dans le liquide de tubage duodénal (figure). La biopsie duodénale réalisée lors de la fibroscopie permet de retrouver les parasites et l’atrophie des villosités intestinales avec infiltration inflammatoire de l’épithélium et de la sous-muqueuse (4).
Dans cette parasitose, l’hémogramme est normal et le sérodiagnostic est inutile.
Un traitement minute
Le traitement est basé sur la prise de dérivés azolés : métronidazole (Flagyl) 1 g par jour pendant sept jours (ou 10 mg/kg chez l’enfant) (5) ou mieux tinidazole (Fasigyne) 1 g en cure unique (ou 70 mg/kg chez l’enfant).
En cas d’échec, l’albendazole (Zentel) est prescrit à raison de 400 mg/j pendant cinq jours. Certains patients éliminant toujours des Giardia malgré le traitement, ont été guéris par une cholécystectomie, la vésicule biliaire faisant office de « réservoir ».
La prophylaxie est basée sur l’hygiène des mains et de l’alimentation, surtout dans les collectivités comme les crèches ou les jardins d’enfants. En pays tropical, il faut veiller, par une éducation sanitaire continue, à émettre ses selles dans des latrines, séparées des habitations et dans un emplacement non inondable.
Références
(1) Dib HH, Lu SQ, Wen SF. Prevalence of Giardia lamblia with or without diarrhea in South East, South East Asia and the Far East. Parasitol Res. 2008; 103(2):239-51.
(2). de Souza W, Lanfredi-Rangel A, Campanati L. Contribution of microscopy to a better knowledge of the biology of Giardia lamblia. Microsc Microanal. 2004;10(5):513-27.
(3). Ali SA, Hill DR. Giardia intestinalis. Curr Opin Infect Dis. 2003 ;16(5):453-60. (4). Müller N, von Allmen N. Recent insights into the mucosal reactions associated with Giardia lamblia infections. Int J Parasitol. 2005;35(13):1339-47.
(5). Escobedo AA, Cimerman S. Giardiasis: a pharmacotherapy review.
Expert Opin Pharmacother. 2007 ;8(12):1885-902.
Figure 1. Villosité intestinale recouverte de formes végétatives de Giardia
Figure 2. Formes végétatives de Giardia, dans le tubage duodénal
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