L'impact de l'environnement sur la survenue de Maladies inflammatoires chroniques de l'Intestin (MICI) est attesté par l'évolution de l'incidence de la rectocolite hémorragique (RCH) ou de la maladie de Crohn, avec notamment une très nette augmentation au cours du XXe siècle.
Les disparités géographiques aussi plaident en faveur des effets de l'environnement, le nombre de cas incidents étant plus élevé en Amérique du Nord ou en Europe de l'Ouest. « Par ailleurs, l'on assiste ces dernières années, à une émergence des MICI en Inde, Chine et Corée, ainsi que dans l'Europe de l'Est », observe le Pr Carbonnel. À noter, quand un pays accède aux MICI, il y entre par les RCH, et dans un second temps, la maladie de Crohn. Cette évolution dans le temps et l'espace est corroborée par les études conduites chez les migrants, bengalis par exemple en Angleterre : ils acquièrent en une génération le même risque de survenue d'une MICI que celui du pays d'accueil.
Pour expliquer l'incidence plus élevée des maladies auto-immunes dans les pays développés, plusieurs théories ont été avancées. Celle, aussi ancienne que l'identification de la maladie de Crohn (un siècle), d'agents infectieux spécifiques, mycobactéries ou Yersinia. Ou l'hypothèse hygiéniste qui a cours pour l'allergie et autres maladies dysimmunitaires. Les facteurs de risque également ont été particulièrement scrutés : le risque est effectivement augmenté pour certaines catégories de personnes. Ainsi, le tabagisme accroît le risque de maladie de Crohn, mais diminue celui de RCH. L'appendicite réduit celui de RCH. La prise d'antibiotiques dans l'enfance augmente probablement le risque de maladie de Crohn. Il existe des corrélations « écologiques », notamment entre l'incidence de la maladie de Crohn et le faible niveau d'ensoleillement, avec un gradient Nord/Sud en Europe et en Amérique du Nord. Le rôle de la vitamine D n'est cependant pas précisé.
Des études prospectives
La part de l'alimentation dans l'apparition d'une MICI est difficile à définir précisément même si la plupart des patients souffrant de Crohn sont persuadés de son implication. Quel élément de l'alimentation exactement poserait-il problème ? Les nutriments, macro ou micro ? Le profil alimentaire ? Les additifs ? Les polluants ? Le mode de cuisson ? Le mode de conservation ? etc. Les questions sont multiples et, biais supplémentaire, les patients, intuitivement, modifient leur alimentation, en mangeant moins de fibres par exemple pour réduire le risque de diarrhée. Quelques réponses sont apportées par les études prospectives menées sur de grandes populations (l'incidence des MICI étant faible) de personnes saines. « Une corrélation a été mise en évidence entre consommation de protéines animales et MICI ; une association positive entre RCH et contenu alimentaire en acide linoléique ; une association négative avec les oméga 3 (l'incidence étant alors diminuée) ; enfin, une association positive avec la consommation d'acides gras trans », rapporte le Pr Carbonnel. Par ailleurs, une corrélation a été trouvée entre le profil alimentaire « sodas et sucreries » et la maladie de Crohn. Les fibres sont protectrices, et les laitages innocentés. Le régime sans gluten est inutile (excepté en cas de maladie cœliaque associée). « L'expression d'une MICI tiendrait aux modifications du microbiote induites par l'alimentation, qui, on le sait aujourd'hui, influe massivement sur sa composition, souligne le spécialiste, une hypothèse soutenue par les données épidémiologiques, comme l'émergence des MICI en Chine notamment où l'on a renoncé au mode d'alimentation traditionnel. »
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