LES NEUROPATHIES amyloïdes familiales (NAF) sont les plus graves des neuropathies héréditaires de l’adulte. Elles sont secondaires à des dépôts d’amylose dans l’endonèvre et à une mutation du gène de la transthyrétine (TTR) et de transmission autosomique dominante. Elles sont sensitivo-motrices et végétatives, très évolutives et invalidantes. Elles ont été décrites initialement au nord du Portugal (1).
Le patient type est âgé de 30 ans, d’origine portugaise. Il se plaint de douleurs ou d’une perte de sensibilité des pieds, de troubles digestifs ou d’un amaigrissement. L’examen clinique met en évidence une polynévrite sensitive des petites fibres qui affecte la température et la douleur. Les antécédents familiaux sont très fréquents. Les NAF s’accompagnent d’une atteinte cardiaque constante, marquée par des troubles de la conduction à l’électrocardiogramme.
Le diagnostic est affirmé par le test génétique de la TTR et la mise en évidence de dépôts de substance amyloïde après biopsie nerveuse ou de glande salivaire accessoire.
Mais les NAF se révèlent très hétérogènes et de diagnostic très difficile : l’âge de début est tardif dans trois quarts des cas (› 50 ans) jusqu’à 89 ans, les antécédents familiaux manquent dans 50 % des cas, plus de 30 mutations du gène de la TTR ont été décrites (2).
La neuropathie amyloïde est responsable d’un handicap croissant. Elle est mortelle dans un délai moyen de 7,3 ans pour les formes à début tardif (3) et de 10,8 ans pour les formes à début précoce.
Une survie doublée pour les sujets jeunes avec mutation Met 30.
Le foie est la principale source de TTR, les autres étant la rétine et les plexus choroïdes. La transplantation hépatique (TH) a été proposée pour supprimer la synthèse hépatique de variant TTR muté amyloïdogène. L’objectif de l’intervention est de réduire la production de dépôts tissulaires d’amylose, la progression de la maladie et les handicaps induits. La TH permet ainsi de réduire de 98 % la concentration de variant TTR Met 30 dans le sérum de façon durable (4). Plus de 2 000 TH ont été réalisées dans le monde.
L’effet de la TH sur la survie dépend de plusieurs facteurs. « Dans notre expérience qui porte sur plus de 200 patients, l’âge tardif, une mutation non Met 30, une dysautonomie sévère et, pour d’autre séries (5), une maladie ancienne et un indice IMCm* ‹ 600 sont de mauvais pronostic », souligne le Pr David Adams. La TH permet de doubler la médiane de survie pour les sujets jeunes (moins de 50 ans) avec mutation TTR Met 30.
La TH permet aussi de stopper la progression de la neuropathie périphérique dans 62 % à 84 % des cas. Le bénéfice est net en cas de stade débutant sensitif et de forme précoce. En revanche, les troubles sensitivomoteurs et les manifestations végétatives ne régressent pas. Une aggravation cardiaque est possible au décours de la TH, ce uiq justifie une surveillance régulière à vie. L’aggravation de la maladie après TH peut s’expliquer par l’accumulation de dépôts tissulaires de TTR sauvage.
Le traitement de fond des NAF doit être discuté en centre de référence après un bilan cardiologique exhaustif spécifique, réalisé dans un service de cardiologie spécialisé pour les NAF. Il peut s’agir ainsi de la transplantation hépatique en l’absence de contre-indication, d’une double transplantation hépatique et cardiaque en cas de cardiomyopathie évoluée, du tafamidis (Vyndaqel®), stabilisateur de TTR qui a obtenu l’AMM pour ralentir l’évolution des NAF de stade 1 (marche sans aide), ou d’un autre protocole thérapeutique.
D’après un entretien avec le Pr David Adams, service de neurologie, centre de référence des maladies rares « Neuropathies amyloïdes familiales et autres neuropathies périphériques rares », http;//nnerf.fr ; CHU Bicêtre, Le Kremlin-Bicêtre, université Paris Sud, INSERM U788.
Liens d’intérêt : participation en temps qu’orateur à un symposium pour Pfizer, investigateur principal pour Alnylam, consultant pour Isis.
** L’IMCm est le produit de l’indice de masse corporelle par la concentration sérique d’albumine.
(1) Adams D. J Neurol 2001;248:647-57.
(2) Adams D et coll. Amyloid 2012; 19 (S1):61-64.
(3) Koike H et coll. J Neurol Neurosurg Psychiatry 2012;83(2):152-8.
(4) Adams D et coll. The course and prognostic factors of familial amyloid polyneuropathy after liver transplantation. Brain 2000;123(Pt 7):1495-504.
(5)Yamamoto S et coll. Am J Transplant. 2007 Nov;7(11):2597-604.
Dr Patrick Gasser (Avenir Spé) : « Mon but n’est pas de m’opposer à mes collègues médecins généralistes »
Congrès de la SNFMI 2024 : la médecine interne à la loupe
La nouvelle convention médicale publiée au Journal officiel, le G à 30 euros le 22 décembre 2024
La myologie, vers une nouvelle spécialité transversale ?