DANS LE CADRE du programme triennal 2006-2008 d’inspection sanitaire des établissements pénitentiaires, des missions d’inspection effectuées dans des unités de consultations et de soins ambulatoires (UCSA) ont mis en évidence des écarts par rapport aux bonnes pratiques d’hygiène en chirurgie dentaire. Ces manquements concernant les procédures de stérilisation de certains dispositifs médicaux utilisés en chirurgie dentaire, essentiellement les porte-instruments rotatifs, étaient potentiellement de nature à exposer les patients à un risque de transmission croisée de virus hématogènes. La présence d’ARN du VIH ou du VHC et d’ADN du VHB sur les PIR a déjà été retrouvée dans des conditions expérimentales ou après des soins à des patients porteurs de ces virus.
Un praticien sur cinq.
Le premier épisode prouvé de transmission de patient à patient lors d’avulsions dentaires sous anesthésie générale a été décrit en 2007 aux États-Unis et concernait le VHB mais aucun écart aux bonnes pratiques n’a pu être démontré. En France, l’exploration d’une séroconversion virale possiblement associée aux soins a conduit à des investigations, toujours en cours, dans un cabinet dentaire de ville où le non respect des procédures d’hygiène a aussi été constaté. Des enquêtes réalisées en Aquitaine en 2004 et en Franche-Comté en 2007 avaient par ailleurs montré que moins d’un praticien sur 5 déclarait stériliser les instruments rotatifs après chaque usage tandis qu’une enquête nationale confirmait en 2007 que 38 % des chirurgiens déclaraient désinfecter et non pas stériliser leurs instruments.
De telles observations ont conduit le ministère de la Santé à saisir l’Institut de veille sanitaire (InVS) en juillet 2008 afin de procéder à une analyse du risque de transmission de ces virus hématogènes lors des soins dentaires dans les UCSA et en cabinets de ville. Il est apparu que 38 % (soit 1 197) des séances chez le dentiste nécessitent l’emploi de PIR et sont accompagnées de saignement. En UCSA, la proportion est de 48 % (9 321).
L’évaluation montre « que le risque individuel de contracter une infection à virus hématogène liée aux soins dentaires est très faible » mais qu’en revanche , « l’estimation du nombre total de contaminations virales attendues chaque année, notamment pour le VHB, n’est pas négligeable, compte tenu du nombre de très important de séances réalisées chaque année en France ».
En population générale, le risque individuel moyen d’avoir contracté une infection suite à des soins dentaires lorsque les porte-instruments n’ont pas été stérilisés entre chaque patient est évalué à 1/420 millions pour le VIH, et à 1/516 000 pour le VHB. Le risque est huit fois plus élevé en population carcérale. Selon les experts, « cette absence de stérilisation des PIR entre chaque patient, non conforme aux recommandations nationales, pourrait être à l’origine chaque année en population générale de moins de 1 contamination par le VIH, de moins de 2 contaminations par le VHC, et de près de 200 contaminations par le VHB ».
Les résultats « doivent être interprétés avec prudence », soulignent-ils, d’une part parce que les praticiens déclarent le plus souvent procéder à une désinfection des PIR à l’efficacité variable et dont l’effet n’a pas été pris en compte dans l’analyse et parce que, d’autre part, du fait de la proportion importante d’enfants soignés, la prévalence du portage du virus parmi les personnes bénéficiant de soins dentaires est sans doute moindre que celle retenue dans l’étude.
Néanmoins, l’évaluation souligne l’importance du strict respect des précautions standard (les PIR sont considérés comme du matériel semi-critique) et des bonnes pratiques de stérilisation en odontostomatologie ainsi que le renforcement de la formation à l’hygiène des professionnels de la chirurgie dentaire.
Les experts précisent que la preuve d’une transmission croisée liée aux soins est difficile à établir. La découverte d'une infection chez une personne ayant subi des soins dentaires ne permet en rien d'affirmer, à elle seule, qu'elle est liée aux soins réalisés.
Dr Patrick Gasser (Avenir Spé) : « Mon but n’est pas de m’opposer à mes collègues médecins généralistes »
Congrès de la SNFMI 2024 : la médecine interne à la loupe
La nouvelle convention médicale publiée au Journal officiel, le G à 30 euros le 22 décembre 2024
La myologie, vers une nouvelle spécialité transversale ?