LES MALADIES INFLAMMATOIRES chroniques de l’intestin (MICI) de l’enfant et de l’adolescent, maladie de Crohn et rectocolite hémorragique (RCH), sont apparues après la première guerre mondiale, avec une incidence de plus en plus élevée, surtout depuis les années 1950. Malgré un plateau dans les années 1990, elles sont toujours en progression régulière, en France comme en Europe. Tous types de MICI confondus, elles concernent environ 10 pour 100 000 habitants. En outre, une nette augmentation des cas pédiatriques a été constatée durant ces dernières années. La maladie de Crohn touche tous les enfants quel que soit leur âge, mais plus particulièrement les préadolescents et adolescents. En effet, sa symptomatologie étant peu spécifique au début de la maladie (douleurs abdominales, diarrhée), elle peut passer longtemps inaperçue.
Environnement et génétique.
Une recherche active de l’origine de cette pathologie a été mise en place et s’oriente vers les particularités de nos modes de vie dans les pays industrialisés. Il est un fait que notre mode d’alimentation a changé, comportant désormais une consommation accrue de sucres et de graisses. Ces facteurs environnementaux auraient éventuellement une influence sur la composition de la microflore de l’intestin. Ainsi, des modifications touchant les différents types de bactéries vivant dans l’intestin ont été documentées (avec les techniques modernes d’analyse microbiologique, on sait qu’il y a à peu près mille types de bactéries différentes). Une hypothèse récente repose sur une diminution probable du nombre de bactéries « anti-inflammatoires », provoquant une rupture de l’équilibre existant dans la flore intestinale entre les bactéries pro-inflammatoires et les bactéries anti-inflammatoires. Quelques données renforcent cette hypothèse, cependant, il n’y a pas à ce jour de preuves scientifiques. Par ailleurs, le rôle du tabac comme facteur aggravant de la maladie de Crohn est maintenant bien établi et étudié.
Les répercussions de notre mode de vie sur la microflore de l’intestin aboutissent au développement de la maladie chez des individus qui sont génétiquement plus vulnérables. Il existe une centaine de facteurs génétiques dits de « susceptibilité » ou de « vulnérabilité » qui conduisent potentiellement à une augmentation d’une réponse inflammatoire en réponse à des modifications induites par l’environnement. À ce jour, il n’existe toutefois aucun test génétique pouvant aider à orienter le diagnostic devant un tableau clinique évocateur.
Une prise en charge en centre spécialisé.
En matière de prise en charge, il est essentiel de regrouper les jeunes patients en centres spécialisés ayant l’expérience de cette maladie, car les enjeux sont énormes en termes de croissance et de développement pubertaire. Au moment du diagnostic, il est notamment fréquent, que les patients soient dénutris et présentent un retard de croissance. Le traitement d’attaque consiste en une nutrition entérale exclusive par un lait spécifique (Modulen IBD ou Elemental 028 par exemple), pendant deux à trois mois. C’est le traitement de premier choix en pédiatrie pour une poussée de maladie de Crohn. Aussi efficace qu’une corticothérapie, sans ses effets d’aggravation du retard statural, il permet de contrôler et de diminuer l’inflammation de l’intestin grêle et du côlon. Au traitement nutritionnel, très efficace à la phase aiguë, succède un traitement d’entretien reposant sur les immunosuppresseurs, destiné à stabiliser la maladie. La majorité des patients présentant d’emblée une forme sévère, les immunosuppresseurs sont utilisés en première intention. Ils sont poursuivis pendant plusieurs mois, voire plusieurs années, ce qui nécessite un suivi régulier (tous les trois mois) en centre spécialisé afin d’ajuster le traitement. Rappelons que la stratégie thérapeutique de la maladie de Crohn comporte, d’une part, une approche anti-inflammatoire par des immunosuppresseurs très puissants comme le méthotrexate, l’azathioprine et des médicaments plus fins dans la régulation des réponses immunitaires, et, d’autre part, un traitement biologique comme les anticorps anti-TNF alpha. Particulièrement efficace chez l’enfant, cette dernière approche est utilisée de plus en plus souvent pour des patients qui ne sont pas stables sous traitement immunosuppresseur. La réponse en pédiatrie est excellente, c’est ce qu’ont montré plusieurs études menées en France.
D’après un entretien avec le Pr Frank Ruemmele, CHU Necker-Enfants Malades et Université Paris-Descartes, Paris.
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