De notre correspondante
L’ACHALASIE, décrite pour la première fois il y a plus de 300 ans, est un trouble moteur rare de l’œsophage caractérisé par une perte du péristaltisme et un défaut de relaxation du sphincter inférieur. Elle est révélée par une dysphagie, portant d’abord sur les solides puis sur les liquides. De nombreux patients ont également des régurgitations, une gène thoracique, un amaigrissement.
L’étiologie demeure mystérieuse. Il n’y a donc ni traitement curatif, ni prévention, seulement un traitement palliatif. On sait maintenant que les anomalies motrices sont dues à une perte des neurones inhibiteurs du plexus myentérique, qui résulte non pas d’un programme apoptotique ou dégénératif, mais d’une attaque inflammatoire directe des cellules T CD8 +. Quel est le facteur déclenchant ce processus inflammatoire ?
Plusieurs hypothèses ont été émises. L’achalasie pourrait être une maladie auto-immune, car certaines études, à l’exception de la plus récente, ont trouvé des anticorps. Elle pourrait aussi être déclenchée par une infection, mais les études n’ont porté que sur un petit nombre de virus et n’ont pas apporté de preuve. Ces deux hypothèses ne sont pas forcément incompatibles. Par exemple, une infection virale pourrait déclencher une achalasie auto-immune, si un antigène viral partageait des épitopes avec un antigène de l’hôte exprimé dans le système nerveux myentérique.
Le perroquet et d’autres oiseaux exotiques.
Une maladie remarquable, similaire en de nombreux points à l’achalasie humaine, a émergé chez les perroquets et d’autres oiseaux exotiques. C’est la proventriculite (ou PPD pour, en anglais, proventricular dilatation disease), un trouble de la motricité du tube digestif. Cette maladie, décrite initialement aux États-Unis en 1977, est retrouvée sur quatre continents. Elle représente aujourd’hui la principale menace pour l’aviculture des psittacidés.
Comme chez l’homme, les oiseaux atteints de PDD ont une perte du péristaltisme du tube digestif, conduisant à sa dilatation progressive et à la rétention d’aliments non digérés. De plus, et c’est peut-être l’aspect le plus important, leur système nerveux myentérique est infiltré par les lymphocytes. À la différence de l’achalasie humaine, les oiseaux déclarent, en plus, des anomalies neurologiques qui reflètent également une atteinte du système nerveux central.
L’origine infectieuse de la PDD est soupçonnée depuis longtemps, étant donné sa tendance à survenir par foyers épidémiques. Mais, l’origine virale n’a été établie que tout récemment. En 2008, Don Ganem et coll. ont identifié un virus inconnu, en utilisant une puce à ADN portant les séquences hautement conservées de tous les virus connus. L’ARN extrait du tissu PDD montrait une hybridation à des séquences d’un borna virus connu pour être responsable d’une encéphalite chez les chevaux et d’autres mammifères.
Le borna virus aviaire.
Le virus identifié dans la PDD est distinct, et a été appelé borna virus aviaire (ABV). Depuis, le virus ABV a pu être cultivé in vitro et, tout récemment, son inoculation à des oiseaux a pu provoquer une PDD, établissant définitivement son rôle causal.
Quelles sont donc les implications pour l’achalasie humaine ? « Au minimum, ces découvertes indiquent que les virus peuvent déclencher une pathologie de type achalasie » estiment Don Ganem et coll. On dispose maintenant d’un premier modèle animal naturel de la dénervation myentérique inflammatoire du tube digestif, ajoutent-ils. Un modèle qui pourrait permettre d’étudier comment les virus peuvent déclencher une attaque inflammatoire sur le plexus myentérique.
Enfin, soulignent-ils, ceci devrait raviver la recherche d’agents infectieux potentiels dans l’achalasie humaine, en utilisant les nouvelles approches génomiques. De telles études sont d’ores et déjà en cours.
Ganem et coll., Science Translational Medicine, 26 mai 2010.
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