L'ARCHITECTURE GÉNÉTIQUE sous-tendant la susceptibilité à la SEP est complexe. Le facteur de risque génétique majeur chez les Européens du nord est l'haplotype HLA-DR15 ; des allèles de susceptibilité HLA de classe I et II ont été identifiés.
La récente étude d'un consortium international (IMSGC) a révélé de multiples loci de susceptibilité non HLA ayant chacun un effet modeste. Trois loci de susceptibilité ont été clairement établis : CLEC16A, IL2RA et IL7R.
Afin d'identifier d'autres loci de susceptibilité, un consortium australien et néo-zélandais (ANZgene) dirigé par le Dr Justin Paul Rubio (The Howard Florey Institute, Université de Melbourne, Australie) a conduit une étude génomique d'association de cas-témoins d'origine européenne, portant sur 1 618 patients-cas australiens ou néo-zélandais atteints de SEP et 3 413 témoins anglais ou américains.
Puis a été conduite une étude de réplication dans un groupe indépendant de 2 256 cas et 2 310 témoins australiens ou néo-zélandais.
Les chercheurs, qui ont confirmé plusieurs associations connues avec la SEP (HLA-DR15, CD58, EV15-RPL5, CLEC16A, IL2RA, IL7R, et TYK2.) ont aussi identifié deux nouveaux loci de susceptibilité, l'un sur le chromosome 12 (12q13-14) ; l'autre en aval de CD40 sur le chromosome 20 (20q13), deux régions déjà associées à d'autres maladies auto-immunes.
Sur le chromosome 12 (12q13-14), le meilleur candidat lest le gène CYP27B1 qui encode la 25-hydroxy-vitamine D-1 alpha hydroxylase, une enzyme clé du métabolisme de la vitamine D. En effet, des données épidémiologiques suggèrent un lien entre le déficit en vitamine D et un risque accru de SEP et d'autres maladies auto-immunes. Autre candidat, le gène CDK4 qui favorise l'autoréactivité. Si le rôle causal du gène CYP27B1 était confirmé, ceci encouragerait de plus grandes études cliniques pour déterminer les bénéfices de la supplémentation en vitamine D ou des agonistes VDR pour la prévention et le traitement de la SEP.
Une autre équipe dirigée par le Dr Philip De Jager (Boston), a conduit une méta-analyse, réunissant les données de 3 études génomiques d'association portant en tout sur 2 624 patients avec SEP et 7 220 témoins (895 cas de la série initiale IMSGC ; 969 cas du consortium GeneMSA et 860 cas d'une série non publiée de patients recrutés dans un centre de Boston).
L’équipe a ensuite conduit une étude de réplication dans une série indépendante de 2 215 cas de SEP et 2 116 témoins anglais et américains. Trois nouveaux loci de susceptibilité ont été identifiés et validés : TNFRSF1A (chromosome 12) ; IRF8 (chr 16) et CD6 (chr 11).
TNFRSF1A héberge 2 allèles de susceptibilité indépendants : un variant commun d'effet modeste (rs1800693 ; OR = 1,2), et un variant peu fréquent mais d'effet plus fort (rs4149584 ; OR = 1,6). Outre ces données génétiques, des données cliniques suggèrent qu'une dysrégulation de la voie du TNF-alpha (diminution d'activité du TNF-alpha) pourrait jouer un rôle dans la survenue de la SEP.
L'allèle de susceptibilité situé près du gène IRF8, qui encode un facteur de transcription participant au signal de l'interféron type 1, est associé à une plus grande expression des gènes de la voie de réponse interféron chez les patients atteints de SEP.
« Nous avons découvert 3 nouveaux gènes qui contribuent à la susceptibilité à la sclérose en plaques », explique au « Quotidien » le Dr Philip de Jager. « Ces nouveaux allèles à risque pour la SEP sont trouvés à une fréquence élevée dans la population générale et ont un effet modeste sur la susceptibilité à la maladie. »
« Toutefois, pour la première fois, nous montrons que l'un des trois nouveaux loci génétiques (TNFRSF1A) héberge non seulement un variant commun d'effet modeste, mais aussi un variant moins fréquent (fréquence de 2 %, observé seulement chez les personnes d'origine européenne) ayant une forte influence sur le risque de la maladie. Ce dernier illustre une nouvelle catégorie d'allèles à risque, et suggère qu'il nous faut dorénavant cibler ces variants à travers le génome puisqu'ils ne sont pas bien captures par les plateformes génomiques de génotypage actuelles. »
Deux classes de patients.
Dans le locus IRF8 (l'un des 3 loci), l'allèle de susceptibilité a un large effet sur l'expression génique, exagérant la réponse transcriptionnelle aux interférons de type 1 (il est à noter que l'interféron bêta est la première ligne de traitement dans la SEP).
La signature de réponse aux interférons, observée dans d'autres maladies auto-immunes, laisse penser qu'il pourrait y avoir deux classes de patients atteints de SEP.
Jusqu'ici, les allèles de susceptibilité découverts a ce jour pointent largement vers une dysrégulation immunologique en cause dans la survenue ou le déclenchement de la SEP. La neurodégénérescence pourrait être secondaire.
Plusieurs objectifs.
« Les implications cliniques sont limitées pour l'instant, fait entrevoir le Dr Jager. Ce travail oriente vers une perturbation précoce de l'immunité innée (TNFRSF1A and IRF8) dans la SEP, et éclaire le rôle de voies connues dans la survenue de la SEP. Cela aidera à focaliser la recherche thérapeutique dans ces domaines. Par ailleurs, le fait d’avoir identifié un grand nombre de variants génétiques signifie que l'on peut commencer à construire des modèles diagnostiques et évaluer leur efficacité. »
« Nous avons plusieurs objectifs. Poursuivre nos études génomiques afin de découvrir l'ensemble complet des gènes liés à une susceptibilité à la SEP. La méthode de recherche est efficace ; par conséquent il nous faut simplement plus de sujets. Deuxièmement, utiliser l'information génétique pour développer un diagnostic et éventuellement des modèles pronostiques pour la SEP, en combinaison avec d'autres facteurs de risque tels que des facteurs environnementaux. Enfin, explorer les conséquences fonctionnelles de ces variants sur la fonction immune humaine. »
Nature Genetics, 14 juin 2009, De Jager et coll., ANZgene -Rubio et coll., DOI: 10.1038/ng.401 DOI: 10.1038/ng.396
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