LA NOUVELLE a fait peu de bruit. Pourtant, ils l’ont vraiment fait. En janvier dernier, des chercheurs d'une société de biotechnologie californienne (Stemagen, La Jolla) sont parvenus à obtenir des embryons humains grâce à la technique de clonage qui avait donné naissance à la brebis Dolly. En d'autres termes, on a cloné des hommes !
Cette grande première peut paraître effrayante, mais les scientifiques à l'origine de cette expérience n'ont rien de savants fous : leur but n'était en aucun cas de donner naissance à des enfants clonés. « Tous nos efforts ont pour objectif de parvenir à la mise au point d'outils thérapeutiques », avait alors insisté Samuel Wood, le chercheur qui a dirigé ces travaux.
Des outils.
L’obtention d’embryon par clonage permet en effet, au moins théoriquement, la production de cellules souches embryonnaires totalement compatibles avec l'adulte cloné. Ces cellules ont la capacité de se multiplier à l'infini et de se différencier en chacun des types cellulaires qui constituent un organisme adulte. Elles semblent constituer des outils parfaits pour la thérapie cellulaire.
L’utilisation de cette méthode de production des cellules thérapeutiques pose néanmoins un gros problème : la stratégie passe en effet par la génération d’un embryon humain qui sera détruit. Elle nécessite en outre l’utilisation d’ovules, des cellules rares et difficiles à obtenir dans l’espèce humaine.
La récente mise au point d’un protocole permettant de reprogrammer des cellules somatiques adultes en cellules souches pluripotentes (les fameuses cellules SPi) permettant de contourner ces problèmes, on est amené à s’interroger sur l’intérêt des travaux de Wood.
« La recherche sur les cellules souches de l'embryon reste indispensable. C'est encore aujourd'hui la voie royale », souligne le Dr John de Vos de l'institut de recherche en biothérapie (Montpellier). « Sans cellules souches embryonnaires, il n'aurait pas été possible d'aboutir à la mise au point des protocoles de reprogrammation des fibroblastes humains. (…) L'avenir de la thérapie cellulaire est certainement dans la reprogrammation des cellules adultes, mais l'avenir de cette technique dépend elle-même des recherches sur l'embryon ». En d'autres termes, il est possible que le clonage thérapeutique n'ait pas d'avenir en thérapie, mais il pourrait devenir un outil de recherche particulièrement utile à la mise au point de stratégies alternatives de production de cellules pour la médecine régénérative. Il n'est donc pas souhaitable que les recherches relatives au clonage thérapeutique soient abandonnées.
La course à la cellule thérapeutique idéale va donc se poursuivre. Les deux approches sont amenées à évoluer et, à la vitesse où vont les choses, on peut imaginer qu'elles deviendront rapidement toutes deux performantes. Cependant, en se dispensant de l'utilisation d'ovocytes et de la production d'embryons, une technique telle que celle de la reprogrammation des cellules adultes a de grande chance de prendre l'avantage.
A. French et coll., « Stem Cells », vol. 26, pp. 485-493.
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