LA BIOPSIE D’ENDOMYOCARDE, qui est l’examen standard pour le diagnostic du rejet de greffe cardiaque, outre qu’il est coûteux, expose à des complications rares mais graves (ponction accidentelle d’artère, arythmies, voire perforation cardiaque). La recherche de méthodes alternatives, non invasives, s’est concentrée sur la réponse immunitaire du receveur. C’est le cas du test AlloMap, approuvé par la FDA, qui mesure l’expression de certains gènes dans le sang périphérique du patient. Sa valeur prédictive est faible toutefois.
L’équipe de Stephen Quake a développé une approche nouvelle. Elle s’est intéressée à la signature génomique des cellules mortes issues de l’organe du donneur, qui libèrent leur ADN dans le sang du receveur. Dans le rejet chronique ou aigü, en effet, il existe une apoptose de certaines cellules de l’allogreffe. Les Américains se sont dit que s’il est possible d’identifier une signature spécifique de l’organe greffé (par comparaison avec le génome du receveur), alors on peut envisager de suivre l’évolution du « taux d’ADN de donneur » dans le temps et détecter ainsi un rejet.
Une technique indépendante du sexe.
Jusqu’ici, les mesures de matériel génétique circulant étaient limitées au chromosome Y, et ne pouvaient donc s’appliquer que dans le cas de femmes receveuses d’organes issus de donneurs masculins. Les Californiens ont mis au point une méthode de quantification indépendante du sexe du donneur et du receveur. Il s’agit d’une étude dite de dynamique de génomes de transplantation (GTD : Genome Transplant Dynamics), basée sur un séquençage « shotgun » (en vrac) à haut débit de l’ADN « cell-free ».
Cette technique a été testée sur des échantillons de plasma (n = 44) de quatre patients de sexe masculin greffés avec le cœur de donneurs également masculins. Les taux d’ADN de donneur ont été calculés en utilisant une bibliothèque complète de polymorphismes nucléotidiques (SNP), homozygotes et hétérozygotes. Les auteurs observent que l’augmentation d’expression génomique dans le temps, lorsqu’il y a eu un rejet de greffe, concerne uniquement les SNP spécifiques de donneur.
Alors que, plusieurs mois avant le rejet, la différence d’expression génique (entre receveur et donneur) est négligeable, elle atteint des taux supérieurs à 3 ou 4 % après le rejet. Les chercheurs établissent le seuil de « normalité » (absence de rejet) à moins de 1 % d’ADN de donneur dans le sang des receveurs. La sensibilité de la méthode GTD est bonne, avec 83 % de vrais positifs (existence d’une corrélation avec la survenue d’un rejet) et 16 % de faux positifs. En outre, après traitement du rejet, le taux d’ADN de donneur baisse à nouveau et, dans certains cas, revient à la normale.
On voit donc que cette approche est d’un grand intérêt puisqu’elle offre un moyen non invasif et universel (indépendant du sexe) de dépister précocement le rejet de greffe du cœur, mais aussi de suivre l’évolution, en reflétant également le retour à la normale après traitement du rejet. Les Américains montrent aussi que la GTD, à l’opposé du test AlloMap, est capable de diagnostiquer le rejet avant la réalisation de la biopsie. Si ces résultats prometteurs sont confirmés, la quantification de la proportion d’ADN circulant de donneur dans le sang de receveur pourrait permettre de réduire le nombre de biopsies, et faire faire des économies substantielles (12 millions de dollars/an aux Etats Unis, selon une estimation de l’étude CARGO). On peut enfin envisager son application dans le diagnostic de rejet pour d’autres greffes d’organes (rein, poumon ou foie).
TM Snyder, SR Quake et coll. Universal noninvasive detection of solid organ transplant rejection. Proc Ntl Acad Sci USA (2011) Publié en ligne.
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