Particularités
Leucémie aiguë lymphoblastique
Il existe un pic d’incidence chez les garçons à l’adolescence dont on ne sait s’il correspond à un type biologique spécifique ou au rôle des androgènes. L’incidence des facteurs pronostiques défavorables est plus grande : groupe L2 de la FAB, immunophénotype proT, présence du chromosome philadelphia (t(9,22) BCR-ABL) retrouvé chez moins de 3 % des enfants mais chez 3 à 26 % des sujets jeunes, du sous type Hox+, alors que l’incidence de la translocation TEL-AML1, facteur pronostique favorable, est moindre.
Cancers du colon
Dans cette population, il existe une plus grande incidence des instabilités des microsatellites, des formes héréditaires (polypose adénomateuse familiale, mutation du gène APC) ainsi que des formes HNPCC (hereditary non-polyposis colon cancer) elles-mêmes caractérisées par des mutations de gènes de réparation de l’ADN (MSH2, MLH1, PMS2) et par une plus grande fréquence des instabilités des microsatellites.
Les causes du dysfonctionnement du système MMR (Mismatch Repair) sont l’hyperméthylation somatique du promoteur du gène MLH1 dans les cancers sporadiques (représentant 15 à 30 % des cancers colorectaux, atteignant les sujets âgés, localisés au colon droit), tandis que des mutations germinales des gènes MLH1, MSH2, MSH6 ou PMS2 sont retrouvées dans les cancers coliques familiaux (syndrome de Lynch ou HNPCC, 2 à 3 % des cancers colorectaux, atteignant les sujets jeunes, de localisation colique mais également extracolique dont l’endomètre).
Les mutations de p53 et la perte de bcl2 sont plus fréquentes chez les sujets jeunes tandis que les mutations de KRAS et la perte d’hétérozygotie (LOH) de 17p ou 18q, anomalies retrouvées chez les sujets plus âgés, le sont moins.
Le pronostic est plus défavorable chez les sujets de moins de 30 ans, lié à des caractéristiques plus agressives de la tumeur notamment une plus grande fréquence des formes mucineuses de plus mauvais pronostic (avec 50 % de formes mucineuses chez les sujets jeunes contre 3 % chez les sujets plus âgés), des formes dédifférenciées, et un diagnostic fait à un stade plus avancé.
Tumeurs stromales gastro-intestinales
Ces tumeurs mésenchymateuses se développent le plus souvent aux dépens de l’estomac et du grêle, plus rarement du rectum, du colon, de l’sophage ou du mésentère. Elles dérivent des cellules de Cajal ou de leur précurseur et leur phénotype est CD117/KIT+ (98 %), CD34+ (70 %). Elles sont caractérisées par la fréquente expression des protéines KIT (80 %) ou PDGFR? (5 %) mutées activées de manière mutuellement exclusive.
Chez les sujets de moins de 40 ans, l’atteinte prédomine chez les femmes, la présentation est multifocale, la mutation de KIT ou de PDGFR n’est pas retrouvée expliquant l’absence de sensibilité à l’imatinib.
Cancer du sein
Les tumeurs sont souvent de plus grande taille, de grade plus élevé, l’atteinte ganglionnaire est plus fréquente avec un nombre de ganglions atteints plus élevé. Les formes dites triples négatives (RO-, RP-, HE2-) non hormonosensibles sont plus fréquentes.
L’association avec un risque familial accru (mutations de BCRA1) est plus fréquente. Chez une femme de moins de 30 ans avec une histoire familiale de cancer du sein, une mutation de BCRA1, BRCA2 ou TP53 est retrouvée dans plus de 50 % des cas tandis qu’en l’absence d’antécédents familiaux ces mutations ne sont retrouvées que dans 10 % des cas.
Autres tumeurs
La fréquence du variant de type alvéolaire du rhabdomyosarcome (avec translocation du 13, PAX 3-FKHR) chez les adolescents et les adultes jeunes de pronostic plus défavorable est plus grande.
Dans le sarcome d’Ewing, le gain de 1q ou la perte de 16q de moins bon pronostic sont plus fréquents chez les patients de plus de 15 ans.
Dans les liposarcomes, des translocations impliquant les chromosomes 2, 16, et 22 sont plus souvent retrouvées.
L’incidence du mélanome est 2 fois supérieure chez les filles jeunes à l’inverse des adultes. La fréquence plus élevée de mutation de BRAF (40 à 50 % des cas) est corrélée à un index mitotique plus faible et à des tumeurs moins épaisses de meilleur pronostic.
Mécanismes
Quels mécanismes pourraient intervenir dans la spécificité des cancers des sujets jeunes ?
La régulation épigénétique de gènes suppresseurs de tumeurs (hyperméthylation d’îlots CpG de régions promotrices) : dans les leucémies aiguës lymphoblastiques, la méthylation des gènes de kinases régulatrices de la croissance (p57 codé par CDKN1C et p15 codé par CDKN2B) et des gènes suppresseurs de tumeurs TP73 est plus importante chez les adolescents et les adultes jeunes que chez les enfants. L’hyperméthylation du gène MLH1 est retrouvée dans 16 % des polypes du sujet jeune sans que l’on sache s’il s’agit d’un facteur de progression accélérée vers la cancérisation.
Le raccourcissement de la longueur des télomères est associé à un rajeunissement d’une génération à l’autre dans l’apparition de cancer dans le cadre du syndrome de Li et Fraumeni.
Certains facteurs comme la maturation sexuelle, l’obésité (en augmentation chez les adolescents) pourraient être impliqués.
Les prélèvements congelés, dont le nombre est faible chez les sujets jeunes par rapport aux adultes, sont indispensables à l’étude de la fonction des gènes et des effets des mutations qui pourraient permettre l’identification de nouvelles cibles et la conception de substances thérapeutiques capables de restaurer un fonctionnement cellulaire normal.
D’après la communication du Pr Jean-Yves Pierga, oncologie médicale, institut Curie, lors des Entretiens du DOM, organisés par l’Institut Curie avec le soutien de Novartis Oncologie.
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