DES ÉQUIPES de l’Inserm, l’INRA et du CNRS viennent de comprendre l’un des mécanismes permettant à Listeria monocytogenes d’infecter une cellule. La bactérie réussit à détourner à son avantage l’expression de gènes de la cellule hôte. Pour y parvenir elle secrète une protéine, LntA (listeria nuclear targeted protéine A), capable de pénétrer à l’intérieur du noyau afin de perturber le système de défense immunitaire cellulaire. L. monocytogenes reprogramme pour son propre bénéfice des gènes impliqués dans la sécrétion d’interférons.
Les bactéries intracellulaires dont Listeria, expliquent Hélène Bierne et son équipe (dirigée par Pascale Cossart), répondent aux programmes transcriptionnels de défense cellulaire en manipulant la chromatine afin de reprogrammer cette transcription. Pour identifier le facteur impliqué chez L. monocytogenes, les chercheurs ont décrypté les gènes codant pour des protéines n’existant que dans les souches virulentes de cette bactérie. Ils ont identifié le gène lntA, exprimé à de faibles niveaux, codant pour la protéine du même nom. Le mode de fonctionnement de cette protéine a été mis en évidence chez de souris infectées par des souches bactériennes modifiées génétiquement afin d’exprimer ou non le gène.
Il est apparu que LntA cible, dans le noyau de la cellule hôte, le répresseur de chromatine BAHD1 afin d’activer les gènes stimulés par l’interféron. Ainsi dans les cellules infectées par des souches exprimant LntA, cette protéine bloque BADH1 et favorise l’expression des interférons. Les auteurs en concluent que l’interaction entre le répresseur de chromatine BAHD1 et Lnta permet de moduler la réponse immune médiée par les INF gamma. Cette interaction favorise le contrôle de la colonisation bactérienne de l’hôte.
Au cours de l’infection, BADH1 se comporte comme un régulateur négatif des gènes stimulés par l’interféron. Le contrôle précis de l’expression du gène lntA au cours de l’infection permet à Listeria de réguler finement l’immunité locale et d’échapper à la réponse cellulaire antibactérienne.
Les chercheurs ne peuvent encore préciser quand et comment la bactérie décide d’utiliser la production de la protéine LntA. Ils savent pour le moment que cette arme est indispensable à l’infection. Le travail laisse entrevoir la place d’une régulation épigénétique dans ce mode infectieux, à vérifier chez d’autres agents infectieux.
Sciencexpress, 20 juin 2011, 10.1126/science.1200120.
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