Pourquoi certains sujets jeunes sans facteur de risque connu vont-ils présenter un syndrome de détresse respiratoire aigu (SDRA) lors d’une grippe saisonnière ? Des erreurs génétiques peuvent être en cause, comme le montre une étude franco-américaine publiée dans « Science Express ».
L’équipe du Laboratoire de Génétique humaine des maladies infectieuses regroupant des chercheurs INSERM, de l’Université Paris-Descartes, des médecins de l’hôpital Necker à Paris et de la Rockfeller University à New York, a découvert une mutation génétique du système immunitaire, inconnue jusque-là, chez une fillette ayant présenté cette forme gravissime de grippe à l’âge de 2 ans et demi. « C’est la première compréhension du mécanisme de la grippe sévère chez un sujet jeune sans facteur de risque, explique Jean-Laurent Casanova, qui a dirigé la recherche. Jusqu’à présent, il n’y avait aucune explication à ce qu’un sujet en bonne santé développe une forme grave de l’infection ».
L’interféron en réanimation
Pour tester l’hypothèse génétique dans la grippe grave, les chercheurs ont séquencé le génome d’une fillette, qui avait été hospitalisée en réanimation pédiatrique en janvier 2011, alors âgée de 2 ans et demi. En comparant son génome à celui de ses parents, l’équipe a constaté qu’elle avait hérité de chacun d’eux d’un allèle muté différent pour le gène codant pour le facteur de régulation IRF7. Ce dernier étant un facteur de transcription connu pour amplifier la production d’interférons en réponse à un virus, son inactivation par la double mutation a entraîné de multiples perturbations du système de défense contre la grippe. Ce que les chercheurs ont mis en évidence par une série d’expériences sur des cellules dendritiques et pulmonaires.
Recrutement en cours
« Il s’agissait pour la fillette d’une primo-infection grippale, détaille le chercheur. Son déficit génétique est autosomique récessif. Les mécanismes immunitaires qui lui ont fait défaut indiquent qu’ils sont indispensables pour la protection contre le virus influenza. Comme ils sont redondants avec l’immunité acquise, qu’elle a mise en place après l’infection, il est fort probable qu’elle ne présente plus de vulnérabilité particulière. La fillette est désormais vaccinée tous les ans contre la grippe ».
La mutation identifiée suggère qu’un traitement par interféron recombinant pourrait être utile dans les grippes graves. « Cela vaudrait le coup d’essayer l’interféron, qui est déjà sur le marché depuis 30 ans, dans les formes ne répondant pas à la ventilation et aux antiviraux », précise Jean-Laurent Casanova. L’équipe du Laboratoire de Génétique humaine poursuit ses travaux et cherche à caractériser d’autres mutations. « Les causes génétiques responsables de grippe grave à l’âge de 15 ans ont toutes les chances d’être différentes de celles dans le jeune âge lors d’une primo-infection », indique-t-il. Un recrutement est en cours actuellement avec l’inclusion prévue d’une vingtaine de jeunes patients ayant été hospitalisés en réanimation pour grippe grave.
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