LE PROJET Risc-Rad (Radiosensitivity of Individuals and Susceptibilty to Cancer Induced by Ionizing Radiations) est un projet de recherche en biologie cellulaire sur les effets des faibles doses et faibles débits de dose d’irradiation. Ce projet, coordonné par le Dr Laure Sabatier du CEA, réalisé entre 2004 et 2008, s’inscrit dans le cadre du volet Euratom du 6 e programme cadre de recherche et de développement de la Commission européenne qui a rassemblé 36 laboratoires de 11 pays européens. Trente millions d’euros ont été investis.
Actuellement, l’estimation des risques pour les faibles doses d’irradiation est fondée sur l’extrapolation des effets délétères observés à fortes doses et les mesures de radioprotection au niveau international s’appuient sur l’hypothèse dite de la « relation linéaire sans seuil », qui établit une stricte relation de proportionnalité entre effets sanitaires et doses reçues. Mais cette relation ne reflète peut-être pas la réalité scientifique.
L’approche de Risc-Rad a consisté à rechercher l’impact des effets des faibles doses d’irradiation (doses inférieures à 100mSv*) sur les mécanismes connus à l’échelle moléculaire dans la cancérogénèse : dommages induits à l’ADN, mécanisme de signalisation et de la réparation de ces dommages, instabilité du génome, susceptibilité génétique aux rayonnements ionisants. Trois grandes questions présidaient à ces recherches fondamentales, effectuées soit sur des modèles animaux, soit sur des lignées cellulaires : les mécanismes de la cancérogenèse induite par les fortes doses d’irradiation sont-ils également impliqués de faibles doses d’irradiation ? Dans quelle mesure les prédispositions génétiques peuvent-elles modifier le risque individuel de développer un cancer radio-induit ? Peut-on établir un modèle mathématique d’estimation du risque de développer un cancer radio-induit par de faibles doses d’irradiation ?
Les résultats de Risc-Rad soulignent une diversité de réponses à la dose de rayonnements ainsi que les effets sur les processus biologiques impliqués dans la cancérisation. Un certain nombre de processus répondent de façon dépendante de la dose, comme l’induction de dommage de l’ADN, d’aberrations chromosomiques et de mutations, tandis que d’autres, tel le contrôle du cycle cellulaire, présentent un seuil-dose en dessous duquel aucun effet n’est observé. D’autre part, les effets induits par de faibles doses d’irradiation peuvent être très différents de ceux observés à la suite de fortes doses d’irradiations, mais restent encore à étudier. Pour chaque dose d’irradiation, il se produit des réponses cellulaires pouvant être bénéfiques en induisant un effet protecteur contre la cancérogénèse, soit néfastes en augmentant le risque de cancérisation. « Il n’y a donc pas de dose-effet pour tous les processus biologiques cellulaires étudiés », souligne le Dr Laure Sabatier.
Des communications entre les cellules.
Autre enseignement fourni par Risc-Rad est l’émergence d’un nouveau concept, appelé effets « bystander » : les rayonnements pourraient avoir des effets indirects dans la cancérogénèse. Des organes non irradiés peuvent subir des dommages liés à l’irradiation d’autres organes. L’explication de ce mécanisme serait liée à l’existence de communications entre les cellules via des molécules produites par les cellules irradiées. Bien que ce phénomène soit considéré comme mineur par rapport aux dommages causés à l’ADN dans les cellules irradiées, il vient d’être mis pour la première en évidence.
Ce programme a montré que les prédispositions génétiques modulent le risque de développer un cancer. Bien que peu de gènes impliqués dans les cancers radio-induits soient connus, des études menées dans le cadre de Risc-Rad ont mis en évidence : l’existence de facteurs de risques génétiques sur plusieurs types de tumeurs (ostéosarcome, cancer de la peau, lymphome…), l’existence d’autres gènes, d’autres voies cellulaires dans le risque de cancérogenèse radio-induite, l’existence d’une susceptibilité individuelle face à une exposition aux rayonnements. Les chercheurs du programme soulignent qu’une évaluation de la radio sensibilité individuelle serait « un apport considérable notamment dans les protocoles de radiothérapie ». Quant à la modélisation mathématique capable de décrire la cancérogénèse induite par de faibles doses d’irradiation « c’est un travail de longue haleine qui en est à ses débuts ».
D’après une conférence de presse organisée par le CEA, intervenants : Florence Ménétrier et le Dr Laure Sabatier (CEA-DSV, Fontenay aux Roses), Dietrich Averbeck (expert en radiobiologie).
Renseignements : www.riscrad.org
*Sv : Sieverts, unité utilisée pour donner une évaluation de l’impact du rayonnement sur l’homme (unité la plus utilisée le millième de Sievert mSv).
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