DE NOTRE CORRESPONDANTE
« LES THÉRAPIES antirétrovirales actuelles, bien que très efficaces pour contrôler la réplication du VIH et retarder la progression vers le sida, sont encore associées à de nombreux effets secondaires et doivent être prises tous les jours à vie », explique au « Quotidien » le Pr Ronald Mitsuyasu, directeur du centre de recherche clinique du sida à l'université de Los Angeles. « D'où l'intérêt de la thérapie génique qui, dans le cas présent, consiste à introduire dans des cellules souches sanguines (les progéniteurs de toutes les cellules immunes dans l'organisme) un gène protégeant contre l'infection par le VIH, thérapie qui fait espérer une administration unique ou peu fréquente et qui permettrait aux patients de contrôler eux-mêmes le VIH sans avoir besoin de médicaments en continu. »
Faisabilité démontrée.
« Notre étude est la première à démontrer, dans un essai randomisé contrôlé en double insu, la faisabilité de cette approche pour diminuer la réplication du VIH et améliorer les cellules T CD4 + lorsque la thérapie antirétrovirale est arrêtée et par rapport à des patients contrôle. »
« Si ce traitement est loin d'être au point et n'est pas aussi efficace que la thérapie antirétrovirale actuelle, l'étude apporte la preuve de principe que l'insertion ex vivo d'un seul gène anti-VIH dans les propres cellules souches sanguines du patient puis la réadministration autologue, pourrait réduire la réplication virale lorsque les médicaments anti-VIH ne sont plus pris. »
« En améliorant les techniques d'insertion génique, peut-être aussi en ciblant plus d'un gène du VIH, et en trouvant de meilleures approches pour autoriser la prise de greffe et la croissance des cellules génétiquement modifiées chez les patients, nous pourrions éventuellement être capables un jour d'amener les patients à maîtriser le VIH au sein de leurs cellules sans le besoin d'un traitement médicamenteux. Aucun effet secondaire majeur ou toxicité n'a été observé, toutefois, il reste à déterminer les effets à long terme de ces gènes. »
Cellules souches CD34+.
En quoi consiste cette thérapie génique ? Les ribozymes sont de petits ARN catalytiques qui peuvent être amenés à cibler des séquences d’ARN spécifiques, afin d'éteindre l'expression de gènes. Dans cet essai de phase 2, la thérapie génique (appelée OZ1) est composée d'un vecteur rétroviral incapable de réplication (dérivé du virus de la leucémie murine de Moloney) portant le gène d'un ribozyme qui cible deux protéines clés du VIH-1 : tat et vpr. Cette thérapie génique s'est montrée capable, in vitro, d’inhiber la réplication du VIH-1.
L'hypothèse, évaluée dans cet essai, est que les cellules souches hématopoïétiques CD34+, prélevées à partir d'un patient, transduites en culture par OZ1 et réinjectées chez le même patient, pourraient se greffer, se diviser et se différencier in vivo pour produire un pool de cellules myéloïdes et lymphoïdes protégées contre la réplication du VIH.
Entre 2003 et 2006, 74 adultes infectés par le VIH et traités par trithérapie ont été randomisés pour recevoir des cellules CD34+ transduites par OZ1 (n = 38) ou des cellules CD34+ non transduites (n = 36 témoins).
Chaque participant recevait une seule perfusion de ses propres cellules CD34+ (manipulées ou non), sans subir une myéloablation ou un conditionnement de la MO.
Le protocole comprenait des interruptions du traitement antirétroviral (pendant le 7e mois et les 11e et 12e mois) afin de favoriser une sélection positive des cellules protégées par OZ1. La thérapie antirétrovirale était réinstituée en cas de rebond viral.
La charge virale au 13e mois, premier critère sur lequel était évaluée l'efficacité, n'est pas significativement différente entre les groupes OZ1 et placebo. Cependant des paramètres secondaires d'efficacité par rapport à la charge virale indiquent une charge virale plus basse dans le groupe OX1.
De plus, durant les deux années, le taux des lymphocytes CD4+ était plus élevé dans le groupe OZ1.
Il n'a été observé aucun effet néfaste lié au transfert de gène OZ1, ni aucune complication. De plus, aucun décès, sida, infection sévère ou incident cardio-vasculaire, rénale ou hépatique n’est survenu.
Nature Medicine, 16 janvier 2009, Mitsuyasu et coll., DOI : 10.1038/nm.1932.
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