Dépistage prénatal : la Haute Autorité de santé appelle à repérer davantage d’anomalies chromosomiques

Par
Publié le 02/10/2024

La Haute Autorité de santé recommande de repérer d’autres anomalies chromosomiques que la trisomie 21, dans le cadre du dépistage fondé sur l’ADN libre circulant.

Crédit photo : VOISIN/PHANIE

Vers un dépistage prénatal toujours plus élargi. La Haute Autorité de santé (HAS) préconise, dans une recommandation publiée ce 2 octobre, de repérer d’autres anomalies chromosomiques dans le cadre des examens fondés sur l’ADN fœtal libre circulant (ADNflc), réalisés lors d’un dépistage de la trisomie 21.

Depuis 2018, un dépistage prénatal non invasif (DPNI) par examen basé sur l’ADN libre circulant est proposé aux femmes chez qui le risque retrouvé par dépistage combiné (marqueurs sériques maternels + âge maternel + signes d’appel échographiques dont la clarté nucale) lors d’une consultation médicale au premier trimestre se situe entre 1/1 000 et 1/51. Les prélèvements invasifs (amniocentèse ou choriocentèse) pour un diagnostic ne sont désormais réalisés que si le risque est supérieur ou égal à 1/50 (contre 1/250 jusqu’en 2017) ou si le résultat par ADNflc est positif pour la trisomie 21. Si ce changement a permis de réduire le nombre de prélèvements invasifs chez les femmes enceintes, l’introduction des examens par l’ADNflc pourrait entraîner une diminution du repérage des anomalies chromosomiques autres que la T21 (du fait de la réduction de caryotypes). D’où une saisine de la Direction générale de la santé, qui a demandé dès 2018 à la HAS d’évaluer l’intérêt de repérer d’autres anomalies chromosomiques, tandis qu’elle sollicitait en parallèle l’Agence de la biomédecine pour redéfinir les modalités d’information des femmes et des professionnels. En France, près de 130 000 examens par ADNflc ont été réalisés en 2022.

Plus d’une dizaine de trisomies à rechercher

La HAS recommande désormais de proposer la recherche des trisomies 2, 8, 9, 13, 14, 15, 16, 18 et 22 et les anomalies segmentaires non cryptiques, en plus de la trisomie 21, aux femmes déjà éligibles à un dépistage de cette dernière par ADN fœtal (à partir de l’analyse des marqueurs sériques, de l’âge maternel et des signes d’appel échographiques). « Ces anomalies chromosomiques sont en effet considérées comme compatibles avec une grossesse évolutive et susceptibles d’entraîner des conséquences fœtales ou obstétricales d’une particulière gravité », précise la HAS. « La prise en charge précoce de pathologies dépistées en prénatal, comme la T16, qui a un retentissement placentaire, pourraient limiter la morbidité en mettant en place une surveillance adaptée », lit-on encore. Les autres trisomies n’ont pas été retenues « compte tenu de leur faible fréquence en population générale et sur DPNI, du faible taux de confirmation diagnostique, du risque faible de mosaïque fœtale et/ou du faible risque de retentissement fœtal ou placentaire », lit-on.

En outre, la Haute Autorité suggère d’étendre les indications des examens par ADNflc aux femmes ayant eu un antécédent de grossesse avec aneuploïdies, ou à celles qui portent (ou dont le conjoint duquel est issu l’enfant porte) une translocation robertsonienne impliquant un chromosome 13, ou encore, en cas de profil de marqueurs sériques maternels évocateurs de trisomie 13 ou 18. Ces trisomies sont les plus communes après la T21 (1 cas pour 15 000 à 1 cas pour 6 000 naissances). Environ «  95 % aboutissent à un décès in utero. Pour les enfants nés vivants, les conséquences sont très lourdes conduisant dans 90 % à un décès la première année. En fonction du mosaïcisme, certains peuvent toutefois atteindre l’âge adulte », est-il précisé. Cette recommandation implique qu’une probabilité de T13 ou de T18 soit indiquée par les laboratoires à l’issue du dépistage combiné du premier trimestre.

Soigner l’information

La HAS souligne enfin la nécessité d’informer, hors situation d’urgence, les femmes enceintespour leur permettre une décision éclairée quant à la réalisation des examens de dépistage et de diagnostic. Les modalités devraient être définies par l’Agence de la biomédecine. « Le droit de ne pas savoir doit aussi être respecté », est-il rappelé. La HAS préconise également la formation des prescripteurs afin de garantir la qualité de l’information délivrée aux familles et l’autonomie des femmes dans la prise de décision, notamment dans le contexte d’augmentation du nombre d’anomalies repérées.

Ce temps dédié à l’information sur le dépistage, prévu dans le parcours de soins de la femme enceinte, doit être sanctuarisé par une juste rémunération pour les praticiens. La HAS insiste enfin sur l’importance de proposer ces mêmes informations et dépistages à toutes les femmes sur l’ensemble du territoire, alors qu’aujourd’hui persistent de très fortes inégalités en termes de recours au DPNI, d’utilisation des marqueurs sériques maternels, et de délivrance de l’information.


Source : lequotidiendumedecin.fr