Le cycle vertueux qui allie activité sportive et santé de la femme est chamboulé, chez les athlètes, par des entraînements très fréquents et intenses ainsi qu’une alimentation inadéquate. Les médecins du sport sont alors parfois confrontés à la « triade de l'athlète » : un trouble féminin qui combine insuffisance de la disponibilité énergétique, aménorrhée hypothalamique fonctionnelle et déminéralisation osseuse. Cette situation à haut risque touche les disciplines sportives de manière très inégale.
En temps normal, la pratique du sport favorise la régularité du cycle menstruel et la densité minérale osseuse. Des études ont montré, de plus, que les fluctuations hormonales du cycle menstruel normal constituaient un atout pour les performances sportives. En particulier au cours de la période après les règles, le pic d’œstrogènes facilite le stockage et l'utilisation des substrats énergétiques. Il est d’ailleurs recommandé de moduler la prise de protéines en fonction de la période du cycle.
Les sports esthétiques ou à catégorie de poids
« Des règles fonctionnelles sont possibles à partir d'un certain niveau de disponibilité énergétique, variable d'une sportive à l'autre », explique la Dr Carole Maître, gynécologue médicale à l'Institut national du sport, de l'expertise et de la performance (Insep) lors d’une présentation sur le sujet à l’Académie de médecine. L'absence de cycles est considérée comme un marqueur majeur de déficit énergétique. « Biologiquement, les adipocytes peuvent être considérés comme des cellules endocrines car ils produisent de la leptine, ajoute la Dr Maître. Cette dernière joue un rôle important lors des règles. »
Chez les sportives, les troubles du cycle apparaissent majoritairement dans un contexte de restriction calorique volontaire visant à optimiser la composition corporelle. « C'est en particulier le cas dans les sports de catégorie de poids et dans ceux où la minceur est perçue comme un avantage, précise la Dr Maître, également vice-présidente de la commission médicale du Comité national olympique et sportif français (CNOSF). La pression de l’entraînement et du résultat à tout prix, un profil perfectionniste, ou des débuts prépubertaires peuvent aussi induire des troubles du comportement alimentaire (TCA). » Selon les études, près de 70 % des pratiquantes de gymnastique rythmique ont une aménorrhée.
Comment poser le diagnostic
En 2018, le groupe d'experts médicaux du Comité international olympique (CIO) a publié un article de consensus sur le déficit énergétique dans le sport et ses conséquences sur la santé osseuse, cardiovasculaire et sur le cycle menstruel, assorti de préconisations pour le repérage et la prise en charge. « Le diagnostic ne se base pas sur l'indice de masse corporelle (IMC) mais sur la mesure de la masse grasse », résume la Dr Maître. Les facteurs évocateurs sont également listés : aménorrhée persistante (plus de six mois) sans explication autre que le déficit énergétique, antécédents de lésions osseuses, de fatigues ou de TCA. En biologie, un taux bas de T3 (avec TSH normale) semble refléter la gravité de la situation de carence. Bien évidemment, le médecin doit éliminer les autres causes possibles d’aménorrhée, la grossesse en premier lieu.
La prise en charge est pluridisciplinaire, impliquant des psychologues, des diététiciens, des nutritionnistes du sport et des médecins du sport. Elle inclut un soutien médical, nutritionnel et mental. Un traitement en milieu hospitalier doit être envisagé pour les patientes présentant une bradycardie sévère, une hypotension orthostatique et/ou un déséquilibre électrolytique.
Dysfonction périnéale, le grand non-dit
Les fuites urinaires pendant le sport ne sont pas spécifiques aux sportives de haut niveau. Ces athlètes ne présentent d’ailleurs ni surpoids ni sédentarité, qui en constituent les facteurs de risque habituels. « Et pourtant, il y a des prévalences de l'ordre de 80 % dans certains sports comme le trampoline, qui combine des impacts vigoureux au sol, des déplacements rapides et une forte sollicitation des muscles abdominaux », explique la Dr Maître. La posture du bassin et les durées d’entraînement peuvent influencer la sévérité des fuites. Il y a une dizaine d'années, une étude réalisée auprès de plus de 400 sportives de l'Insep avait conclu que les plaquages, fréquents chez les joueuses de rugby, constituait également un facteur de risque majeur.
Le dysfonctionnement du plancher pelvien relève d'un mécanisme complexe : la combinaison d'une faiblesse musculaire et d’une modification anatomique telle que l'élargissement du hiatus urogénital avec descente du col de la vessie. « Des travaux ont complété ces observations en mettant l'accent sur les activités musculaires, avec un asynchronisme entre la contraction abdominale et la contraction du périnée », précise la Dr Maître. La rééducation périnéale est à la fois un outil de compréhension du comportement du périnée, une possibilité de prise en charge et un moyen de prévention.
Dr Patrick Gasser (Avenir Spé) : « Mon but n’est pas de m’opposer à mes collègues médecins généralistes »
Congrès de la SNFMI 2024 : la médecine interne à la loupe
La nouvelle convention médicale publiée au Journal officiel, le G à 30 euros le 22 décembre 2024
La myologie, vers une nouvelle spécialité transversale ?