DE NOTRE CORRESPONDANTE
L’IDÉE D’UTILISER la vitamine D dans le traitement de la SEP est venue de l’observation d’une influence de la latitude, et donc de l’exposition solaire, sur l’incidence de cette maladie. On sait que la vitamine D, sous sa forme active, régule le métabolisme du calcium sérique en particulier par une réabsorption du calcium par les reins. A trop fortes doses, toutefois, au lieu de fixer le calcium sur l’os, elle le libère dans le courant sanguin (d’où une hypercalcémie). Mais la vitamine D a aussi un effet immunomodulateur car elle réduit l’expression de plusieurs cytokines inflammatoires.
Dans l’encéphalomyélite autoimmune expérimentale (EAE), la suppression des symptômes et la freination de l’évolution de la maladie a été mise en relation avec le calcium. Des travaux antérieurs des chercheurs américains ont ainsi suggéré le rôle de l’hypercalcémie, ou d’un facteur libéré lors de l’hypercalcémie, dans l’action protectrice contre la EAE.
Poursuivant logiquement leur hypothèse, ils ont entrepris d’évaluer l’action de la calcitonine (CT), dont la libération est stimulée par l’hypercalcémie, dans l’EAE. La CT avait déjà permis d’améliorer, chez l’homme, les symptômes d’une autre maladie autoimmune, la polyarthrite rhumatoïde, en partie via une inhibition de l’interleukine 1.
Les Américains montrent que le traitement de souris C57BL/6J par 60 microg/kg de CT permet de retarder la survenue de l’EAE et d’induire un modeste infléchissement des symptômes. En outre, l’administration de CT réduit la calcémie.
Dans une deuxième série d’expérimentations, les chercheurs ont testé l’association de calcitriol et de différentes doses de CT. Le traitement par 1 nanog/j de calcitriol (une dose infrathérapeutique) et 3 microg/kg/j de CT entraîne une réduction significative (p<0,001) de l’incidence de l’EAE (de 78% dans le groupe contrôle à 47% chez les souris traitées), ainsi qu’une réduction transitoire de la calcémie de 0,7 mg/dL.
Une nouvelle étude a ensuite évalué l’effet de l’addition de CT sur la dose efficace de calcitriol chez des souris traitées par 0, 1 ou 2 nanog/j de calcitriol en association soit avec un excipient (placebo), soit avec 3 microg/kg/j de CT. Ses résultats indiquent que l’administration conjointe de CT permet d’abaisser la dose nécessaire de calcitriol pour l’obtention d’une efficacité clinique, mais qu’elle ne permet pas d’éviter la survenue d’une hypercalcémie aux doses élevées de calcitriol.
Or il a été montré, par ailleurs, que les souris soumises à un régime riche en calcium ont besoin de doses beaucoup plus faibles de calcitriol que celles ayant un régime pauvre en calcium (DeLuca et coll., 1996). Des souris ont donc été traitées par l’association calcitriol (0, 1 ou 5 nanog/j) + CT (3 microg/kg/j), avec un régime riche ou pauvre en calcium (1% ou 0,25%). Dans ce nouvel essai, on observe, chez les rongeurs soumis à l’administration de 1 nanog/j de calcitriol, une suppression spectaculaire des symptômes d’EAE quand un régime riche en calcium est associé, par rapport aux animaux contrôles et à ceux avec un régime pauvre en calcium.
Ces travaux montrent donc que l’adjonction de CT au calcitriol permet de supprimer les symptômes d’EAE sans hypercalcémie, mais que l’efficacité de l’association dépend du régime calcique. On peut envisager deux explications possibles à cette action synergique. L’une est que la CT stimule la production de calcitriol endogène par l’intermédiaire d’une surexpression de l’enzyme 1 alpha-hydroxylase (intervenant dans l’hydroxylation de la vitamine D en sa forme active). L’autre explication possible repose sur l’observation que la CT renforce l’effet suppresseur de certains agents immunomodulateurs. Auquel cas l’action synergique de la CT résulterait d’un mécanisme plus global.
Dr BERNARD GOLFIER
(1) BR Becklund, DW Hansen,Jr & HF DeLuca. Enhancement of 1,25-dihydroxyvitamin D3-mediated suppression of experimental autoimmune encephalomyelitis by calcitonin. Pnas 2009, publié en ligne.
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