POUR COMMUNIQUER entre elles, les cellules utilisent comme messagers des molécules porteuses de diverses informations. Ce système de messagerie, les voies de signalisation cellulaires, est d’un grand intérêt dans le développement et la survie des tumeurs. Mais Plasmodium falciparum, agent du paludisme, a appris aussi à les utiliser pour son propre compte. C’est à partir de cette découverte qu’une équipe internationale, celle de Christian Doerig (INSERM U609/EPFL, Lausanne, Suisse) a eu l’idée de tester des molécules susceptibles d’interrompre l’une de ces voies de communication. Il s’agit des inhibiteurs de kinases, largement utilisés dans le traitement des tumeurs cancéreuses. Les premiers résultats, tout à fait expérimentaux, se montrent prometteurs.
Des voies de signalisation impliquant des protéines kinases.
Audrey Sicard et coll. savaient, à la lumière des travaux antérieurs, que de nombreux pathogènes, dont l’agent du paludisme, modèlent la cellule hôte à leurs besoins. Ainsi les sporozoïtes de P. Falciparum assurent leur survie intra-hépatocytaire en empêchant l’apoptose et l’inflammation locale. Des voies de signalisation impliquant des protéines kinases sont impliquées à ce niveau. De même à l’étage érythrocytaire des voies de signalisation sont mises en œuvre, alors qu’elles ne sont guère utiles au globule rouge. Il s’agit dans ce cas de modules utilisant la voie de signalisation MAPK (mitogen-activated protein kinase). Au cœur de cette voie se trouve un module à trois kinases : MAPK, elle-même ; son activateur MEK (ou MAPKK) ; MAKK (ou MAPKKK). L’activation de la kinase MEK se fait notamment par celle d’une autre kinase PAK.
L’équipe INSERM s’est intéressée à des hématies contaminées par Plasmodium falciparum. Elle a effectivement constaté une forte activation de la voie de signalisation PAK-MEK, plus intense dans les cellules infectées que dans les globules rouges indemnes. Les chercheurs ont donc testé sur ces hématies des inhibiteurs de kinases. Ils ont confirmé le blocage de la prolifération parasitaire et la mort des P. Falciparum.
Les rongeurs ont été traités avec succès.
Pour leur part, les collaborateurs Suisses et Écossais se sont penchés sur un Plasmodium qui infecte les rongeurs. Ils ont étudié l’infection au niveau hépatique et érythrocytaire. Leur premier constat était l’utilisation récurrente du détournement des voies de signalisation par le parasite. Seconde conclusion, les rongeurs ont été traités avec succès par des inhibiteurs de kinases.
Il reste à savoir si les inhibiteurs des kinases MEK et PAK ont une action « statique » ou « cide » sur les parasites. Quoi qu’il en soit les auteurs suggèrent que les inhibiteurs de kinase qui ont passé avec succès les études de phase 1 et 2 et qui ont réussi ou échoué aux phases 3 soient testés dans des indications antipalustres. Ce qui réduirait notablement la durée et le coût des processus de mise au point de tels traitements. Il faudrait aussi prendre en considération la toxicité de ces molécules. Ce à quoi A. Sicard et coll. objectent que, si dans le cadre d’une chimiothérapie anticancéreuse leur utilisation est prolongée, ce ne serait pas le cas au cours du paludisme. Enfin, cette nouvelle voie thérapeutique présente un avantage majeur : elle cible l’hôte et non l’agent infectieux. Ce qui devrait contourner l’écueil de la résistance thérapeutique du parasite.
Cellular Microbiology (2011), doi :10.1111/j.1462-5822.2011.01582.x.
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