POUR ENDIGUER le paludisme et l’émergence de résistances, les scientifiques cherchent de nouvelles cibles thérapeutiques. Deux équipes, l’une française Inserm CNRS (1), l’autre américaine de l’université de Pennsylvanie (2), ont exploré la piste enzymatique. Le résultat de leurs travaux est fructueux. Chacune a identifié un candidat médicament potentiel : la molécule FR235222 du côté de l’équipe grenobloise de Mohamed-Ali Hakimi et la protéase calpain-1 du côté de celle de Doron Greenbaum. Chaque cible s’est révélée également valable pour un autre parasite très connu de la même famille des Apicomplexa, Toxoplasma gondii. Toutes deux agissant au niveau enzymatique, leur mécanisme d’action est cependant très différent. La première vise à inhiber une enzyme parasitaire, la seconde une enzyme de la cellule hôte détournée par le parasite pour son propre compte.
Deux raisonnements, une même piste.
Pour l’équipe coordonnée par Mohamed-Ali Hakimi, la réflexion était en réalité un peu plus compliquée au départ. Les chercheurs voulaient valider l’hypothèse selon laquelle la structure des chromosomes participait au contrôle de l’expression génique dans la famille parasitaire des Apicomplexa. Pour ce faire, ils ont testé plusieurs molécules capables d’altérer les histones, qui forment la chromatine en se liant à l’ADN et inhibent ainsi l’expression de certains gènes. La molécule FR235222, issue d’un champignon filamenteux, s’est révélée particulièrement intéressante : elle inhibe, en effet, des enzymes qui condensent la chromatine, les histones désacétylases. Le peptide lève ainsi la répression de plusieurs gènes, environ 5% des gènes parasitaires, et induit la différenciation des tachyzoïtes, la forme réplicative, en bradyzoïtes, forme non réplicative. Voilà comment FR235222 est capable de limiter la prolifération du parasite. Étapes suivantes pour l’équipe : identifier des molécules homologues à FR235222 et mener des essais précliniques chez la souris.
Les chercheurs américains eux sont partis d’une autre constatation : les parasites utilisent indûment des enzymes de la cellule-hôte pour proliférer. Comme les parasites entraînent la mort cellulaire, ils sont eux-mêmes contraints de sauter de cellule en cellule pour survivre. Comment franchissent-ils la membrane cellulaire ? Tout simplement en se servant d’une protéase de l’hôte, la calpain-1, avant d’abandonner la cellule en pleine apoptose à son triste sort. Doron Greenbaum et ses collaborateurs ont ainsi montré in vitro, pour P.falciparum d’abord et T.gondii ensuite, qu’en bloquant cette protéase régulée par le calcium, les parasites piégés sont condamnés et ne peuvent plus infecter d’autres cellules.
(1) The Journal of Experimental medicine, édition en ligne; (2) Science, édition en ligne.
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