Des chercheurs de l’Université Stanford ont identifié une signature d’expression génique pouvant distinguer l’infection respiratoire virale de l’infection bactérienne. Ils ont aussi identifié une signature de la grippe. Une précieuse découverte pour le diagnostic et le traitement des infections virales.
« Nous avons identifié deux signatures transcriptionnelles : l’une commune à de multiples virus (la signature métavirus, ou MVS), l’autre spécifique à la grippe (la signature influenza métavirus, ou IMS) », explique au « Quotidien » le Pr Purvesh Kathri, chercheur en bio-informatique et immunité à l’université Stanford (Californie). L’étude, publiée dans la revue « Immunity », présente plusieurs implications cliniques.
Objectif, la pratique clinique
« MSV peut distinguer avec une grande exactitude les infections virales des infections bactériennes. Nous optimisons maintenant cette signature de façon à ce qu’elle puisse être utilisée en pratique clinique pour permettre un diagnostic différentiel entre l’infection virale et l’infection bactérienne, ce qui serait utile pour décider de traiter ou non par antibiotique », poursuit le chercheur.
La signature influenza metavirus (IMS) « distingue avec une grande fiabilité la grippe des autres infections virales respiratoires et bactériennes. De manière remarquable, IMS peut correctement identifier les individus infectés avant même l’apparition des symptômes. Par ailleurs, IMS est la première signature transcriptionnelle commune à l’infection grippale et à la réponse au vaccin grippal. Par conséquent, elle pourrait être utile pour mesurer l’efficacité et la réponse au vaccin », explique le Pr Kathri. Plus remarquable encore, les réactions différenciées entre hommes et femmes. « De précédentes publications avaient montré un effet inhibiteur de la testostérone sur la réponse au vaccin. L’IMS révèle un effet plus nuancé en montrant une dynamique différente entre les 2 sexes : les individus masculins répondent au vaccin grippal le 1er jour, tandis que le sexe féminin répond au vaccin le 3e jour. Ceci suggère que lors de la conception des essais cliniques de vaccins, il faudra penser à prélever les hommes au 1er jour après la vaccination et les femmes au 3e jour post-vaccinal », précise le chercheur.
L’étude révèle aussi de nouvelles voies de la réponse antivirale et identifie des cibles potentielles pour développer des antiviraux à large spectre, qui seraient précieux contre les infections virales graves, comme le syndrome respiratoire aigu sévère (SRAS), la dengue et d’autres.
Apport du Big Data
Pour découvrir une réponse transcriptionnelle de l’hôte commune aux diverses infections virales respiratoires, ou une réponse spécifique au virus grippal, les chercheurs ont analysé les données publiques (base de données GEO du NCBI) de 26 cohortes indépendantes, comprenant près de 3 000 échantillons (sang, PBMC ou cellules épithéliales) d’enfants ou adultes de pays différents. « Ce qui est extraordinaire, c’est que toutes ces données étaient déjà disponibles pour notre analyse. Nous avons pu créer du Big Data en combinant beaucoup de "small data", souligne le Pr Kathri. Étant donné la quantité des données hétérogènes utilisées dans notre analyse, ces signatures sont robustes et reproductibles. »
Les chercheurs ont d’abord analysé les échantillons sanguins de 205 individus ayant une grippe, un rhume ou infectés par le virus respiratoire syncytial, ce qui leur a permis d’identifier une signature commune reposant sur 396 gènes surexprimés (161) ou sous-exprimés (235). L’analyse de cette signature MSV sur les échantillons sanguins ou cellulaires de près de 3 000 individus a permis d’identifier correctement d’autres infections virales (coronavirus du SARS, adénovirus, HHV6, et entérovirus), les distinguant des infections bactériennes (E. coli, S. aureus, S. pneumoniae, Salmonella) et des échantillons de sujets en bonne santé.
Grippe : une dynamique en 2 temps
La même approche a permis d’identifier une signature de réponse à la grippe (IMS) basée sur 11 gènes surexprimés ; elle distingue la grippe des autres infections virales et bactériennes, peut servir de marqueur diagnostique et pronostique chez les patients affectés de pneumonie grippale, et indique la réponse au vaccin grippal. L’étude révèle même une dynamique en 2 temps face à une infection grippale, avec la signature MSV précédant de quelques heures la signature IMS. « Il semble qu’en présence d’une infection virale, le système immunitaire déclenche une réponse générale contre tous les virus, suivie d’une réponse spécifique envers le virus donné », explique le Pr Kathri. « On peut imaginer un arbre décisionnel, ou le système immunitaire se demande : "Est-ce bactérien ou viral ?" Et si c’est viral, il active la réponse MSV. Puis il se demande : "Si c’est viral, quel est le virus ?" Et alors, il active une réponse spécifique contre ce virus. »
L’équipe s’attache maintenant à optimiser la signature MVS afin d’offrir un test diagnostic utilisable en clinique, et à le valider dans une cohorte indépendante en collaboration avec le Dr Jason Andrews (Université de Stanford).
Dr Patrick Gasser (Avenir Spé) : « Mon but n’est pas de m’opposer à mes collègues médecins généralistes »
Congrès de la SNFMI 2024 : la médecine interne à la loupe
La nouvelle convention médicale publiée au Journal officiel, le G à 30 euros le 22 décembre 2024
La myologie, vers une nouvelle spécialité transversale ?