« La protection des malades étrangers n’est pas une mesure "humanitaire". C’est la base d’une politique de santé publique efficace », affirme l'association de lutte contre le sida, AIDES, dont une trentaine de militants se sont symboliquement allongés ce 14 juin devant les locaux de l'Office français de l'immigration et de l'intégration (OFII) pour protester contre les mesures d'expulsion d'étrangers séropositifs.
Vêtus de noir, défilant sur l'air de la « Marche funèbre » de Chopin devant un véhicule noir figurant un corbillard, ils se sont rendus à pied devant l'OFII où ils ont déposé une gerbe ainsi qu'une fausse plaque commémorative barrée de l'inscription : « Aux morts-es du sida, la patrie indifférente ».
« Nous voulons attirer l'attention de l'État sur la dégradation extrême du droit au séjour pour raisons médicales », a expliqué Adeline Toullier, directrice du plaidoyer chez AIDES.
Remise en cause du transfert de l'évaluation aux médecins de l'OFII
Depuis la loi Chevènement de 1998, un étranger gravement malade peut bénéficier d'un titre de séjour à la condition de ne pas avoir accès à des traitements disponibles dans son pays d'origine.
Le 1er janvier 2017, la procédure d'évaluation médicale est passée sous l'égide de l'OFII, dépendant du ministère de l'Intérieur, alors qu'elle relevait auparavant des agences régionales de santé (ARS), rattachées au ministère de la Santé. Un transfert auquel les associations de défense des étrangers étaient opposées.
AIDES affirme que, depuis un an, 24 personnes séropositives ont vu leur demande de titre de séjour pour soins rejetée avec obligation de quitter le territoire français (OQTF). En 2016, seulement quatre avis défavorables ont été recensés, selon Adeline Toullier. « Cela confirme nos inquiétudes : les médecins de l'OFII ont une tutelle qui obéit davantage à une logique de maîtrise des flux migratoires, et pas de santé publique ; l'obsession de la fraude l'emporte », dit-elle.
L'OFII se défend
« Près de 94 % des dossiers d'étrangers séropositifs reçoivent des avis favorables. Le reste concerne des cas de fraude, de refus de traitements, ou de personnes dont le pays d'origine propose une prise en charge », a réagi auprès de l'AFP le directeur général de l'OFII Didier Leschi.
« Les médecins de l'OFII restent des médecins, au même titre que les médecins scolaires ou les médecins du travail. Le fait d'être à l'OFII ne les libère pas du serment d'Hippocrate », a-t-il ajouté. L'ensemble de la procédure est supervisé par un comité de sages, composé notamment de spécialistes de l'Organisation mondiale de la santé (OMS), et présidé par Xavier Emmanuelli, le fondateur du SAMU social de Paris, a-t-il rappelé.
En janvier 2017, le ministère de la Santé avait assuré dans un arrêté que les nouvelles procédures de délivrance des titres de séjour aux étrangers malades se feraient dans le respect des règles déontologiques communes à tout médecin et du secret médical.
Le texte précisait que l'avis communiqué au préfet par le collège des médecins de l'OFII ne comporte aucune information couverte par le secret médical ni aucun élément susceptible de révéler la pathologie du demandeur, et le rapport médical n'est communicable ni à cette autorité administrative, ni à aucune autre.
Avec AFP
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