Dans un chapitre intitulé « La crise n’a pas eu lieu : le cas de la grippe H1N1 », Laurent Degos revient sur l’épisode de la grippe A (2009-2010) – qu’il met spectaculairement en miroir avec les inoculations de la petite vérole opérées en France au milieu du XVIIe siècle.
Dans son analyse a posteriori, le Pr Degos relève deux circonstances spécifiques à cette crise. L’une est « interne » : « Le projet de combat contre l’épidémie a été élaboré une fois pour toutes, comme un plan de guerre, sans élasticité, dans le but de mettre toute la population au pas pour mieux la protéger », écrit-il. L’autre est « externe » : c’est « l’arrivée extérieure d’un virus dont la nocivité a été mal évaluée ». Combinés, ces deux éléments ont produit un cocktail explosif que l’expert résume ainsi : « Le doute sur l’efficacité et l’innocuité du vaccin, lié à l’attribution de types particuliers de vaccins à certaines sous-populations, le changement de cap sur le nombre d’injections, sur le traitement associé à la grippe, sur les méthodes et sur les indications du diagnostic biologique, l’absence du lien étroit de confiance entre le citoyen et son médecin ont créé les ingrédients de la crise : méfiance, apparence d’arbitraire de la "surveillance", inquiétude transformée en peur, réminiscence d’accidents en situation semblable, refuge dans la "sousveillance". »
Considérant que, une fois l’orage passé, toutes les circonstances étaient réunies pour tirer les leçons de cet événement – particulièrement du fait que la catastrophe annoncée n’est pas arrivée –, le Pr Degos regrette qu’un débriefing productif n’ait pas eu lieu. L’objectif visé aurait dû être d’« éviter une crise ultérieure, mais surtout (de) regagner la confiance de la population et obtenir son adhésion lors d’une prochaine "vraie crise" », estime-t-il. Or que s’est-il produit ? Une enquête parlementaire a été ouverte, « qui s’est parfois orientée vers la recherche de responsables ». L’occasion a été manquée de faire parler les acteurs de la campagne de vaccination « sans l’arrière-pensée de se défendre d’une quelconque culpabilité ».
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