L’INFECTION nosocomiale (IN) est une infection acquise en établissement de santé. Elle doit être dissociée de l’infection associée aux soins (IAS) qui est indépendante de son lieu de survenue et survient au décours de la prise en charge d’un patient. L’infection du site opératoire (ISO) est, comme d’autres infections (bactériurie, bactériémie, infection pulmonaire, infection liée aux cathéters…), une forme d’IAS. Selon les résultats d’une enquête nationale effectuée en 2006, parmi les IAS, les ISO viennent en troisième position (14 %) après les bactériuries (30 %) et les pneumopathies(15 %).
Trois types d’ISO ont été définis en fonction de leur profondeur (CCLIN*- Nord 2010). Les infections de la partie superficielle de l’incision (peau et tissu cellulaire sous-cutané) sont les plus fréquentes (60 %). Les infections de la partie profonde de l’incision touchent fascia et muscle (29 %). Les infections profondes d’organe ou d’espace sont plus rares (11 %) mais plus graves.
Dix jours après l’intervention.
Le diagnostic se fait par la mise en évidence de la présence plus ou moins profonde de pus, par la positivité d’une culture et/ou par la symptomatologie infectieuse. Il peut être confirmé par le chirurgien lors d’une réintervention. Les germes les plus fréquemment retrouvés sont Staphylococcus aureus (27,3 %), Escherichia coli (16,7 %), Enterobacter cloacae (9,1 %) et Pseudomonas aeruginosa (6,7 %).
Les ISO apparaissent en moyenne 10 jours après l’intervention et sont diagnostiquées le plus souvent après la sortie du patient de l’hôpital. Elles peuvent donner lieu à une hospitalisation, un handicap, une incapacité à la fin de l’hospitalisation ou même être associées à une menace vitale ou à un décès. Le taux de létalité est de 1,8 %, celui de réhospitalisation de 29,8 % et celui de réintervention de 28,7 %. Les facteurs favorisants sont multiples et dépendent du patient (âge et état de santé) mais aussi de facteurs extérieurs liés à l’acte opératoire ou à l’environnement. La contamination peut être préopératoire (plaie souillée traumatique, flore cutanée), peropératoire endogène ou exogène (mains, phanères, rhinopharynx des membres de l’équipe soignante, air ambiant) ou postopératoire (drains, pansements).
Un retentissement économique et social.
L’impact économique des ISO est important : le surcoût a été évalué entre 1 500 et 15 000 euros par ISO et varie en fonction du type d’intervention. L’ISO a aussi un impact médico-légal. Elle est considérée comme un événement indésirable évitable, c’est-à-dire qui ne serait pas survenu si les soins avaient été conformes à une prise en charge satisfaisante. Il n’existe pas d’indemnisation généralisée de l’aléa thérapeutique mais, depuis mars 2002, les dommages résultants d’infection nosocomiale survenant dans des établissements de soin donnent lieu, dans certaines conditions, à réparation au titre de la solidarité nationale.
Heureusement, une tendance à la diminution du taux national d’ISO sur les sept dernières années est constatée (de 1,63 % en 2004 à 0,92 % en 2010). Selon le « Programme national de prévention des infections nosocomiales » (août 2009), le bilan 2005-2008 apparaît positif même si l’utilisation de la friction hydroalcoolique des mains est encore insuffisante et si la surveillance des ISO n’est encore réalisée que dans 84,5 % en établissements de soin. Ce programme insiste sur le recueil des données de surveillance et l’amélioration des dispositifs de prévention et fixe des objectifs pour 2009-2013. Ainsi, en 2012, l’incidence des ISO devra avoir diminué de 25 % pour les interventions ciblées à faible risque d’infection ; 95 % des établissements chirurgicaux devront avoir intégré le suivi des ISO dans leur système d’information hospitalier et 100 % des établissements pratiquant la chirurgie devront utiliser des outils d’aide à l’observance des mesures de prévention du risque infectieux peropératoire.
Recommandations.
La Société française d’hygiène hospitalière a fait paraître en septembre 2010 des recommandations : « Surveiller et prévenir les infections associées aux soins ». Elles préconisent, en prévention préopératoire, de rechercher la présence d’une infection préexistante, de dépister la présence de S. aureus, de S. aureus résistants à la méticilline (SARM) et d’autres bactéries multirésistantes chez les patients à risque avant chirurgie cardiaque ou orthopédique et de vérifier le respect des mesures d’hygiène préventive (douche et hygiène bucco-dentaire). La dépilation doit être faite à la tondeuse plutôt qu’au rasoir.
Au bloc opératoire, il faut insister sur l’antibioprophylaxie et sur la remise d’une tenue spécifique au patient avant l’entrée au bloc opératoire. La préparation du champ opératoire implique drapage et désinfection large du champ opératoire avec un antiseptique en solution alcoolique (la bétadine non alcoolique ne devrait plus être utilisée). Des normes concernant la tenue des professionnels, la désinfection chirurgicale des mains, la discipline et la qualité de l’air font aussi partie des mesures de prévention préconisées.
En postopératoire, la plaie doit être surveillée quotidiennement et le changement de pansement et les manipulations des drains effectués selon des règles d’asepsie codifiée.
De nouvelles mesures locales de prévention pourraient aussi diminuer la survenue des ISO : apport local d’antibiotiques ou antiseptiques : par exemple, compresses de collagène imprégnées de gentamycine (Collatamp), fils de suture imprégnés d’antiseptique comme le triclosan, utilisation plus large de techniques d’approximation fine de la peau (surjets intradermiques, colles biologiques) qui assurent une étanchéité parfaite de la plaie.
Session « Infections associées aux plaies chirurgicales », d’après la communication du Pr Olivier Chapuis, hôpital du Val-de-Grâce, Paris.
*CCLIN : Centre de coordination de la lutte contre les infections nosocomiales
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