Une étude randomisée de phase III, publiée dans le « Journal of Clinical Oncology », avance des résultats encourageants concernant l’utilisation du virus de l’herpès génétiquement modifié dans le traitement du mélanome métastatique. Cette nouvelle approche d’immunothérapie – l’immunothérapie virale – a permis de ralentir la progression de la maladie avec une toxicité minimale – phénomène rare dans ce domaine. Les résultats sont si probants qu’un panel d’experts a recommandé, à la quasi-unanimité, son autorisation de mise sur le marché aux États-Unis – décision sur laquelle l’agence américaine des médicaments, la FDA, devrait se prononcer d’ici le mois de novembre.
L’approche repose sur l’utilisation du talimogène laherparepvec (T-VEC), une version modifiée du virus herpès simplex 1. Lorsque le T-VEC est injecté, il se réplique dans les cellules tumorales, qu’il lyse. Les cellules saines, elles, sont à l’abri. En effet, la suppression de deux gènes dans le virus – ICP34.5 et ICP47 – le rend inactif vis-à-vis des cellules saines. Mais le T-VEC ne s’arrête pas là, il agit également en boostant le système immunitaire de l’hôte : il a été génétiquement modifié pour exprimer une molécule humaine, le granulocyte-macrophage colony stimulating factor (GM-CSF).
De meilleurs résultats chez les patients naïfs
Dans cet essai, mené dans 64 centres dans le monde, 436 patients avec un mélanome métastatique non-résécable, de stade 3b, 3c et 4, ont été recrutés. Ils ont reçu soit le traitement T-VEC, soit un traitement d’immunothérapie contrôle : la molécule GM-CSF. 16,3 % de ceux traités avec le T-VEC ont eu une réponse soutenue pendant plus de six mois, comparé à 2,1 % dans le groupe contrôle. La rémission s’est maintenue pendant plus de 3 ans pour certains patients traités par T-VEC – un seuil à partir duquel les spécialistes de l’immunothérapie commencent à parler de guérison, selon les auteurs.
Précision importante, la réponse était particulièrement bonne chez les patients avec des cancers moins avancés (de stade 3b, 3c et 4M1a), et chez les patients qui n’avaient pas encore reçu de traitement – ce qui suggère que l’approche pourrait être proposée en première ligne. Les patients de stade III et stade IV précoce sous T-VEC ont vécu en moyenne 41 mois, contre 21,5 mois en moyenne pour les patients à des stades similaires dans le groupe contrôle. Enfin, l’immunothérapie virale a été très bien tolérée. Les effets secondaires étaient en effet sans grande importance : de la fatigue, des frissons, de la nausée et des réactions localisées au site d’injection.
« Ces résultats sont particulièrement importants car il s’agit de la première étude de phase 3 à démontrer le bénéfice thérapeutique de l’immunothérapie virale dans le traitement du cancer, notent les auteurs. Ces résultats suggèrent que l’approche pourrait être utilisée en première intention, et on pense que son efficacité peut être renforcée en l’associant à d’autres molécules – ce que nous sommes actuellement en train d’étudier. »
L’immunothérapie en tête d’affiche à l’ASCO
Au-delà de ces résultats, c’est l’immunothérapie en général qui suscite actuellement l’engouement des oncologues spécialisés dans le traitement du mélanome mais également d’autres cancers. L’immunothérapie tiendra d’ailleurs la place centrale cette année au congrès de l’ASCO, qui aura lieu du 29 mai au 2 juin à Chicago.
Dans une conférence de presse organisée ce matin par l’Institut national du cancer (INCA), en prévision du congrès de l’ASCO, le Dr Chantal Belorgey, directrice des recommandations, du médicament et de la qualité de l’expertise à l’INCA, a donné un aperçu de la direction dans laquelle se dirige la prise en charge du mélanome : « Avant l’avènement de l’immunothérapie, on n’avait pratiquement rien pour traiter le mélanome. Il s’agit de la première pathologie dans laquelle on est arrivé à des résultats probants avec l’immunothérapie et les thérapies ciblées. De nouvelles molécules seront présentées à l’ASCO, notamment les anti-PDL1, on attend aussi beaucoup de l’association de 2 ou 3 immunothérapies et/ou de thérapies ciblées – associations qui seront désormais proposées en première ligne alors que jusqu’à présent on les utilisait surtout chez les patients les plus avancés. Enfin, des chercheurs montreront que l’immunothérapie peut avoir un effet durable, alors que jusqu’alors les thérapies ciblées étaient limitées, du fait notamment de l’apparition de résistances. »
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