« Depuis le 20 juin, la circulation du SARS-CoV-2 a repris progressivement : on a vu réapparaître des charges virales plus importantes dans les eaux usées, mais à un rythme beaucoup plus lent que lors de la première vague, observe auprès du « Quotidien » le Pr Vincent Maréchal, virologue à Sorbonne Université et un des initiateurs du réseau de surveillance des eaux usées baptisé Obépine (Observatoire épidémiologique dans les eaux usées). En Île-de-France, nos relevés dans les 4 à 6 stations de la région indiquent actuellement une charge virale assez proche de celle de nos premiers échantillons collectés au début du mois de mars ».
Des signaux précoces sur tout le territoire
Lancé dès le début de l’épidémie en France par le laboratoire de la régie municipale Eau de Paris, trois équipes de Sorbonne Université (mathématique, virologie, hydrologie) et l’Institut de recherche biomédicale des armées (IRBA), ce réseau « sentinelle » (1) réalise des prélèvements réguliers (deux par semaine) dans 150 stations d’épuration du territoire métropolitain afin de suivre l’évolution de la charge virale dans les eaux usées et d’anticiper la reprise de l’épidémie de Covid-19 à une échelle locale.
« Nous avons perçu la reprise épidémique plusieurs semaines avant les premières données épidémiologiques, ce qui confirme la valeur prédictive de l’analyse des eaux usées », poursuit le Pr Vincent Maréchal, précisant qu’une équipe de l’université de Lorraine, associée à Obépine, a constaté la même évolution très progressive à travers sa surveillance de plusieurs stations dans l’Est mais aussi sur le littoral, pendant l’été.
Cette reprise plus lente de la circulation du virus est attribuée aux effets des mesures sanitaires. « Les mesures barrières ont une efficacité. Une meilleure protection ralentit la circulation, même si la dynamique n’est pas interrompue », suggère le Pr Vincent Maréchal.
Pour l’heure, les analyses d’Obépine mettent en évidence une charge virale dans les eaux usées, mais ne permettent pas encore d’en déduire le nombre de personnes infectées. Des travaux sont en cours pour affiner les données recueillies.
Une première étude a été menée cet été avec Santé publique France sur l’Île d’Yeu. « Un signal est apparu le 3 août et a entraîné la mise en place d’un barnum de dépistage en lien avec l’Agence régionale de santé (ARS). Sur 980 personnes testées, 6 cas asymptomatiques ont été détectés, raconte le Pr Vincent Maréchal. Ces premiers résultats vont nous permettre de mieux comprendre à combien de cas correspond une station positive ».
Vers un suivi d’autres pathologies infectieuses ?
Si plusieurs chantiers attendent encore les partenaires du réseau Obépine, et notamment sur l’infectiosité des eaux usées et des boues restant après leur traitement, de nombreuses avancées ont été réalisées depuis le lancement de l’initiative en mars et la lettre de mission du ministère de la Recherche et le déblocage de 3 millions d’euros de financement en juin.
Au-delà de l’intégration des 150 stations d’épuration dans le réseau, les membres d’Obépine ont déployé des protocoles communs d’échantillonnage, d’analyse, de traitement et de présentation des données. La collaboration avec les institutions (ministères de la Recherche, de la Santé, de la Transition écologique et de l’Intérieur, mais aussi avec les ARS et Santé publique France) s’est formalisée au sein d’un comité interministériel.
À terme, l’ambition est de capitaliser sur cette expérience pour le suivi d’autres pathologies infectieuses. « Beaucoup de pathogènes se retrouvent dans les eaux usées, mais l’analyse microbiologique (virologique, bactériologique, parasitologique) des eaux usées n’a encore jamais été utilisée pour évaluer l’état sanitaire d’une population », souligne le Pr Vincent Maréchal.
L'Académie de Médecine soutient cette idée et recommande la mise en place d’une surveillance systématique pour d’autres virus (myxovirus, rotavirus, virus respiratoire syncytial...).
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