Que ce soit en traitement ou en prévention des accès palustres, l'artémisinine associée à un autre médicament antipaludique, est efficace et bien tolérée chez les femmes enceintes, selon deux études publiées dans le « New England Journal of Medicine ».
Si l'artémisinine est déjà largement utilisée dans le traitement des accès palustres au cours des 2e et 3e trimestres de grossesse, comme le recommande l'Organisation Mondiale de la Santé (OMS), ces études vont plus loin. L'association dihydroartémisinine-pipéraquine se distingue dans les deux situations.
Les recommandations actuelles de l'OMS
Outre le fait de valider les pratiques, l'une (PREGACT) compare l'intérêt de quatre associations contenant de l'artémisinine. Ce qui avait été très peu documenté. Deux « cocktails » antipaludiques se révèlent plus intéressants, à savoir les associations artémether-luméfantrine et dihydroartémisinine-pipéraquine.
L'autre étude montre, pour la première fois, la meilleure efficacité d'une association contenant de l'artémisinine par rapport au traitement de référence à base de sulfadoxine-pyriméthamine actuellement recommandé par l'OMS. L'artémisinine, elle aussi administrée de façon intermittente une fois par mois, pourrait être une alternative à la sulfadoxine-pyriméthamine, en proie à des résistances grandissantes en Afrique.
Le placenta, une cible du parasite à haut risque
Les accès palustres en cours de grossesse sont associés à une forte morbi-mortalité maternelle et infantile en pays d'endémicité. Le risque d'accès palustre grave est plus élevé ainsi que celui d'hypotrophie et de mort fœtale du fait d'échanges materno-fœtaux perturbés secondaires à la séquestration parasitaire placentaire.
L'étude PREGACT chez 3 428 femmes enceintes dans quatre pays d'Afrique (Burkina Faso, Ghana, Malawi, sous la direction du Dr Umberto D'Alessandro révèle que deux associations se détachent sur les quatre testées. À savoir artéméther-luméfantrine, amodiaquine-artésunate, méfloquine-artésunate et dihydroartémisinine-pipéraquine. L'efficacité était mesurée sur taux de guérison à la PCR au 63e jour.
Traiter avec le moins d'effets secondaires
L'association artémether-luméfantrine a présenté le plus faible taux d'effets secondaires (11,5 %) avec un bon taux de guérison (94,8 %) mais avec la plus courte prophylaxie post-traitement. L'association dihydroartémisinine-pipéraquine était la plus efficace (99,2 %) avec un bon profil de tolérance (20,6 %). Pour les deux autres « cocktails » testés, l'efficacité était comparable (98,5 % et 96,8 %) mais pour un taux d'effets secondaires important à 48,5 % et 50,6 %. Les effets secondaires rapportés étaient à type d'asthénie, de perte d'appétit, de vertiges, de nausées et de vomissements.
Quant à la prévention antipalustre, la molécule sous forme d'association dihydroartémisinine-pipéraquine se présente pour la première fois comme une alternative efficace dans l'arsenal. L'étude menée en Ouganda par le Dr Grant Dorsey (université de Californie) chez 300 femmes enceintes séronégatives pour le VIH. Trois protocoles ont été comparés : sulfadoxine-pyriméthamine, schéma dihydroartémisinine-pipéraquine (DP) à 3 doses (20, 28 et 36 semaines d'aménorrhée) et schéma DP une fois par mois (n=100).
Zéro accès palustre symptomatique
Concernant le critère principal qui était la prévalence de l'atteinte placentaire par le paludisme confirmé à l'anatomopathologie, le groupe sulfadoxine-pyriméthamine était plus touché (50 %) que le schéma à 3 doses de DP (34 %) et le schéma mensuel DP (27 %). La survenue de complications à la naissance (mort fœtale in utero, mort-né, poids≤2 500 g, prématurité, anomalie congénitale) était diminuée de moitié avec le schéma mensuel DP (9,2 %) par rapport au groupe sulfadoxine-pyriméthamine (18,6 %) et au schéma DP à 3 doses (21,3 %). Aucun accès palustre symptomatique n'est survenu dans le groupe DP mensuel par rapport à 41 avec le traitement sulfadoxine-pyériméthamine et 12 avec le schéma à 3 doses). La tolérance était bonne pour les trois traitements testés avec un risque faible de vomissements.
Comme le souligne dans un éditorial attaché Joel Tarning de l'université d'Oxford, « les nouveaux médicaments en développement sont encore à des années de l'utilisation clinique et le dosage fondé sur les preuves des médicaments antipaludiques actuellement disponibles devrait pouvoir augmenter leur durée de vie thérapeutique en réduisant le risque d'échecs thérapeutiques et le développement de résistance. Ce pourrait être particulièrement important en Asie du Sud-Est où l'immunité acquise est plus faible et la résistance à l'artémisinine (...) en train d'émerger et de se répandre ».
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