Antibiotique inefficace
Elle a consulté il y a deux semaines un confrère et reçu un traitement par pénicilline A/acide clavulanique, associé à un traitement antiseptique local. Ce traitement n’a eu aucun impact sur la lésion qui se serait même, aux dires de la patiente, plutôt étendue.
L’examen clinique note une lésion circonscrite au pourtour très inflammatoire et dont le centre a un aspect croûteux.
Compte tenu de l’absence de l’inefficacité du traitement antibiotique et du séjour en Afrique, la lésion est biopsiée pour recherche de parasite.
L’examen anatomopathologique permet de retrouver sur le prélèvement Leishmania major ; il s’agit donc d’une leishmaniose cutanée.
La leishmaniose
Cette parasitose est due à un protozoaire du genre leishmania.
Les leishmanioses sont présentes sur tous les continents en dehors de l’Océanie, et sont réparties dans 88 pays ; l’OMS évalue à 2 millions le nombre de cas symptomatiques.
Trois formes sont décrites : les formes viscérales ou Kala-azar, mortelles en l’absence de traitement, les leishmanioses cutanées, le plus souvent localisées, et les formes cutanéomuqueuses.
La forme cutanée
L’incidence de cette forme est en augmentation dans le monde avec 1 000 000 à 1 500 000 de nouveaux cas par an et trois foyers (méditerranéen, américain et africain).
Il est noté une forte recrudescence en Afghanistan secondaire à une atteinte par L. tropica, et l’apparition de cas récents au Sri Lanka.
Le déroulement du cycle de cette parasitose comporte trois éléments :
1) le parasite lui-même, unicellulaire flagellé, avec une forme promastigote rencontrée chez le vecteur, le phlébotome, et une forme amastigote ovoïde de 2 à 5 microns de diamètre visible chez l’homme ;
2) le réservoir du parasite (chien, chat, rongeurs sauvages, voire même l’homme) ;
3) le vecteur : il s’agit d’un diptère de 2 à 3 mm de diamètre (le phlébotome) qui ressemble à un petit moucheron, et dont la femelle hématophage inocule en début de nuit le parasite à l’homme.
Aspects cliniques
Aspects cliniques de la leishmaniose cutanée.
Cette anthropozoonose comporte une phase d’incubation longue (allant d’un jusqu’à plusieurs mois après l’inoculation).
En dehors de la lésion papuleuse classique, les formes cliniques sont nombreuses et variées, et peuvent se présenter sous forme :
- d’ulcérations torpides indolores, parfois surinfectées ; elles sont visibles au niveau du visage, et peuvent simuler un carcinome baso cellulaire par exemple ;
- de lésions nodulaires pures ou papulonodulaires ;
- des lésions papulosquameuses à distinguer de lésions de lupus chronique ou de sarcoïdose cutanée ;
- des lésions ulcérovégétantes évocatrices de mycose ou de mycobactériose ;
Les leishmanioses cutanées (LC) de l’Ancien Monde sont, comme dans notre cas clinique, secondaires à une atteinte par L. major ou L. tropica, mais aussi à des espèces viscérotropes comme L. Donovani ou L. infantum.
L. major (donnant le bouton d’Orient, le clou de Biskra) est responsable de la forme zoonotique (dont le réservoir est un rongeur) et évolue souvent spontanément vers la guérison en 2 à 4 mois.
Deux formes cliniques sont particulières :
- la leishmaniose cutanée post-kala-azar qui se manifeste par des lésions papulonodulaires disséminées qui surviennent dans les suites d’une forme viscérale ;
- la leishmaniose anergique qui serait liée à un déficit immunitaire, et se caractérise par des papulonodules infiltrés profus d’évolution chronique avec une prédilection au niveau des oreilles et du nez.
Diagnostic
Il repose sur la mise en évidence du parasite dans les zones lésées (prélèvement en périphérie, étalement de suc dermique ou apposition d’un fragment biopsique sur lame), par la réalisation d’un examen direct après coloration au Giemsa.
Parfois, en cas de forte suspicion, un examen anatomopathologique est effectué.
Une culture sur milieu de Novy, Nicolle ou Mc Neal peut également être réalisée.
Les sérologies ne sont pas utiles dans cette situation, car elles sont souvent négatives.
Traitement
Il repose en un premier temps sur la prévention.
À ce titre il faut lutter contre les phlébotomes grâce au recours à des insecticides. La protection individuelle repose quant à elle sur l’application de répulsifs et l’utilisation de moustiquaires.
Le traitement des formes cutanées est le plus souvent un traitement local par cryothérapie ou injection de dérivés d’antimoine (Glucantime).
Pour les cas où l’atteinte est plus sévère, on a recours :
- soit aux dérivés d’antimoine en intramusculaire ;
- soit à la pentamidine en I. V. ;
- éventuellement à la paramomycine ou au fluconazole oral.
Bibliographie
1. Aubry P. Leishmanioses. Actualités 2 010. http://medecinetropicale.free.fr
2. Pily E. Maladies infectieuses et tropicales. Paris: Vivactis plus ; 2 009.
3. Hassam B, Senouci K, Bennouna-Diaz F. La leishmaniose cutanée. Expérience du service de dermatologie d’Avicenne-Rabat. Médecine du Maghreb 1991; 28 : 37-38.
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